Philippe Katerine, chanteur déjanté, a la double nationalité : mi-vendéen, mi-martien.

Katerine, c’est le pseudonyme qu’a choisi Philippe Blanchard, Vendéen originaire de la commune de Chantonnay, pour se lancer dans la chanson. « Transgenre », comme on dit de nos jours ? Non, juste fêlé.

Sans doute, occupés comme vous l’êtes, avez-vous suivi sa carrière d’une oreille plus distraite que la mienne. Mais les plus branchés d’entre vous connaissent au moins son plus fameux refrain : Louxor, j’adore… Bien entendu, il ne s’agit pas ici de la cité de Haute-Égypte, mais d’une boîte de nuit à Clisson (Loire-Atlantique).

Tout est à l’avenant dans l’univers de cet ovni, atterri ces jours-ci sur nos plateaux télé pour la promo de son nouvel album, Magnum. Pourquoi « Magnum » ? direz-vous, légitimement méfiants. L’artiste invoque trois raisons : « le champagne, les glaces et le flingue. »

Ce type-là mérite l’attention, ne serait-ce que comme signe des temps. Il se fout du monde, certes, mais c’est le nôtre ! Accessoirement, il le fait avec talent. Vingt-cinq ans déjà que Katerine mène sa barque, son bateau ivre, dans les eaux de l’underground le plus décalé, sans concession pour « la volaille qui fait l’opinion », comme disait Souchon.

Touche-à-tout, sinon « de génie » comme tout le monde, au moins de folie créative, notre chanteur est aussi à ses heures acteur, cinéaste, écrivain et artiste-peintre ; il a même exposé ses œuvres aux Galeries Lafayette…

En 2010, Katerine rend un hommage de sa façon à la chanson française, avec 52 reprises dans l’espace : un triple CD où il revisite les plus grands succès de notre patrimoine contemporain, de Déshabillez-moi à Ma Benz en passant par L’idole des jeunes et l’incontournable Queue leu leu.

Point de deuxième degré là-dedans ; plutôt un mélange étrange d’ironie et de nostalgie bien dans sa manière, qui n’a pas l’heur de plaire à tout le monde. Ainsi l’année suivante son huitième album, Philippe Katerine, où il pose en couverture avec papa et maman, lui vaut les foudres du Monde : « Premier degré (…) musique indigente (…) fausse audace des propos »… Et légitime colère du quotidien de référence, face à cet artiste censément subversif qui n’est même pas engagé.

Il fallait le voir, l’autre soir au Grand Journal de Canal, chanter son nouveau tube Efféminé, face à une Vallaud-Belkacem interloquée : « Avec mes grosses c….  / Je fais mon jogging / Ma chérie me dit / Que j’suis efféminé » …

Trois jours plus tard, il est longuement interviewé dans Alcaline, le magazine musical de France 2. À questions débiles, réponses appropriées :

– Votre devise ? « L’expérience vaut mieux que les conseils !  Malheureusement, c’est aussi un conseil… »

– Votre plus grand regret dans la vie ? « N’avoir pas chanté la pub pour « Belle des Champs ». Et le crooner de fredonner : « Donne-nous un peu de ton fromage, la-la-la-la… »

Moi, je dis qu’un mec qui se paye notre tronche aussi élégamment ne peut pas être tout à fait mauvais.

 

[Article publié sur Valeurs Actuelles]

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