L’homme politique se résume de plus en plus à son image. Avec Valls, Giesbert nous en donne un fameux exemple.

Manuel  Valls, le matador. Dans ce documentaire diffusé sur France 3, les amateurs de Franz-Olivier Giesbert le retrouveront au mieux de sa forme : alerte, impertinent, voire insolent à l’égard du troisième personnage de l’État – qui sera bientôt le premier, si l’en croyez !

Un beau sujet en somme, pour notre Alceste rigolard, que ce Rastignac austère – et FOG ne le rate pas ! Pour être juste, il n’avait guère été plus tendre avec Sarko. Ce hooligan ne respecte rien.

La recette de ce doc réussi : outre le recul amusé de l’auteur, qui chahute en voix off, une foule d’images et d’anecdotes éclairantes, et en fait de témoins, la crème ! Sur Manuel, ce diable de Giesbert a réussi à décrocher, entre autres, les confidences de sa mère, de son premier mentor Michel Rocard et de François Hollande en personne !

Au commencement était donc un  mini-« bébé Rocard » pas comme les autres : avant même d’être naturalisé français celui-là, voulait être Président ou rien.

Dès ses vingt ans Valls noue un « Pacte d’amitié », jamais rompu, avec Alain Bauer, incontournable criminologue qui bossa aussi pour Sarkozy après avoir été, comme il y aspirait tant, grand Maître du Grand Orient ; chacun son truc. Quant au troisième mousquetaire, Stéphane Fouks, lui aussi est très « com’ », dans un genre carrément pubard. À eux trois, ils se le sont promis, ils conquerront Paris !

Leur apprentissage, c’est quand même quinze ans à contre–courant dans la roue de Rocard – jusqu’à ce qu’elle crève sur un geste de Mitterrand. De cette amère expérience, nos trois amis sortiront renforcés dans l’idée que l’essentiel, en politique, c’est le paraître : l’image, le discours, la com’ … Pour le reste on verra bien, une fois à l’Élysée

En 1997 déjà, c’est en tant que chargé de la communication que Valls se fait embaucher  par Lionel Jospin à Matignon – mais le boulot n’est guère facile. « Jospin après Rocard ! ricane Giesbert : encore un protestant coincé qui déteste la com’ ! » Et têtus tous les deux, avec ça…

Il est temps pour Manuel de se mettre à son compte, et il le sait. Dès lors, son credo va converger de plus en plus harmonieusement avec son créneau : il sera « le socialiste qui n’est pas d’accord avec les autres », résume FOG – qui lui reconnaît au passage « dix ans d’avance sur ses petits copains » du PS.

Compte tenu des lois du marché (y compris politique) et de la demande populaire d’ « ordre », la maison Valls-Fouks-Bauer a mis au point un produit révolutionnaire : le social-libéralisme sécuritaire. Les idées de Rocard plus le tempérament de Clemenceau !

Sur ces bases, il ne récolte à la primaire socialiste de 2011 que 5,6 % des suffrages. Mais c’est une défaite à la Pyrrhus ! Rallié aussi sec à François Hollande, il joue des coudes jusqu’à s’imposer comme chargé de com’ (encore !) du candidat – y compris dans la gestion de son ingérable compagne.

Autant de mérites récompensés par la place Beauvau, où il peaufinera à loisir ses réseaux et sa réputation d’homme d’ordre – à l’instar de Sarkozy et dans le même but. « L’ex-paria du PS est devenu incontournable », commente FOG. De fait, fin 2013, à la faveur d’une débâcle de son parti aux municipales, Valls accède à l’avant-dernière marche de son cursus honorum : Matignon. Jusqu’où ne montera-il-pas ?

D’ici à 2022, (son objectif), il lui reste quand même du boulot, à en croire le père Giesbert : « Le personnage n’est pas tout-à-fait fini. Il lui manque le sourire, des cicatrices, du romanesque… » « Et un grain de folie ! » ajoute Catherine Nay.

Sur ce dernier point, je ne serais pas aussi affirmatif. La psychorigidité, même « communicative », reste un désordre mental – contrairement au « crétinisme » diagnostiqué chez Valls par Onfray. Mais ce garçon manque de charité chrétienne, comme on sait.

[Publié dans Valeurs Actuelles]

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