Quand un gangster newyorkais mal léché débarque dans une petite bourgade norvégienne où règne le « scandinavement correct », ça jette un froid…

En ce moment, tous les lundis sur Canal plus, Lilyhammer : une série faussement policière, mais vraiment maligne et drôle. L’originalité de ce feuilleton c’est qu’il est américano-norvégien, non pas seulement dans sa coproduction, mais dans son sujet même : le choc des cultures.

L’action se déroule dans la petite ville de Lillehammer, dont on était sans nouvelles depuis les J.O. d’hiver de 1994. C’est même pour ça que le gangster newyorkais Frank Tagliano, qui a balancé son parrain au FBI, décide d’aller se faire oublier là-bas, sûr que personne ne viendra l’y chercher. Voire…

En attendant, le mafioso latino importé de la Grosse Pomme va avoir quelque mal à se fondre dans la population de cette paisible bourgade de la Norvège profonde. C’est même tout le sel de cette étude de mœurs comparée, où notre anti-héros va de surprise en surprise, et nous avec.

Il faut voir sa tête durant la « Session d’intégration des migrants », où l’hymne national norvégien est accompagné au sitar et au tam-tam.

Sans parler de ce « Cours de prévention antidrogue », dispensé aux jeunes par un adulte qui croit gagner en crédibilité en « partageant son expérience » : « Avant de décrocher, j’ai même couché pour avoir ma dose d’héroïne… »

Il faudrait tout citer – surtout à des gens cultivés comme vous, qui n’ont ni Canal plus ni la télé. Allez, encore un ou deux exemples pour vous donner au moins l’envie d’acheter le coffret DVD pour « les Fêtes ».

Au fil des épisodes, vous découvrirez entre autres l’homme au foyer, vasectomisé sur décision de sa femme après trois enfants ; les toilettes écolos à incinération, qui naturellement prennent feu ; et même l’homme – sage – femme à barbe auquel Frankie refuse absolument de confier sa petite amie enceinte.

Peu à peu, cependant, l’assimilation se fait des deux côtés. L’ « affranchi » de N.Y. City s’habitue au paritarisme, au puritanisme et autres boboïsmes locaux. Parallèlement, sous son influence, les citoyens – modèles de Lillehammer prennent goût aux combines, aux dollars et même aux comportements les plus « scandinavement incorrects »…

Ainsi quand le fils de sa compagne (dix ans) soumet à Tagliano le discours qu’il doit prononcer pour la fête nationale, celui-ci proteste vivement : « Il faut quand même dire que tu es fier d’être Norvégien ! Je vais le retravailler… »

Résultat : au jour dit, le petit récite  une étonnante allocution, devant une assistance multiculturelle passablement sidérée : « La tolérance c’est bien, mais aujourd’hui nous célébrons notre Fête nationale ! Bien sûr, la Norvège accueille à bras ouverts les immigrés…  Mais nous devons aussi nous assurer qu’ils ont autre chose à offrir à notre nation que la criminalité, l’illettrisme ou la tendance à abuser de nos aides sociales. Que Dieu bénisse la Norvège ! »

Bien sûr, cette saillie anti-immigration conçue par un immigré de fraîche date relève du deuxième degré ; sinon ça passerait mal. N’empêche qu’on n’entend pas ça tous les jours, notamment dans Plus belle la vie

Article publié dans Valeurs Actuelles, le 13 novembre 2013

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