2 mars 2016, Paris,

Le Président François Hollande[1. Afin de rendre mon texte crédible aux yeux du Tout-Paris journalistique parisien, c’est à dire de complaire à la fois à Franz-Olivier Giesbert et à Michel Denisot, j’ai décidé de leur donner comme chef d’Etat, celui qui, aujourd’hui en 2011, a les faveurs de leurs boules de cristal.] se demande si, finalement, tout cela n’est pas allé trop loin…

Il s’est peut-être laissé emporté par les évènements, le chef d’Etat. Et il s’en veut. D’avoir nommé, sous la pression, Eva Joly au ministère de la Justice. De lui avoir laissé les mains libres, à l’ancienne juge, sous la dictée du chef de l’opposition, Jean-François Copé, devenu en quelques mois le meilleur allié de la dame qui, selon la jolie formule de Fabrice Luchini -traduit en justice pour ce bon mot- « en plus de venir du froid, ne nous faisait pas chaud dans le dos ».

Tant que les affaires, qui avaient autant pollué le début du mandat de François Hollande que les deux dernières années de celui de Nicolas Sarkozy, ne concernaient que des histoires de vacances où de propos de fin de banquet, le Président prenait les évènements avec philosophie. Certes, la démission forcée de son secrétaire d’Etat au Tourisme, Manuel Valls, qui avait eu le mauvais goût de passer ses sports d’hiver en Suisse, avait bien mal inauguré son quinquennat. Le sourire de Jean-François Copé au journal de TF1, se félicitant du départ de ce membre du gouvernement, dont il avait eu la peau, à force de harcèlement aux séances du mercredi à l’Assemblée, et avec l’aide de Mediapart, ne l’avait pas rempli d’aise. Valls était loin d’être son copain, certes, mais son lâchage était bien ressenti par l’opinion comme une défaite d’un président fraîchement élu. Bien sûr, les histoires de conflits d’intérêt s’étaient multipliées. Le ministre de la jeunesse et des sports, ainsi, avait eu l’outrecuidance de dîner au su et au vu de tout le monde avec Serge Dassault. Cécile Duflot avait protesté vivement chez Aphatie contre cette proximité honteuse avec un marchand d’armes et s’était ainsi désolidarisée de son collègue du gouvernement, suscitant des mouvements divers dans la majorité. Mais le Président avait dû trancher et, désormais, les autorisations de dîners seraient visées à Matignon.

Le Président, mi-2015, avait tenté de reprendre la main. Alors que tout le monde donnait le Premier Ministre Ayrault sur le départ, il avait finalement décidé de le maintenir, mais d’innover en nommant, donc, Eva Joly Place Vendôme. Ainsi, pensait-il, l’opinion serait convaincue de sa volonté d’instaurer la probité à tous les étages et de bouter toute suspicion hors de son gouvernement. Bien mal lui en avait pris. La gardienne des sceaux[2. Gardienne avait remplacé garde, répondant à deux objectifs : une féminisation et démilitarisation du terme.] ne laissa de répit ni à lui, ni à personne, d’ailleurs.

Lorsque le premier « scandale sexuel » survint, François Hollande pensa qu’il ferait « Psschit », comme aurait dit son maître corrézien. Mais c’était sans compter l’alliance d’une opposition revancharde avec une ministre de la Justice, soucieuse de son indépendance et fidèle à sa réputation d’incorruptible. La cousine du Président de groupe socialiste au Sénat [3. Lequel avait remplacé Jean-Pierre Bel devenu président du Sénat en 2014.] participait à l’émission de Laurent Ruquier[4. A laquelle ne participait plus Eric Zemmour en quartier de haute sécurité- ils avaient été rétablis pour l’occasion- depuis son premier dérapage de l’ère Joly et en attente de son procès.] et confia en fin d’émission qu’il lui était arrivé, il y a bien longtemps, de jouer à touche-pipi avec son cousin dans la grange de ses grands-parents. Peu importe qu’elle avait 15 ans et qu’il en avait 12, que l’initiative venait davantage de la jeune fille en l’occurrence, l’opposition avait interpellé Eva Joly le mardi d’après. Jean-François Copé, grave, n’avait eu aucune pitié pour son collègue du Sénat. La ministre, sous les regards défaits de ses collègues du gouvernement, hagards des députés de la majorité et plutôt surpris de ceux de l’UMP, donnait raison à Copé. Devant sa télé, le Président, eut ce mot : « C’est une dingue ; j’ai nommé une dingue. » Mais impossible de la virer. Plus blanc que blanc, il fallait laver. Eva Joly, du Grand Journal de Canal à la matinale de France Inter, sous les regards énamourés de Jean-Michel Aphatie et de Pascale Clark, allait porter la bonne parole.

La parole, justement, il était devenu de plus en plus difficile d’en user. Toute blague gauloise pouvait faire l’objet d’une poursuite ; les procureurs avaient été bien briefés. Les journalistes, qui étaient pour la plupart bien en phase avec la ministre, à de très rares exceptions, commencèrent à déchanter lorsque Jean-François Copé, reçu en audience Place Vendôme[5. La ministre considérait comme moderne de s’entretenir régulièrement avec le chef de l’opposition. En toute indépendance.] suggéra que conflit d’intérêt et scandale sexuel pouvaient faire bons ménages, en particulier dans le milieu journalistique. Autrement dit,  la chasse aux parties de jambes en l’air mêlant membres de la presse et de la politique pouvait commencer. Eva Joly ne recula devant rien, pour les débusquer. Edwy Plenel, qui avait cru à cette ministre incorruptible, commença lui même à déchanter et, la mort dans l’âme, publia une enquête de ses ouailles où il apparaissait clairement que la gardienne des sceaux avait utilisé des écoutes téléphoniques illégales pour confondre la ministre des affaires européennes et un journaliste du Figaro, lesquels -circonstance aggravante- avaient pratiqué du sexe oral, interdit depuis deux ans pour raison cancérigène ayant trait au déficit de la sécurité sociale. Plenel, qui gênait maintenant la ministre, mobilisa à partir de ce jour toute l’attention de la Chancellerie et tomba très rapidement pour une affaire de drague un peu insistante auprès d’une serveuse de restaurant, sous les yeux des flics qui le suivaient. Sans pitié, Eva Joly donna des instructions pour qu’il partage la cellule d’Eric Zemmour en QHS.

En ce 2 mars 2016, alors qu’il venait de consulter les sondages qui le plaçaient en quatrième position, derrière Marine Le Pen, Jean-François Copé et Eva Joly, François Hollande réfléchissait à cette situation abracadabrantesque, comme aurait dit son maître corrézien. Il ne restait plus qu’une solution pour en sortir. Le lendemain, il parlerait aux Français.

C’est lorsque Hollande prononça cette phrase déjà entendue quelque part –«J’ai décidé de dissoudre l’Assemblée Nationale »– que la radio s’alluma, m’arrachant à ce mauvais rêve. Nous étions bien le 2 mars 2011. François Hollande n’était pas président et Eva Joly ne sévissait pas Place Vendôme. Il ne s’agissait que d’un cauchemar. Je ferais bien de consulter. Connaître de tels songes dans un pays aussi étranger à de telles pratiques, ce n’est pas normal.

Vraiment pas normal.

12 commentaires

  1. alors david est ce la nouvelle lune qui de fait faire des cauchemars?
    es-tu devenu insomniaque ? en tous cas j’ai bien rit de cette politique fiction ….enfin plausible et pas si surnaturelle que cela !
    asuivre …..

  2. Bonsoir David

    Votre cauchemar ressemble à une évocation très réaliste de l’Enfer (s’il existe).

    J’espère toutefois que vous ne faites pas de rêves prémonitoires…

    Merci beaucoup, en tout cas, pour cette fiction en espérant qu’elle le reste.

  3. Amusant ce rêve (ou plutôt ce cauchemar s’il se réalise).

    – Continuité avec ce qui se passe actuellement. Il est vrai que passer de l’UMP au PS, ça ne changera pas grand chose. Peut-être parlera-t-on (mais 3 ou 4 ans avant 2016) de « rupture » mais, comme le dit le personnage joué par Alain Delon dans « le Guêpard » de Visconti (1) : « Si nous voulons que tout reste, il faut que tout change ».

    – Évolutions néfastes qui pointent depuis des années. On est laxiste envers bon nombre de délinquants, mais on enquiquine les gens pour des bricoles. Il est vrai aussi que la désinvolture de certains politiques, que le « refus des tabous » prôné par Sarkozy entraine un « retour de boomerang ».

    – Hollande président : c’est actuellement le candidat préféré dans les médias. Ajoutons aux deux cités plus haut : Denis Jeambar.

    – Personnages à contre-emploi. L’ordre moral s’est abattu sur la France entre 2012 et 2016.
    Et cela, sous la présidence Hollande.
    Or, on imagine mal ce « radical-socialiste-cassoulet » adorer cette évolution.
    Mais, il est contraint par les événements de suivre les modes du moment.
    Et le chef de l’opposition qui soutient la ministre responsable de cette dérive. Le « radical-pompidolien » Copé serait plutôt du style « il faut arrêter d’embêter les Français » cher au deuxième président de la Ve république.
    Mais que ne ferait-on pas par ambition politique ?
    Si Hollande est un disciple de Chirac (2), Copé en est un autre. Vous savez, le Chirac ultra-libéral, reagano-thatcherien de 1981, devenu le pourfendeur de la « fracture sociale » en 1995.

    – Le monde journalistique bien dépeint. Avec ses préjugés. Avec sa « morale » en bandoulière, « morale » dont tout ce « petit monde » dégouline, mais qui se retourne contre eux car ils ne sont pas plus exemplaires que les autres.
    Ici, la ministre devient « la Gardienne des Sots ».

    – Et parmi ces journalistes, les Fouquier-Tinville comme Plenel, Pascale Clark (3), Aphatie.

    – Nous avons connu l’Incorruptible (Robespierre), il y a plus de 2 siècles. Voilà la nouvelle (Éva Joly).
    Zemmour, c’est l’Ennemi. Comme Louis XVI condamné à la guillotine, pour Zemmour, c’est la « guillotine sèche » : le QHS (ou le QBF : « Q » de basse fosse).
    Oui, mais 15 mois après l’Ennemi (Louis XVI), ce fut l’Ami (Camille Desmoulins) qui subit le même sort.
    Ici, « Desmoulins », c’est Plenel.

    (1) Film tiré d’un livre d’un nommé …. Lampedusa ! C’est très actuel.

    (2) Chirac était lui même un disciple du radical corrézien Henri Queuille.
    Tout de même, il eut aussi un autre mentor corrézien : Charles Spinasse, ministre SFIO de Léon Blum, socialiste pacifiste, ce qui le conduisit à devenir fortement munichois, puis « vichyste ».
    Quand on pense que le disciple de Spinasse est devenu l’homme de la repentance.

    (3) Pascale Clark se livra à l’automne 2009 à un véritable procès stalinien contre Benoit Hamon, invité dans son émission, coupable d’avoir critiqué les écrits de Frédéric Mitterrand.
    Bref, coupable d’imiter Marine Le Pen.
    Tiens, ne pourrait-on pas ajouter Claude Askolovitch, celui qui amalgame Chevènement, coupable de soutenir Zemmour, à Le Pen ?

  4. Bonjour,
    Tant que l’on reste dans la fiction, vous ne pouvez pas faire le même cauchemard avec Marine?

  5. Dois-je en déduire que vous ne portez pas Eva Joly dans votre coeur ?
    Son côté « incorruptible » (tendance Robespierre, pas Elliot Ness) vous fait froid dans le dos ?
    Rassurez-vous ! Vu les intentions de votes sur la dame si elle se présente en 2012, on ne risque pas trop ce scénario ! (quoique… les décisions des politiques étant parfois surréalistes -suffit de voir la nomination de certains ministres sarkoziens).

  6. Pour revenir aux relations entre Edwy Plenel et la « Gardienne des Sceaux » (et des Sots quand elle attaque les journalistes) relatées dans cet article, elles rappellent la fameuse formule : « Un pur trouve toujours un plus pur qui l’épure ».

    Je pense qu’avec cet article, David a fait preuve d’originalité.
    Certes, on pourrait aussi s’interroger si la présidente était Marine LP (ou si c’était Besancenot, ou Mélenchon, ou Borloo, ou pourquoi pas Dupont-Aignan, …). L’exercice pourrait être intéressant.

    Avec Marine LP, il y a un problème : les journalistes et les animateurs nous servent déjà chaque jour ce cauchemar éveillé.
    Donc, David doit se méfier. S’il écrit un article sur ce sujet, il risque d’être poursuivi pour plagiat par Alain Duhamel, Michel Drucker, Éric Naulleau, Jean-François Copé, Benoit Hamon, …… J’en passe et « des meilleurs ».

  7. Autre chose.
    La très communautariste Rokhaya Diallo est régulièrement invitée dans les médias.
    Elle était chez Taddéi avant-hier.
    Elle est un soir sur deux ou trois dans l’émission « On refait le Monde ».

    Or, en juin dernier, elle avait signé avec 14 autres olibrius (dont le dessinateur Siné) une tribune dans « Libération ».

    Tribune ridicule :
    – Les actes de délinquance de Villiers-le-Bel étaient assimilés aux révolutions du passé. Le « lumpen-proletariat » (que l’édition de 1948 du « Manifeste du Parti Communiste » de Marx et Engels par la maison d’édition du PCF traduisait par « la racaille ») serait une classe révolutionnaire ? Marx et Engels doivent se retourner dans leur tombe.
    – La soi-disant « répression » de Villiers-le-Bel était assimilée aux milliers de morts des répressions des journées ouvrières de juin 1848 et de la Commune de Paris (1871) (1).

    Passons : puisque le ridicule ne tue pas, tout le monde a le droit de l’être.

    Mais, surtout tribune scandaleuse puisqu’elle justifiait le fait de tirer sur des policiers.

    Or, sur le blog de « On refait le monde », les commentaires qui critiquent Mme Diallo sont censurés.

    Il y a même deux poids, deux mesures.
    J’ai critiqué Claude Cabanes et ses positions pro-immigrationnistes en rappelant les écrits de Georges Marchais en janvier 1981. J’ai aussi rappelé que le même Cabanes, après avoir été au service de Marchais, avait été le premier à l’attaquer quand il n’était plus le « patron » du PCF. Avouons que ce n’est pas « gentil » pour Cabanes. Or, cette critique est restée.
    Mais, ma critique de Mme Diallo (en « marchant sur des oeufs » pour essayer de détourner la censure) a été retirée deux fois.
    Mme Diallo est-elle intouchable ?

    Voici la tribune signée par Siné, Mme Diallo et d’autres :
    http://www.liberation.fr/societe/0101642469-pour-les-quatre-de-villiers-le-bel

    Extrayons-en ces passages :

    « A Villiers-le-Bel, les 25 et 26 novembre 2007, un renversement s’est produit : ces gamins que la police s’amuse de mois en mois à shooter ont à leur tour pris leurs aises avec ceux qui les ciblent. Ces quartiers submergés par une occupation devenue militaire ont, un temps, submergé les forces d’occupation. Les roueurs ont été roués. L’espace de deux soirées, la peur a changé de camp. Comble de l’horreur, il paraît que les émeutiers étaient «organisés».

    On ne reculera devant aucune infamie pour justifier que l’on prenne ainsi le parti de forces de l’ordre qui, après avoir renversé deux enfants du quartier et entraîné leur mort, vont se plaindre devant le tribunal d’avoir reçu quelques plombs dans l’épaisseur de leurs gilets pare-balles ».

    (1) Notons que la féroce répression des journées de juin 1848 fut conduite par un homme de gauche dans le contexte de l’époque, le très républicain général Cavaignac.

    Quant au plus féroce et au plus arbitraire massacreur de la Commune de Paris, c’était le général de Galliffet (« faites voir vos mains, elles sont calleuses, donc vous êtes un ouvrier, donc vous êtes un communard, fusillé »).
    10 ans plus tard, il était un proche conseiller du très républicain Gambetta.

    28 ans plus tard (1899), il était ministre de la guerre dans le cabinet Waldeck-Rousseau, ministère du Bloc des …. Gauches !
    L’affaire fit un tel scandale qu’elle poussa la 2e Internationale à interdire la participation de socialistes aux gouvernements « bourgeois » de gauche.

  8. Pourquoi pas un cauchemar en forme de Strauss-Kahn président ? Il ferait un excellent Papandréou français. Imaginer la France à la sauce grecque, ça pourrait être rigolo aussi, surtout pour nos amis banquiers et autres mafieux luxembourgeois…

  9. Complément à mon commentaire de 10h29.
    L’émission « on refait le monde » est sur RTL le soir vers 19h20.

  10. Qu’est-ce qu’il t’arrive ?
    Tu trouves qu’on ne nous sert pas assez de cauchemars à la tv. ? Que tu viens nous faire faire un sang d’encre !
    Dis moi qui est notre prochain président et ça c’est du véritable cauchemar !!!

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