L’autre matin, j’entendais la star des médias de la semaine dernière, Alain Juppé, qui venait de se faire piquer, par Marine Le Pen, ce statut si envié.  L’homme dont on nous raconte depuis vingt ans, avec la régularité d’un métronome, qu’il n’est pas celui qu’on croit -notamment qu’il est en fait humble et pudique-  a ainsi expliqué qu’il existait une solution simplissime pour faire baisser le Front National : expliquer son programme économique basé sur la sortie de l’euro, laquelle -on cite cet économiste si distingué, au point qu’il voulut vendre un jour Thomson pour un franc symbolique- serait atterrant et fou.

L’homme qui se tenait si droit dans ses bottes, au point de gêner dans le décor, n’imagine pas une seconde qu’une grande partie de ceux qui répondent aux sondeurs qu’ils ont l’intention de voter Marine Le Pen, savent déjà qu’elle souhaite revenir à la monnaie nationale. De même, peu lui chaut que la nouvelle présidente du Front National soit loin d’être la seule à promouvoir ce projet ; que des économistes aussi différents que Jean-Luc Gréau, Paul Krugman, Jacques Sapir ou feu notre prix Nobel d’économie Maurice Allais ne donnent -ou ne donnait- pas cher du devenir de la monnaie unique. Il tient aussi -comme les sondeurs, du reste- la candidature de Nicolas Dupont-Aignan, ce fou dangereux adversaire et déchireur d’euro, comme quantité négligeable.

Pourtant le plus probable, c’est que si davantage d’électeurs savaient que Marine Le Pen voulait sortir de l’euro, elle ne serait pas entre 17 et 24 selon les instituts mais plus proche des 30, à moins que certains d’entre eux ne soient dérangés, comme votre serviteur, par d’autres aspects du projet frontiste. N’oublions pas que des sondages évaluaient au printemps dernier à 37 % des Français ceux qui souhaitent un retour à la monnaie nationale. Cela, Nicolas Sarkozy, qui n’est certes pas dans une forme optimale en matière de choix stratégiques, arrive tout de même à le concevoir. Il faut dire qu’en matière de stratégie politique, même un Sarko aux fraises demeurera toujours infiniment supérieur à un type capable de penser qu’une dissolution de confort pouvait le reconduire tranquillou à Matignon. C’est pourquoi, vraisemblablement, ni le gouvernement ni l’UMP n’organiseront un débat sur l’euro dans les prochains jours.

11 commentaires

  1. Bonjour David,

    Décidément, j’aime bien vous lire ! La forme est toujours égale et votre maniement de la langue française (sen fôtes d’auretograffe) me convient tout à fait. J’ai parfois quelques divergences d’analyse sur le fond.

    Pour ce qui est de cet article, je me souvenais que c’étaient les « Laurel et Hardy » de l’époque — le tandem de Villepin (Sec. Gal. de l’Elysée) / Chirac — qui avaient eu cette idée « géniale » de la dissolution en 1997 pour contrer le FN qui avait (déjà) le vent en poupe. Je n’avais pas enregistré que le sieur Juppé était à Matignon…

    Je rappelle à vos lecteurs que le premier à avoir opté en faveur de la sortie de l’Euro, suivant en cela les analyses des économistes que vous citez, est Nicolas Dupont-Aignan, président de Debout La République. Ceux qui l’incluent aujourd’hui dans leurs programmes, comme le FN, ne l’ont fait qu’après.

    Peu importe le fait d’être le premier, dirons certains. Et bien non, car le risque est grand de croire que Nicolas Dupont-Aignan reprend à son compte certains thèmes de Marine Le Pen alors que c’est en réalité le contraire.

    Très cordialement.

  2. @Patrick

    La manoeuvre de dissolution a été imaginée par deux hommes, Dominique de Villepin et Maurice Gourdault-Montagne, ce dernier étant dircab de Juppé à Matignon. Ces deux-là ont vendu l’idée géniale à leurs deux patrons.

  3. toujours aussi lucide ….
    NDA president en 2012 et vite
    de toutes facons NDA candidat c’est la seule chance pour l’UMPS de faire baisser le FN et de rester dans la course au 2eme tour
    Si NON le FN y sera mais peut-etre avec Bayrou….
    N’oublions que 18 % des electeurs de 2005 lui avait fait confiance des le premier tour et que depuis aucune raison valable de ne pas recommencer pour eux avec lui !

  4. Le problème, avec les adversaires de Marine Le Pen, c’est leur argumentation déficiente.
    Ici, c’est la défense de l’euro. Chez Mélenchon, c’est l’emploi du terme « fasciste ». Chez Pierre Laurent, c’est le retour de l’expression « idées nauséabondes ».

    Quant à Alain Duhamel, il est aussi « droit dans ses bottes ». Pour lui, Marine Le Pen est « nulle de chez Nul ». C’est tellement une évidence dans son esprit qu’il ne « s’abaisse pas » à le démontrer.

    La diabolisation du FN a échoué depuis longtemps, mais les politiques de l’UMP, du PS et de leurs appendices, ainsi que bon nombre de commentateurs « n’ont rien appris, ni rien oublié », selon l’expression de Châteaubriand.

    On ne peut exclure que le sondage qui met MLP en tête soit manipulé. Dans plusieurs buts : montrer un FN haut pour ensuite mettre en relief son « effondrement » (Balladur en 1995, Chevènement en 2002 et Bayrou en 2007 ont été victimes de ces méthodes) ou mettre en valeur le « sauveur suprême » (cf 2e couplet de « l »Internationale ») DSK comme le pense Jérôme Leroy.

    Il n’empêche : MLP est bien placée.
    Aux diabolisations relevées plus haut, je préfère l’analyse sérieuse et la discussion démocratique.

    Analyse sérieuse : on la trouve dans le blog du député PCF André Gerin. Pour lui, c’est le résultat des échecs de la droite et de la gauche incapables de résoudre le moindre problème.
    On la trouve aussi dans un article de Sapir (site « Marianne2 ») où il montre que c’est aussi le résultat de l’échec de l’Europe. Juppé devrait en « prendre de la graine. »

    Pour revenir à Sapir, il a récemment critiqué le plan de sortie de l’euro du FN.
    Pas du tout en diabolisant, bien au contraire.
    Il a analysé les 12 points de ce plan l’un après l’autre.
    Sur certains, il était d’accord. Sur d’autres, il parlait « d’amateurisme ». Sur d’autres, il mettait en relief les contradictions entre l’ancien programme économique du FN fortement teinté de libéralisme et le nouveau.

    Voilà qui s’appelle débattre sérieusement et démocratiquement au lieu de diaboliser.

  5. C’est la saison des fanfarons entre un Mélenchon qui a mis KO Marine LePen (on voit la véracité de tels propos prétentieux et fanfarons lorsque la leader du FN s’envole dans les sondages et que celui qui aurait vaincu « la bête » par KO, plafonne à 5 % !) et Juppé qui veut être l’homme qui terrasse les adversaires de l’Euro. C’est plus des politiques mais des bâteurs de foire ! Quelle époque merveileuse, vivons-nous ?

  6. Voilà quelque chose d’intéressant. Oui à un débat sur la sortie de l’euro. L’argumentaire de Jacques Sapir est toujours pertinent, comme le furent ses analyses sur la défunte Union Soviétiques et son écroulement. Nous souhaitons tous que NDA fasse un carton en 2012, plutôt que cette oie de Marine. Chers amis, bougeons-nous les fesses pour qu’il obtienne ses 500 signatures ! C’est ça le plus urgent ! J’ai une promesse. Si on s’y met tous dès maintenant, ça peut le faire, de toutes façons, ça doit le faire !

  7. Je ne suis pas étonné : ce vieux #!*… a déjà déclaré qu’il est pour un « fédéralisme économique » européen. Mais attention, économique seulement, le fédéralisme ! Vieux #!*…, va !

  8. Mercredi, sur RMC, Claude Bartolone était sans intérêt quand il parlait de la politique nationale et des affaires internes au PS.
    En revanche, il est devenu plus intéressant quand il a parlé des relations entre les collectivités territoriales et les banques (il est président diu Conseil Général du 93).

    Ainsi, il a dit que son prédécesseur avait fait des placements « toxiques » (emprunts à taux variable sans doute).
    Première remarque : jusqu’ici, les socialistes qui ont gagné des municipalités de droite avant 2008 accusent souvent leurs prédécesseurs d’avoir fait ce genre d’opérations.
    Ici, le prédécesseur était communiste.
    Peu importe.

    Je suis certain que des élus de toutes tendances (PCF, PS, écologistes, centristes, UMP, …) ont « foncé » dans ce type d’opérations. Ils ont sans doute été convaincus par des banquiers, voire par des « experts » parmi les cadres supérieurs de leur collectivité.

    Il faut se méfier des « experts ».
    Ce sont souvent les premiers responsables des catastrophes (politiques, financières, judiciaires, …).

    Bartolone a dit qu’avec de nombreuses collectivités (y compris de petites communes) de toutes tendances, il entamait une action pour que ces banques, qui ont été renflouées par la puissance publique, renégocient ces emprunts.

    Il a raison.

    Tout de même, je me pose une question.
    Pourquoi les collectivités territoriales ont-elles le droit d’emprunter n’importe comment ?
    Sauf erreur de ma part, autrefois elles ne le pouvaient qu’à la Caisse des Dépôts et Consignations, émanation des Caisses d’Épargne.
    Le système aurait donc été déréglementé ? Quand ?

    – Est-ce après la décision prise en 1973 ? L’État, avant cette date, n’avait le droit d’emprunter qu’à la Banque de France. Puis, à la suite de la crise monétaire (fin du système de Bretton-Woods créé en 1944), Pompidou (président) et Giscard (ministre des finances) décidèrent qu’il emprunterait sur les marchés financiers.
    Ce qui explique en partie la forte dette de la France.

    – Est-ce une conséquence des multiples lois de décentralisation ?

    – Est-ce une conséquence de la déréglementation dûe aux traités européens ? Ainsi, toutes les banques ont le droit de proposer des livrets A. Donc, les Caisses d’Épargne deviennent des banques comme les autres et les collectivités empruntent où et comment elles veulent.

    Si ce dernier point est le bon :
    – Une fois de plus, le « Grand Charles » (De Gaulle) avait raison de fustiger les « cabris »de « l’Europe, l’Europe, l’Europe ».
    – Bartolone devrait s’en prendre fortement au PS. Car, ce sont bien Mitterrand et Delors qui, à une époque où la majorité des gouvernements de l’UE étaient socialistes, ont entamé cette dérive avec l’Acte Unique, Maastricht et autres. (Dérive funeste que Chirac et Sarkozy ont prolongée).

  9. « à moins que certains d’entre eux ne soient dérangés, comme votre serviteur, par d’autres aspects du projet frontiste. »

    Le Front national dit la vérité sur l’immigration depuis trente ans. Combien d’émeutes ethniques, combien de violences, de mosquées, de prières de rues, combien de Lampedusa et de Barbès faudra-t-il pour que vous le reconnaissiez ? Vous souhaitez vraiment que la France continue à devenir l’Afrique du Sud ou le Brésil ?

    Ce que je crains le plus, pour ma part, est que le FN, qui est traditionnellement national-libéral, ne devienne national-socialiste. Nicolas Sarkozy est international-libéral, et le PS international-socialiste (ce qui est incohérent puisque l’internationalisme de l’économie empêche de mener une politique socialiste).

  10. la sortie de la logique monétaire qui prélude à la création de l’€ est préconisée depuis des lustres par solidarité et progrès

    il nous faut surtout sortir de la nasse des carnassiers de la finance.
    or tant aux etats unis (Wilconsin), en angleterre (hier), les peuples s’elevent contre la main mise de la finance sur l’economie
    il s’agit bien d’interdire toute speculation sur les monnaies, les matieres premieres que de sortir de l’€.

    http://www.solidariteetprogres.org/article7524.html

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