Amusant accrochage, l’autre samedi à On n’est pas couché, entre Audrey Pulvar et un humoriste répondant au nom de “comte de Bouderbala”, alias Sami Ameziane.

Dame Pulvar a cru débusquer, dans le spectacle de l’intéressé, un sketch « stigmatisant les Roms » qu’elle ne saurait laisser passer. Entendez-la bien : Audrey n’a rien contre l’humour a priori ; mais en l’espèce, le « manque de bienveillance »manifesté par ce comte-là envers les Roms passe les bornes qui séparent le rire de bon aloi de la gaudriole « nauséabonde »

Face à ce réquisitoire, l’ami Sami reste scotché. De fait, la situation est piquante : lui, le comique « issu de la diversité », fils d’Algériens élevé en Seine-Saint-Denis, se voit taxer de discrimination raciale, et par qui ? Une journaliste en vue, issue de la meilleure bourgeoisie martiniquaise, qui a moins souffert du racisme dans toute sa vie que, depuis deux ans, de sa fréquentation d’un homme politique également en vue.

Déstabilisé, le pauvre comte se défend comme il peut : « Quand même on peut en dire plus sur scène, devant un public averti, qu’à la télé » plaide-t-il. Argutie rejetée par son impitoyable procureur(e) : c’est une question de principe ! « Mais dans mes spectacles, tente encore l’accusé, tout le monde en prend pour son grade, Arabes et Noirs, Gaulois et Chinois ; pourquoi vous ne retenez que les Roms ? » Eh bien, ça a heurté la conscience de Mme Pulvar, voilà tout.

Est-elle vraiment sincère sur ce coup, ou fait-elle juste un peu de zèle dans son rôle de “conscience” du Ruquier show ? ou les deux ? Elle-même, le sait-elle ? Allez savoir.

C’est un peu ça le problème avec la “gauche morale”, qu’Audrey Pulvar incarne plutôt pas mal. On n’est jamais sûr si ces gens-là plaisantent, ou s’ils “s’indignent” vraiment pour tout et n’importe quoi.

Ce soir-là en tout cas, sur le plateau d’On est pas couché, personne ne semble prendre la philippique antiraciste d’Audrey au sérieux. Ni sa collègue Natacha, ni son chef Laurent, ni aucun des autres invités présents – pourtant variés à souhait.

De fait, il suffit de voir la tête de ce Bouderbala-là, qui pose sur ses affiches avec un chapeau de bouffon à grelots, pour deviner aussi son profil : un serial blagueur qui, loin de choisir ses cibles, tire dans le tas !

Seule contre tous, Audrey Pulvar persiste à parler sérieusement de ce qui manifestement ne l’est pas : « Il n’est pas interdit de rire, insiste-t-elle sans rire, pourvu que le rire soit citoyen ».

Autant dire qu’il vaudrait mieux l’encadrer, ce rire ! Et pourquoi pas un ministère “de la Rigolade”, comme dans la chanson de Gérard Lenorman – dont on confierait bien sûr la responsabilité à Mme Pulvar ?

 

Publié pour Valeurs Actuelles, le 12 avril 2012

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