A priori, je ne raffole pas des artistes qui se mêlent de politique et de religion : « Ne sutor ultra crepidam», comme dirait mon voisin Philippe Barthelet. Qui songerait sérieusement à questionner Valls ou Copé sur leurs goûts en matière de sculpture grecque ou de rap ?

Eh bien, il est plus absurde encore de demander à des Arditi, Huster et autres Balasko ce qu’ils pensent de l’injustice, du racisme et de la méchanceté en général : ils sont contre, figurez-vous !

Mettons à part quelques personnages comme Richard Bohringer ou Philippe Caubère, que je crois assez fêlés pour être sincères. Mais l’exception qui confirme vraiment la règle, on pouvait la voir l’autre samedi dans l’émission On n’est pas couché (sur France 2, 27 novembre, 23 heures) : elle s’appelle Lorànt Deutsch.

Un vrai phénomène, vous dis-je ! À 35 ans, cet acteur hors norme a déjà incarné entre autres, sur scène et sur les écrans, Sartre et La Fontaine, Mozart et Jérôme Kerviel… Entre-temps, après cinq ans de recherches, il publiait l’an dernier son premier livre : Métronome. Sous-titré l’Histoire de France au rythme du métro parisien, ce bouquin atypique a déjà été écoulé à plus de 500 000 exemplaires et reste en tête des ventes d’essai.

L’autre samedi, Lorànt était en promo pour la version illustrée de son livre. Joie ! Il ne s’est pas senti obligé pour autant de s’adapter au prêt-à-penser qui est de mise chez ses pairs.

Interrogé sur l’actualité de Benoît XVI, il se déclare « fier d’être catholique ». Aussitôt, Éric Zemmour, sceptique par nature et par fonction, l’interrompt : « Vous êtes comme tous les artistes : d’autant plus catholique que l’Église ne l’est pas spécialement… »

Mais Zemmour sera aussi le premier à se réjouir d’être démenti : au-delà des Roms et du latex, c’est « son pape » et « sa foi » que Lorànt Deutsch défend mordicus. Pour l’avenir, il appelle même de ses voeux un « concordat » entre l’Église catholique et l’État français – ce qui, à l’évidence, n’a plus le même sens que sous Napoléon Ier…

Bref, le genre de propos qu’on ne vous sert pas tous les soirs sur un plateau télé ! Encore la cerise, sur ce gâteau, n’arrivera-t-elle que plus tard. Sous prétexte de politique, le jeune gandin n’hésite pas à se proclamer « royaliste » : les rois n’ont-ils pas tracé la voie d’une «magnifique histoire de France à poursuivre » ? Bien sûr, si un autre artiste risquait sa carrière en s’affichant républicain et agnostique, je serais le premier à signer la pétition. Mais qu’on se rassure : ce n’est pas pour après-demain…

En attendant, j’ai décidé d’acquérir le Métronome de Lorànt Deutsch et de télécharger l’ensemble de ses films par tous les moyens, même légaux. Ça me fera au moins un truc à confesser avant Noël.

Publié dans Valeurs Actuelles, 9.12.2010

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