Dans l’industrie agro-alimentaire, les petites entourloupes font les gros bénéfices : quelques grammes de perdus peuvent faire gagner des millions !

Combien pèse un kilo de gigot d’agneau ? Si à cette question vous répondez “un kilo”, c’est que vous n’avez pas regardé l’excellent documentaire diffusé l’autre dimanche par France 5 et intitulé le Vrai Poids de nos aliments.

Le reportage commence par disséquer les “promos” des grandes surfaces. Si, comme moi, vous pensiez qu’acheter le café par lots de quatre paquets estampillés “offre spéciale”, c’est forcément faire une bonne affaire, vous allez déchanter. Preuve à l’appui, le journaliste de France 5 nous montre que ledit café est moins cher si on l’achète à l’unité. En clair, l’offre spéciale, c’est que vous payez plus cher. À quand un autocollant “offre spécieuse” ?

Mais il y a pire. En pesant les aliments vendus en barquette ou sous vide, on s’aperçoit qu’ils ne font pas toujours le poids indiqué sur l’étiquette : le saumon de 180 g en pèse 165 et le gigot d’un kilo, 970 g ; quant aux 350 g de saucisses, on vous les fait à 340 ! Certes, 10 g c’est peu. Mais multipliés par les 70 millions de paquets de saucisses vendus chaque année par cet industriel bien connu, ça représente finalement un gain annuel de 3,5 millions d’euros. Mince alors !

Plus légale, mais guère plus morale, ce que les professionnels appellent l’“inflation masquée”. Vous vous félicitez que les gâteaux secs du goûter de vos enfants n’aient pas augmenté d’un centime en cinq ans ? Lisez attentivement l’étiquette. Vous constaterez que le paquet ne contient plus 330 g de gâteaux comme avant, mais 300 g, soit 10 % de moins pour le même prix ! C’est ça, l’inflation masquée : augmenter de 10 % le prix d’un produit en période de crise, c’est risquer de perdre des clients. En revanche, diminuer la quantité vendue sans changer le prix, ça revient au même mais ça ne se voit pas ! Et cette combine s’est généralisée pour les denrées de base (beurre, riz, sel, etc.) depuis que l’Union européenne a décidé de déréglementer les formats de ces produits, sous la pression des lobbyistes de l’industrie agroalimentaire.

Les professionnels du secteur se montrent décidément très inventifs lorsqu’il s’agit d’augmenter leurs marges : ils arrivent même à nous faire acheter de l’air ou de l’eau au prix de la nourriture ! Ainsi les coquilles Saint-Jacques surgelées sont-elles parfois lestées de 30 % d’eau et la crème glacée peut contenir jusqu’à 50 % d’air, ajoutés par des fabricants qui n’en manquent pas.

Les industriels mélangent même de l’eau du robinet à leurs blancs de poulet, saucisses et tranches de jambon. Comment ? En les piquant avec des seringues, tout simplement, tels de vulgaires junkies. Et en ajoutant aux aliments divers produits chimiques comme les polyphosphates ou les alginates, censés maintenir l’eau à l’intérieur. Bon appétit !

Dégoûté, on se dit qu’on va désormais faire ses courses au marché, comme nos grands-parents. Las ! Même la balance du maraîcher est parfois truquée, apprend-on in fine. Reste une seule solution : cultiver son jardin.

Publié dans Valeurs Actuelles, le 24 mai 2013

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