Le 22 octobre dernier le Monde, sous la plume de Benoît Floc’h, sortait enfin un article de fond sur les problèmes que pose la multiplication des voiles à l’université. Pour un journal qui est l’organe officiel du gouvernement et la lecture favorite des bobos frileux réfugiés en deçà du périphérique, aussi loin que possible de la France réelle, c’était un bel effort. Et loin de moi l’idée de jeter la pierre à son auteur, qui est un gentil garçon et a bien voulu ne pas déformer ce que je lui ai dit sur le sujet — grâces lui en soient rendues.
Mais la parution récente d’un autre article ce qui se passe dans les universités britanniques m’a donné un avant-goût de ce qui nous attend, sauf réaction légale et rapide (mais peu probable, grâce à Jean-Louis Bianco qui ne décèle aucun problème) ou réaction spontanée et violente (qui malheureusement se dessine, et pourrait même se draper dans la légalité, selon le parti que les atermoiements du PS et autres idiots utiles amèneront prochainement au pouvoir).
Qu’apprend-on sous la plume de Pragna Patel, l’un des leaders de Southall Black Sisters, la principale organisation luttant aujourd’hui en Grande-Bretagne contre les fondamentalismes religieux ? Eh bien par exemple que les Universités britanniques sont désormais libres d’instaurer une ségrégation dans l’espace entre hommes et femmes, dans les amphis par exemple, afin de ne pas choquer les habitudes de conférenciers extérieurs. Ou que les avocats et les notaires sont incités à la « chariafication » de la loi en tenant compte des superstitions des uns et des autres dans l’établissement, entre autres, des testaments : sûr que les droits des femmes seront mieux respectés ainsi ! C’est sans doute ce que les descendants d’Adam Smith appellent le libéralisme.
Pragna Patel souligne avec force l’opposition de son organisation au multi-culturalisme qui s’appuie sur l’anti-racisme béat de la Gauche — en particulier, je ne saurais trop vous recommander Laurie Penny, une journaliste du Guardian, qui est à l’Angleterre ce que le Monde (hors Benoît Floc’h) est à la France : le gardien de la bien-pensance de gauche. Tout ce qui combat pour les droits des femmes est frappé par elle du sceau (ignominieux, paraît-il) d’« islamophobie ».

Quitte à me répéter…
Il n’y avait aucun voile dans le Marseille de mon enfance — dans ces années 1960 pourtant riches ici en immigrées nord-africaines. J’habitais à deux pas de Frais-Vallon et du Petit-Séminaire, deux hauts lieux du HLM d’urgence construit pour abriter les travailleurs`maghrébins appelés par le Bâtiment des Trente Glorieuses. Et longtemps il n’y en a pas eu — ni ici, ni ailleurs : je me suis baladé à Alger en 1970, quand Boumediene était au pouvoir et les bateaux russes dans le port (désormais remplacés par des bateaux chinois, mais c’est une autre histoire) sans voir de voiles — de manifestations extérieures de fanatisme et d’intolérance.
C’est l’affaire de Creil (1989 — ô Révolution, ça, c’est de la coïncidence ! Qu’est-ce que Robespierre aurait fait de ces suppôts de la foi ?) qui a amené la question du voile au premier plan de l’actualité. Coïncidences, disais-je : l’année suivante les islamistes du FIS entraient dans le champ politique algérien. S’ensuivront dix années d’un conflit particulièrement sanglant, où certains de mes élèves, à Corbeil, me lançaient avec des airs de bravaches « Moi, j’suis au GIA, m’sieur ! », qui s’est résolu par un partage des ressources du pays entre les militaires et les islamistes « présentables » (oxymore !), partage qui n’a pas peu contribué à faire de l’Algérie le pays le plus malade du Maghreb. En témoigne la noria de bateaux amenant à Marseille des Algériens venant s’approvisionner en denrées essentielles.
Mais c’est ici désormais que le combat s’est déplacé. Et les filles que l’on peut soumettre aux fantasmes vestimentaires des salafistes jouent un rôle éminent. Un voile, on s’en fiche. Deux, trois, ça passe. Mais la mode fait tache d’encre, les tchadors volant au gré du mistral sont autant de reproches pour celles qui résistent encore, et l’attitude parfois agressive des garçons, qui s’en prennent volontiers à tout ce qui n’est pas « protégé » par cet habit de nuit, contribue à propager les ténèbres.
Je vais encore me faire traiter d’islamophobe. Mais en vérité je vous le dis, amis musulmans qui parfois êtes aussi mes élèves, si l’on ne réagit pas très vite, d’autres se chargeront de réagir. Et dans une ville où une kalachnikov coûte moins de 300 euros, qui sait jusqu’où cela peut aller ?
Et c’est bien là qu’ils veulent nous amener — à la guerre civile.

Jean-Paul Brighelli

39 commentaires

    • Si le rôle des femmes dans la guerre d’Algérie vous intéresse, vous pouvez vous référer aux travaux de Danielle Minne, professeur d’histoire et d’études féminines pas trop loin de chez vous.

  1. Les femmes, pas toutes, étaient très souvent voilées en Algérie avant 62; voile blanc qui ne laissait passer que le regard.
    Témoins réels + Daudet + Fromentin ( un voyage dans le sahel) et j’en oublie.
    😉

  2. Dans l’article de Floc’h ce qui inquiète le plus est le  » ça arrive lentement ». On se rappelle bien comment sont arrivées lentement des choses qui faisaient ricaner ou laissaient indifférente toute la société bien pensante, et comment cela s’est fini.
    Imagine there’s no heaven
    Above us only sky…

  3. « Et dans une ville où une kalachnikov coûte moins de 300 euros, qui sait jusqu’où cela peut aller ?
    Et c’est bien là qu’ils veulent nous amener — à la guerre civile. »

    La Kalach à 300 ( c’est cher) c’est pas pour le pékin moyen! Le lambda vieillissant, hors amis insulaires bien placés ou relations mafieuses, il l’a dans l’os, bien cadré par les lois de de la raie publique.
    Donc si guerre civile un jour il y a, ça ira très vite, faute d’adversaire. Déjà le cas, au vu du ratio jeunes/vieux, du ratio intello sclérosé vs jeune con athlétique, du ratio travailleur fatigué/ glandeur sportif, etc.
    Pessimiste? Réaliste!
    A voile mais pas à vapeur…?

  4. Bonjour, j’avais apprécié « la fabrique du crétin » et aujourd’hui cet article. j’ai publié sur le site : france-pétitions.com: »génocide »(blanc) le 17/09/2011, « Zemmour Président » le 3/10/2011 et « contre le GayPower » le 23/03/2012 qui ne connurent qu’un très relatif succès. D’où la lettre ci-jointe que j’essaye de faire parvenir à l’auteur du Suicide français. Si vous pouvez la faire suivre….
    Auriez vous le temps de venir goûter quelques oronges (amanite de César)? Marseille n’est pas bien loin. Cordialement Raymond Giraud.
    Pérréal
    84490 Saint Saturnin lès Apt
    gir.ray@orange.fr
    Tel : 06 09 43 24 59

    Monsieur,

    Sur le site France pétition (www.france-petitions.com), j’ai lancé le 03 octobre 2011 « Zemmour Président », tout en sachant que vous n’aviez pas le gôut de vous lancer dans la mélée.
    Le 29 mars 2012 : je proposais : « Contre le gay power » qui connu a peu près le même succès.
    Otez moi d’un doute , serions nous les seuls à comprendre les causes de notre déchéance ?
    Bref, je serais ravi de vous rencontrer ainsi que quelques personnes qui pensent que tout n’est pas perdu .

    Bien cordialement,

  5. « C’est l’affaire de Creil (1989 — ô Révolution, ça, c’est de la coïncidence ! Qu’est-ce que Robespierre aurait fait de ces suppôts de la foi ?) qui a amené la question du voile au premier plan de l’actualité.  »

    Cependant il y avait déjà eu en 1979 une révolution islamique en Iran, et pour l’autre faction l’assassinat de Sadate en 1981.

    Sartre s’était d’ailleurs rendu en pèlerinage à Neauphle-le-Château.

  6. Rentrée scolaire d’Arnaud :

    Les Quatre Cent Coups médiatiques du Petit Montebourg ? On le voit arriver de loin avec ses gros sabots notre écolier … Petit Lu va !

    P.S : Brighelli pourriez-vous le rencarder pour sa bourse au mérite ?

  7. tiens, en passant….
    « La crise de l’enseignement n’est pas une crise de l’enseignement ; il n’y a pas de crise de l’enseignement ; il n’y a jamais eu de crise de l’enseignement ; les crises de l’enseignement ne sont pas des crises de l’enseignement ; elles sont des crises de vie ; elles dénoncent, elles représentent des crises de vie et sont des crises de vie elles-mêmes ; elles sont des crises de vie partielles, éminentes, qui annoncent et accusent des crises de la vie générales ; ou si l’on veut les crises de vie générales, les crises de vie sociales s’aggravent, se ramassent, culminent en crises de l’enseignement, qui semblent particulières ou partielles, mais qui en réalité sont totales, parce qu’elles représentent le tout de la vie sociale ; c’est en effet à l’enseignement que les épreuves éternelles attendent, pour ainsi dire, les changeantes humanités ; le reste d’une société peut passer, truqué, maquillé ; l’enseignement ne passe point ; quand une société ne peut pas enseigner, ce n’est point qu’elle manque accidentellement d’un appareil ou d’une industrie ; quand une société ne peut pas enseigner, c’est que cette société ne peut pas s’enseigner ; c’est qu’elle a honte, c’est qu’elle a peur de s’enseigner elle-même ; pour toute humanité, enseigner, au fond, c’est s’enseigner ; une société qui n’enseigne pas est une société qui ne s’aime pas ; qui ne s’estime pas ; et tel est précisément le cas de la société moderne. » PÉGUY, 1904

  8. Bienvenue dans ce monde que les gauchistes nous ont concocté, et ce depuis une quarantaine d’années. Ce n’est pas ce qu’ils voulaient dans leur grande naïveté au départ, bien sûr, ce qu’ils voulaient, et ce qu’ils veulent toujours, c’étaient ‘l’homme nouveau’, sorte d’individu hors-sol, interchangeable, mais la preuve en est que cela ne fonctionne pas. On pourra attendre longtemps leur mea culpa.

  9. A propos de Creil, un certain Lionel J. Ministre de l’Education Nationale s’est empressé de ne pas soutenir le principal qui voulait interdire le voile dans son établissement.

    Déjà la hiérarchie montrait aux acteurs de terrain qu’ils étaient seuls.

    Cette lâcheté plus la fameuse Loi Jospin mettant (je cite de mémoire) « l’élève au centre du système » et créant les Iufm.

    Lionel Jospin a vraiment été un ministre catastrophique.

    Je serai curieux de connaître votre avis, M. Brighelli

  10. Merci Montaigne!
    Il faut donc, au vu de votre citation, que je lise Péguy ( dont je viens de parcourir la biographie): des idées fortes, comme celle-ci:
    « une société qui n’enseigne pas est une société qui ne s’aime pas ; qui ne s’estime pas ; et tel est précisément le cas de la société moderne.  »
    C’est un point de vue qui m’étonne et m’intéresse.

  11. C’est un pisa, allez.
    Prévoyez des alternatives énergétiques, même si ce n’est pas drône…

  12. Pour Guillaume-rc…

    La loi Jospin fut l’initiale légale et administrative de l’apocalypse molle qui engloutit présentement l’Ecole. Mais le mal vinent de plus loin, comme dit Racine… Pas forcément de 1968, où il y a eu du sublime et de l’aberrant. Les pédagogies folles ont émergé à la fin des années 50, principalement aux USA. Quant aux pédagogues fous, ils militaient dans les groupes chrétiens progressistes — la JOC, par exemple. Etonnez-vous que je ne me fie guère aux hommes de foi…

    • Alain, dans ses Propos sur l’éducation écrits en 1933, fustige les « pédagogies folles » qui étaient nées 10 ans plus tôt dans l’esprit dérangé d’une poignée éducateurs « progressistes » qui sévissaient au Teachers College de Columbia. Les Bolchéviques y ont aussi goûté un temps sous le règne de Krupskaïa, mais Staline y mit bon ordre vers 1931 ou 32.

      Les théories éducatives dont tous ces frappadingues se sont entichés sont le fruit d’un rousseauisme revu et corrigé, pour les premiers par les Transcendantalistes et par Tolstoi, pour la seconde.

      Piaget et Bourdieu vinrent bien plus tard, mais toujours dans la même veine. Divers livres traitent du sujet et leurs titres sont éloquents : « Getting It Wrong From the Beginning » de Kieran Egan (2002) et « La destruction de l’enseignement élémentaire et ses penseurs, » de Liliane Lurçat, François-Xavier de Guibert,‎ 1998

      Dans les années 50, l’Amérique était déjà fortement contaminée et notamment par le virus de la méthode globale (Look and Say).
      Elle l’a abandonnée il y a une dizaine d’années, pas la France

  13. Je tiens à rappeler que le cheval de Troie est à l’origine de notre français « truie » (anciennement coche, terme encore usité à la campagne dans mon enfance ). Méfiez-vous, vous blasphémez !

  14. Et ce, en raison d’une recette de cochon farci « à la manière de ce cheval », de toutes sortes d’autres petits animaux rôtis.

  15. Cela lui arrive de ne pas sourire à la Vallaud ?J’en ai marre de ces photos à la con et de ces discours où elle et sa collègue à la culture passent leur temps à répéter sur tous les tons leur très grande satisfaction. L’une de dire qu’elle pense être un très bon ministre, l’autre qu’elle a déjà fait un très bon travail, notre flèche de président qui assure il y a deux semaines avoir passé une très bonne semaine.
    Avec son sempiternel sourire fixe, on dirait qu’elle fait une pub pour un dentifrice au fluor ou qu’elle sort d’une réunion marketing. Elle ferait mieux d’aller vendre des parfums ou des articles de luxe chez Givenchy.

    • Si les profs étaient, ne serait-ce que très légèrement moins khons, ils réaliseraient la très longue khontinuité des marketeurs à la tête du Moloch.

      D’ailleurs, depuis Chatel, on ne dit plus « réaliser » mais « loréaliser ».

    • Nous partageons, en 3 dimensions et même davantage, la même vision de Sainte Najat. Ses sourires, je les ai crus d’abord polysémiques. Puis anti- sceptiques. Mais leur constance, leur immédiateté pavlovienne, et surtout l’immense tache de blanc qu’ils sont en train d’accomplir à l’Education, m’ont édifié: les mails des dents, c’est comme le reste, ça s’écaille vite, et je crois qu’il nous faut nous résigner: ce n’est pas une ministresse que nous avons, mais une seconde Mona Lisa au sourire d’un certain genre…

      • « Les mails des dents ça s’écaille vite »

        Mââme Najat parle entre ses dents. Son impassibilité s’explique par la relative inexpérience de la patronne de la dgesco : on ne s’improvise pas marionnettiste.

        C’est un métier qui s’apprend.

  16. Merci de me prendre pour une conne, Dugong. Non, je maintiens, jusqu’à présent, je trouve qu’ils ne cultivaient pas à ce point leur image dans un sens marketing. Avec notre ministre actuelle, il me semble qu’on touche le fond.Libre à vous de penser le contraire et je ne vous traiterai pas de con pour autant.

    • Mais je ne vous visais pas ! J’abondais même à fond dans votre sens.

      Malheureusement, je crois qu’avec Mââme Najat, on ne touche pas le fond. On peut faire pire et si pire est possible, il se fera. C’est l’avantage des sociétés technicisées : l’achèvement d’un pire est mené si rapidement et avec des outils tellement efficaces que les experts pensent déjà à la loréalisation du prochain.

  17. Hier soir la sortie du cirque des Champs-Elysées :

    C’était : « Sortie des artistes » ! Mais on ne voyait qu’un clown au nez rouge qui traînait dans un coin sa neurasthénie.

  18. « Mais la parution récente d’un autre article ce qui se passe dans les universités britanniques  » => « article SUR ce qui se passe »

    Commentaire à détruire après usage.

  19. « Un djihadiste français visé par un raid américain en Syrie »

    De retour en France il aurait dû être jugé par un tribunal militaire et passé par les armes ! Mais cela aurait fait de la paperasse et les organisations de défense de la veuve et de l’orphelin sans papier auraient crié à l’injustice !

    Les Scandinaves pensent qu’on doit les faire passer par un centre de réadaptation fonctionnelle ! Ma vision des choses est beaucoup plus expéditive et radicale avec les Français qui endossent l’uniforme ennemi.

  20. Désolée, Dugong, mais j’ai un peu le syndrome de Jean-Jacques en ce moment. Il faut dire que ça tombe d’un peu partout mais bon, je vais refaire surface.

  21. Le cheval de Troie,le voila:

    http://www.lefigaro.fr/actualite-france/2014/11/07/01016-20141107ARTFIG00188-le-numerique-serpent-de-mer-de-l-education-nationale.php

    c’est la nouvelle monture. Qui a-t-il dedans? Du flouze et du maquillage. La télé-réalité rattrape l’EN!
    Nouveaux enseignants mes amis: vous serez désormais de gentils organisateurs de sorties, doublés de la casquette d’animateur-cliqueur sur tablette; vous mènerez, de temps à autre, vos aimables petits compagnons assister ( sans contrainte) à un cours.
    E pur se muove!!!!

  22. La Musica adoucit les moeurs disait le placide suisse Patrick Juvet ; l’aimable guêpe Nabila a quand même planté un couteau dans le thorax de son amant ! Les mantes religieuses parait-il dévorent ainsi après leurs ébats leurs fougueux amoureux.

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