De Richard Millet, je ne sais pas grand-chose. Nous fîmes une émission ensemble chez Ardisson en 2005, je venais de sortir la Fabrique du crétin, et lui le Goût des femmes laides — un joli roman fort bien écrit sur un sujet somme toute assez peu labouré, sinon par Brassens dans une chanson moins connue que d’autres.
Puis il a disparu de mon radar jusqu’en 2012. Cette année-là, il publiait Langue fantôme, un pamphlet sur l’état assez peu littéraire de la langue littéraire actuellement en usage en France, suivi d’un (très court) Eloge d’Anders Breivik, éloge paradoxal qui lui servait de prétexte à fustiger cette Europe ouverte à toutes les migrations. Et non, comme ont voulu le croire tous ceux qui ne l’avaient pas lu, à célébrer le tueur norvégien.
Emoi dans Boboland ! Annie Ernaux se fendit aussitôt dans le Monde d’une tribune-pétition, co-signée par une foule d’écrivains connus (Le Clézio, dont Millet cultive une sainte horreur depuis vilaine lurette) et inconnus (tous les autres) réclamant la tête de l’imprécateur de ce vivre-ensemble que la rue de Grenelle, à la même époque, érigeait opportunément en totem de l’Education. Millet, qui vivait essentiellement d’un poste de lecteur chez Gallimard (à qui il a tout de même permis d’obtenir le Goncourt au moins en deux occasions, pour les Bienveillantes et pour l’Art français de la guerre) se trouva fragilisé, marginalisé, et confiné dans une léproserie. En attendant le prochain faux-pas qui permettrait de lui coller douze balles dans la peau et la tête dans la lunette de la Veuve.
Du coup, je m’étais intéressé aux écrits polémiques de ce garçon un peu trop chrétien pour moi, qui se la joue « hanté pénultième » selon le joli mot d’un critique, mais qui dit des choses justes sur l’état actuel de la littérature française (pas très loin de ce qu’avaient asséné en leur temps Pierre Jourde dans la Littérature sans estomac et Jourde & Naulleau dans leur Précis de littérature du XXIème siècle) et l’apocalypse molle dans laquelle on engloutit la langue, littéraire ou non — dans une déconstruction dont j’ai moi-même analysé la chronologie, les intentions et les effets dans Voltaire ou le jihad.
Sur ce, Millet, briguant manifestement la palme du martyre, a accumulé aux éditions Pierre-Guillaume de Roux ou Fata Morgana les petits essais assassins. Evidemment, la Bien-pensance Unique ne l’avait pas lâché, et il ne l’a pas lâchée. Ainsi, quand notre homme, dans un article publié dans la Revue littéraire et intitulé « Pourquoi la littérature française est nulle », a récemment tiré à vue le dernier livre de Maylis de Kerangal (qui ça ?), ex-signataire de la pétition Ernaud — une dame très bien du tout-Paris qui compte —, le petit peuple des écrivains en cour a supplié Antoine Gallimard de se débarrasser enfin du trublion… Tous (BHL en tête, qui ne s’en serait douté ?) ou presque tous — Sollers par exemple a intelligemment continué à dialoguer avec Millet, expliquant que « Richard Millet a eu un tort, celui de mêler à ses considérations sur la littérature des idées politiques, et des idées politiquement incorrectes. Elles ont permis à l’opinion, surtout l’opinion militante, se voulant extrêmement engagée, de l’accuser, avec des mots injurieux, d’être révisionniste et d’avoir écrit une immondice ; allant jusqu’à s’en prendre aux éditions Gallimard en s’exclamant : « Comment avez-vous pu publier une chose pareille ?! » Cette immédiateté de la réaction inquisitoriale, et je dirais même stalinienne, m’amène à dire que désormais, n’importe quelle interprétation peut avoir lieu sur des motifs « politiques » – je mets des guillemets – où on accuse d’emblée l’autre de racisme, d’ antisémitisme, etc., et je trouve que ça commence à bien faire. Pas vraiment parce que ça m’indigne « personne ne ment davantage qu’un homme indigné », a dit Nietzsche – mais parce qu’il y a une volonté d’éviter le débat de fond, c’est-à-dire ce que Richard Millet voit comme un désenchantement, un effondrement, une dévastation de la littérature, et sur quoi je suis en partie d’accord.»Pour avoir écrit ces lignes, il sera beaucoup pardonné à Sollers.
Comme nous l’avons vu avec Kamel Daoud, la pétition-indignée-fatwa est l’actuel substitut du couteau de boucher dans le Nouveau Totalitarisme de l’Impensée-Unique. Antoine Gallimard, qui a un côté anarchiste bourgeois, avait longtemps fait le gros dos devant les hurlements des pintades. Mais bon, Mme de Kerangal est un auteur-maison, il y avait comme une déloyauté à pointer sa vacuité tout en travaillant pour la rue Sébastien-Bottin — désormais rue Gaston Gallimard…
Aux dernières nouvelles, rapportées par Jérôme Béglé dans le Point, Millet prend la porte. Pas content, le bougre.

Qu’on me comprenne bien.
Comme Pierre Jourde qui a écrit sur le sujet des choses sensibles et définitives, je suis très loin de co-signer toutes les déclarations de Millet. Mais qu’un quarteron de littérateurs s’arroge le droit de demander sa tête me révulse. Que le trio infernal Louis / Lagasnerie / Eribon pense avoir le droit de dire qui doit vivre (les homos de gauche ?) et qui doit mourir (les hétéros de droite ?) me paraît symptomatique d’une époque qui faute de savoir se colleter au réel s’en remet encore une fois à l’idéologie : c’est vrai en littérature, en Education et en Economie, sans parler des Affaires étrangères. La question n’est même pas de savoir si Millet a raison de dénoncer comme il le fait l’emprise de l’Islam et le métissage — il y a dix mille manières de le dire. Le problème est qu’on lui interdise de parler — quoi qu’il dise. Qu’on lui interdise de vivre — quoi qu’il fasse. Que les petits marquis de la Gauche (je reviendrai quelque jour sur ce que le Point, il y a peu, appelait finement « la gauche Finkielkraut ») profitent bien des micro-particules de pouvoir qu’ils pensent aujourd’hui posséder. Le retour de bâton pourrait être terrible, et je ne lèverai pas le petit doigt pour leur épargner la géhenne — comme dirait Millet qui pense Bible en main, Belzébuth m’en préserve !

Jean-Paul Brighelli

77 commentaires

  1. Entièrement d’accord. Un pays où on peut être traduit en justice, licencié, etc. simplement parce qu’on a énoncé un avis différent de celui des ligues de vertu actuellement bien en cour, chez moi ça s’appelle une dictature. Il y a d’ailleurs au moins 2 bonnes raisons à s’offusquer de tels procédés : la première c’est que ne lire que ce qui fait plaisir revient à se fossiliser, la seconde c’est que si on craint tant que cela l’expression d’une opinion, fût-elle aberrante, c’est lui concéder une part de vérité capable de convaincre.
    Il y en aurait une 3ème : en dehors d’un certain microcosme, hautement admirable, mais quand même limité, Monsieur Millet risque-t-il sérieusement d’ébranler les bases de la société Guimauve Inc.? Je sens que je vais relire « La Cour » d’André Ribaud.

  2. Cher Monsieur, c’est très bien de faire de la publicité à un écrivain aussi brillant que Pierre Jourde. Je suis à des années-lumière de ses idées sur nombre de sujets politiques ou, comme on dit, « sociétaux » (je trouve même certaines de ses positions inacceptables) mais j’admire son érudition et son talent. C’est sans grand rapport avec le sujet abordé ici, mais j’en profite pour vanter un de ses livres, « Littérature monstre ». C’est un pavé mais, pour le plaisir de lire la seule préface, ça vaut la dépense. c’est un de ces bouquins qui vous rendent carrément plus intelligent.

  3. Comme quoi il en coûte toujours de s’opposer aux Harpies. Dire cela peu de jours avant le 8 mars, c’est prendre le risque de disparaître.
    En plus ça me coûte ; j’ai toujours défendu les droits des filles, (dans des contextes où cela n’était pas fort prisé, les droits des filles) ; même ceux de celles plus âgées que moi.

    Je me ringardise ; j’ai réussi à coller 4 accents circonflexes
    (petit joueur en plus ; la redondance du coût))

  4. Je sais par avance que les deux tiques du blog vont railler ma vilenie mais je suis devenu ‘bullet-proof’ à leurs pitoyables babillages et ne les lis plus désormais, mais encore une fois, comment ne pas rendre hommage à notre hôte pour ce billet hyper pesé, suite du précédent à maints égards.
    Tout ce que dit Millet dans son article au vitriol contre Kerangal n’est pas faux, et ce n’est pas un sentiment nouveau chez lui puisqu’il avait écrit « Désenchantement de la littérature » il y a quelques années (je me demande d’ailleurs si Gallimard va garder cet ouvrage dans son catalogue si d’aventure Millet est licencié). Ce que Millet nomme post-littérature n’est qu’une littérature de gare de triage élaborée à la chaîne comme une recette pour lecteurs qui croient qu’ils lisent, ce qui est bien pire que de ne pas lire du tout. Si encore cette production lucrative pour l’éditeur servait à lui permettre de publier des auteurs difficiles, elle serait en partie justifiée, mais même pas; elle ne sert par son hégémonie qu’à empêcher de choisir une littérature exigeante que les gens ne seront bientôt plus capables d’aborder.
    Au fond c’est presque un problème de liberté publique car on restreint de fait les choix du lecteur quand il n’est plus capable de les faire.
    C’est très révélateur du despotisme ambiant qui s’installe dans la culture.

  5. Richard Millet est un migrant parisien impuni qui fait des descentes régulières en province pour y violer des Corréziennes muni d’un crucifix d’argent ! Il fallait que cela fut dit …

  6. Article remarquable, auquel je n’ajouterais qu’une réflexion sur la valeur de l’écrivain. Quoique je n’aie encore lu que « Ma vie parmi les ombres », cela m’a suffi pour reconnaître en Millet un prosateur de grande race, celle des Gracq, des Claude Simon, qui plane très au-dessus des écrivaillons et des écrivaillonnes qui ont juré sa perte, et sont en passe de l’obtenir..

  7. hervé 4 Mars 2016 à 15 h 26 min #
    « Je sais par avance que les deux tiques du blog vont railler ma vilenie mais je suis devenu ‘bullet-proof’ à leurs pitoyables babillages et ne les lis plus désormais, mais encore une fois, comment ne pas rendre hommage à notre hôte pour ce billet hyper pesé, suite du précédent à maints égards. »

    Sloop ! Drôle de goût !
    Sage décision de ne plus nous lire, vous en aurez mis du temps à vous calmer. Et vous voilà rendant hommage maintenant ! Les excuses, hier, l’hommage aujourd’hui. Ciel ! Qu’aurons-nous demain ?
    « Enfin la grâce opéra. » comme dirait quelqu’un que j’aime bien.
    Les sujets vous conviennent, vous voulez rentrer en grâce et faites ce qu’il faut pour. Que Dieu vous bénisse, Hervé !
    Mais soyez magnanime, encore un effort. Acceptez que sur un blog de profs, des profs parlent, pas seulement, mais aussi, de leur boulot.
    Ce qui ne vous empêche en rien d’étaler vos analyses ardues et profondes comme la dernière en date: « Ce que Millet nomme post-littérature n’est qu’une littérature de gare de triage élaborée à la chaîne comme une recette pour lecteurs qui croient qu’ils lisent, ce qui est bien pire que de ne pas lire du tout. »
    Contrairement à vous, j’aime babiller et n’ai point d’autre prétention. Il suffit que les gens avec qui je babille soient charmants. Et ma foi, de temps à autre, à plusieurs, nous finissons parfois par dire deux trois choses intéressantes. Et quand nous avons réussi à rire ou à sourire, nous repartons bien contents.

    • Toujours aussi sympa la bambina !
      Oui, j’ai apprécié les deux derniers billets de JPB et moins celui sur Philippe Pujol et je ne me suis pas privé de le dire, donc je ne suis pas en recherche permanente de grâce auprès de JPB comme vous l’affirmez, mais j’apprécie son hospitalité quand parfois je dérape et qu’à vos yeux j’ai même le tort de le reconnaitre et de m’en excuser. Vous me poursuivez de façon malveillante et systématique et ça me dépasse. Alors je vous pose cette question, Sanseverina, pourquoi tant d’amour ?

  8. « Vous me poursuivez de façon malveillante et systématique et ça me dépasse. »

    Sniff !
    Impossible mon cher, je babille. Or qui babille n’est pas en mesure de poursuivre qui que ce soit. Le babilleur est léger, allègre, insouciant et se garderait bien d’une quelconque malveillance.

  9. «Le retour de bâton sera terrible», j’aimerais bien que ce soit bientôt.
    Et vive le babillage ! L’allegro, il pensoroso è il moderato…………..

  10. « Richard Millet est un migrant parisien impuni qui fait des descentes régulières en province pour y violer des Corréziennes muni d’un crucifix d’argent ! Il fallait que cela fut dit … »

    M. Driout, votre areligiosité viscérale qui s’exprime vertement à tous propos devient lassante et inquiétante. Peut-être faudrait-il envisager de cesser de tout juger à l’aune de vos trauma personnel. Si ce n’est, consultez donc un psy!
    Vos propos, hors leur dimension souvent culturellement louable, pourraient faire penser à ceux employés par les phalanges de l’homophobie…
    Cordialement.

    • Sisyphocante,

      La religion est le point central de l’œuvre de Millet ! Hors le salut par la foi il semble que rien dans la vie n’ait de valeur pour lui … qui est l’obsédé des deux ?

      • Quand je dis le salut par la foi j’exagère largement ! Ce serait plutôt la salut par la foi catholique ; il faut dire qu’au Liban pays où il passa son enfance toutes les écoles sont religieuses ! Il n’est d’ailleurs de croire à l’instar de Joseph de Maistre que faire couler le sang apanage du bourreau est le plus noble combat de l’homme !

  11. Sanseverina, 4 Mars 2016 à 17 h 34 min

    « Sniff » ? Babillarde et persifleuse en plus, et elle ne s’en même cache pas. Je dois dire que vos babillages ressemblent plus à des dialogues entre votre Moi et votre Sur-Moi tant la manière dont vous désamorcez tous les reproches qu’on pourrait vous faire est confondante, je vous reconnais ce talent.

    ps: « Sloop »? Je ne connais pas du tout ce mot, qu’est-ce-que ça veut dire ? Ce doit être un mot chu directement du livre de la Kérangal.

    • Non, franchement, j’attendais mieux. Vraiment pas à la hauteur.
      La session de septembre vous guette…

  12. J’avais déjà causé ici de Babyliss – j’adore – de K. il y a lurette. On connaissait la littérature de gare, voici la littérature de garage.

    Comme chez Speedy, on vous carre d’autor un mauvais café dans une main et on vous édifie d’une vie d’ange réparateur le temps d’une vidange. Moteur !

    On est censé en ressortir enté, le cœur retourné, pas intelligent mais informé des dernières techniques opératoires et impatient de la suite : une révision spéciale est d’ailleurs planifiée à l’approche des cent mille.

    Millet en avait gallimard de toutes ces khonneries et gros sur la patate (rapport à l’Angélus). Il s’est fait virer avec panache.

  13. Dans le cas des esprits religieux je suis surtout frappé par leur pauvreté imaginative ; leur monomanie sexuelle déteint sur tout … leurs frustrations sont le point nodal de leur pensée.

  14. Je me permets de signaler à ceux qui passent que les écrivains chassés par leur maison pour les mêmes raisons sont nombreux, et que je fais partie de ceux que Millet voulait publier avant son départ, mais qui ont été repoussés par Galimard comme s’ils avaient contracté la peste à son contact. J’ai atterri chez Flammarion, puis tout le monde m’a tourné le dos, Et le Figaro lui-même un an après comme il est raconté ici.
    http://s610914067.onlinehome.fr/clickandbuilds/vieilleespece/index.php/le-figaro/18376-fasc
    Il ne faut pas sous-estimer la puissance de la parole.

  15. Je suis à cent mille lieux de la symbolique religieuse ça vous pouvez le dire !
    – Faire couler le sang sanctifie tout !
    – L’ordalie est la preuve ultime des bons combats
    patati patata…

    Philippe de Villiers a fait racheter très cher le modeste anneau de Jeanne d’Arc aux Anglois afin de sauver la France ! C’est ce qu’il dit texto (ou plutôt audio) aujourd’hui sur Boulevard Voltaire ! C’est Voltaire qui glosait sur la Pucelle d’Orléans qui doit en faire des gorges chaudes !

  16. « De surenchère en surenchère, la relique affole la salle. Mise à prix initialement au prix de 19 051 euros, l’anneau finit par tomber dans l’escarcelle de la fondation Puy du Fou Espérance pour la somme de 376 833 euros. »

    Qu’est-ce que c’est sinon du fétichisme ?

    Si pour sauver la France on doit revenir au temps de Saint-Louis qui payait des reliques – style couronne d’épines – plus cher que la future Sainte-Chapelle, le prix moral est lourd à payer !

    https://fr.wikipedia.org/wiki/Reliques_de_la_Sainte-Chapelle

    Au fait Saint-Louis est mort de la peste à Tunis ! Il faut croire que l’éponge de la passion ne l’a pas sauvé des bacilles !

  17. Bel article.
    Je ne connaissais pas le petit texte commis par Bernard Henri Lévy mais sa lecture est fascinante. Aucun argument, des dénonciations, des comparaisons fallacieuses.
    On dirait un pamphlet antisémite.
    Bien entendu on peut ne pas apprécier Millet, soit comme auteur, soit comme personnage.
    Seulement il a toutes les qualités qui manquent tant à ses détracteurs, il a du talent et du style, du courage moral et… Physique ( pas autant que BHL sur les barricades ukrainiennes bien sûr, mais tout de même… ) et Une réflexion sur notre époque.
    Ce déchaînement haineux et méprisable fait étrangement penser à ceux qui ont eu cours lors des « periodeslespmussombrdsdenotrehistoire. » Ce qui aurait tendance à donner raison à Millet dont je ne suis pas éloigné de penser qu’il se sacrifie pour montrer la réalité de ce qu’il dénonce.

    Bravo pour avoir pris parti et dénoncé cet acte méprisable.
    C.Monge

    • « Qu’il se sacrifie pour montrer la réalité de ce qu’il dénonce. »
      Je suis confus de cette phrase car vous aviez déjà analysé ceci (martyr) dans votre article !
      C.Monge

  18. On cite souvent en exemple la réussite du Puy du Fou ! Il paraît que même les Américains lui ont décerné le trophée du meilleur parc à thème au monde.

    On oublie un peu vite que sans le volontariat ce parc n’existerait pas. Il ne s’agit pas de servage – sinon volontaire – mais la population locale apporte son temps et ses disponibilités pour faire de cette entreprise une réussite !

    Alors évidemment les choses prennent un autre sens.

    • Vous savez c’est comme la corvée d’Ancien régime ! Qui était extrêmement impopulaire car elle distrayait les paysans de leurs travaux des champs au profit des routes royales.

      Faire entretenir un château en disposant d’une main d’œuvre locale à bas coût c’est plus facile que s’il faut payer la sécurité sociale aux ouvriers !
      Je demande à voir le modèle économique proposé à grande échelle par le vicomte du Puy du Fou !

      • Vous n’avez pas tort Driout, c’est de l’idolâtrie.
        376 833 euros… Qu’en pensent les bénévoles du Puy du Fou ?

  19. Je remets, car il faut que ça se sache et pour l’esbaudissement général, ce petit témoignage sur ce qui se passe sur le terrain dans les séances de formatage à la réforme du collège !

    Formatage : compte-rendu à chaud de la journée 1

    Difficulté (question posée 3 fois) à ce que les 2 dames se présentent clairement en disant qu’elles s’étaient portées volontaires pour le formatage au formatage.
    Exposé infographique sur les inégalités dans l’éducation (quelle découverte !). L’implicite : donc il faut faire cette réforme-ci, qui est bonne. J’ai relevé le sophisme: constater qu’on a la migraine ne signifie pas qu’il est bon de se tirer une balle dans le pied. Pour l’anecdote, dans l’exposé des inégalités, elles signalent la réussite supérieure des enfants d’enseignants. Je demande si c’est dû au fait qu’ils appliquent la réforme depuis des lustres à la maison… (Quand on ne maîtrise pas la rhétorique, il ne faut pas s’en mêler, ça se retourne contre soi !)
    Infographies sur la réforme. À chaque incohérence, je pose une question « naïve ». Et à chaque fois, une réponse sur un ton assuré. Mais une réponse fausse. C’est par exemple moi qui les détrompe et leur explique que l’AP n’est pas pris sur la dotation supplémentaire, que l’AP n’aura donc plus rien de personnalisé.
    Elles ne maîtrisent absolument rien des détails de la réforme. Vraie colère de ma part quand l’une d’elle me dit: « Mais c’est normal d’avoir peur du changement dans ses habitudes ». Je reconnais immédiatement les mots et les « éléments de langage » de la plaquette donnée aux formateurs pour canaliser les récalcitrants. Je dis qu’avoir l’esprit critique sur une réforme dont je connais – moi – les détails, ce n’est pas de la peur. Elle m’a bien chauffé, là. (Je ne sais pas me dominer quand on me prend pour un con).
    Moment essentiel : la fameuse addition 22h + 4h (EPI+AP). Je souligne que l’addition est trompeuse, que c’est fait pour ça, et qu’il s’agit en fait d’une soustraction: les heures API+AP sont retranchées des heures disciplinaires. Etonnement de beaucoup de collègues, et ça devient houleux (mais ça l’était depuis le début, je n’étais pas le seul à intervenir et à interrompre à chaque mensonge). C’est donc un point important : chez les attentistes, il y a le souvenir des IDD, et ils ne savent pas tous à quel point les EPI sont différents. Dès qu’ils le comprennent, ils sont beaucoup moins attentistes.
    Présentation de ce que peut être un EPI, des diverses modalités qu’il peut prendre. Vives réactions dans la salle par rapport aux heures de concertation qui s’annoncent. Et puis, moment HALLUCINANT: des collègues, à juste titre, demandent aux formateuses si elles auraient un exemple d’emploi du temps élève et d’emploi du temps prof. Elles répondent : « Oui, mais on nous a interdit de vous les montrer. » L’infantilisation rend tout le monde furax. Je signale à tous que ces emplois du temps ont fuité depuis longtemps, qu’ils pourront les trouver facilement avec une recherche Google, et qu’ils comprendront pourquoi on interdit de les montrer…
    Puis du pédagogisme, les compétences, tout ça. Elles embrayent sur leurs pratiques avec des « tâches complexes ». Je demande en quoi ce qu’elles font dans leurs classes nous concerne et concerne le décret. Réponse : « Le travail avec les tâches complexes, c’est dans le BO ». Je n’insiste pas, je n’ai pas lu tous les BO après tout. Ce qui est sûr c’est que ça n’a rien à voir avec le décret lui-même.
    Liée aux compétences, l’usine à gaz dans l’usine à gaz que représentent les évaluations. Je vois quelque chose dans le genre (je cite de mémoire) « connaître le monde habité et façonné par l’homme ». Je demande une traduction. Elle me demande « Une traduction en quoi ? » Je réponds : « Une traduction en français ». (Je n’ai pas obtenu de traduction).
    Annonce des réjouissances pour la prochaine journée, et annonce d’ateliers d’EPI. Nouvelle colère (je ne sais pas me dominer quand on me prend pour un con – bis) : « il est hors de question que je réfléchisse à des EPI virtuels menés avec des collègues virtuels à l’intention d’élèves virtuels dans une organisation virtuelle au sein du collège. » Je pense que je ne serai pas le seul à refuser le n’importe-quoi.
    Pause. Ai séché la 3e partie, comme beaucoup.

    Donc bilan positif : c’est très houleux. Collègues favorables très minoritaires. Et puis en textos on reçoit en direct ce qui se passe dans un autre centre de formation du coin : apparemment, encore plus houleux, et deux inspecteurs ont été appelés en renfort !
    Quand on sait ce qu’ils pensent vraiment, on les plaindrait (presque).

    Didier Jodin – Académie de Strasbourg

    Formatage : compte-rendu à chaud de la journée 2

    (Pour l’épisode précédent : Cf. https://goo.gl/iSpd7E)

    Salle beaucoup plus clairsemée que la dernière fois. Et pourtant, encore bien plus chahuteuse. Exaspération générale (sauf un gars – dont on me dit qu’il est à l’UNSA, mais je n’en sais rien et peu m’importe. Il était au 4e rang la première journée, aujourd’hui il s’est avancé au premier rang, histoire probablement de marquer aux deux dames son soutien inconditionnel).
    Thème : les EPI. Interminables exposés des powerpoints officiels, avec lecture et paraphrase. Je remarque une meilleure maîtrise de la souris pour faire glisser les diapos. Ça me déçoit un peu, parce que j’avais bien aimé, à la séance précédente, cette façon attendrissante qu’avait la dame de gauche, quand ça ne marchait pas comme elle voulait, de se retourner vers le tableau pour vérifier que sur l’image projetée c’était le même bordel que sur l’écran de son ordinateur.
    En résumé : les EPI c’est bien, les EPI c’est super, les EPI c’est innovant, les EPI c’est l’avenir. Il y a des choses à bien distinguer, hein : l’enseignement interdisciplinaire, pluridisciplinaire, transdisciplinaire (je crois qu’il y en avait un quatrième comme ça, avec un autre préfixe, mais je ne suis pas sûr, j’ai oublié).
    En tout cas, c’est bien différent du bêtement disciplinaire. Pour dire à quel point c’est bête, le disciplinaire, projection d’un petit dessin avec des profs à la plage. Révolte dans la salle.
    – Vous êtes vraiment des collègues ? Vous n’avez pas honte de nous transmettre ce genre de documents ? De répercuter ces insultes ?
    – Ben… non… moi je trouve ça drôle… parce que c’est drôle, non ?
    À en croire l’avis général : non.
    Quant à la phrase répétée en boucle « Donner du sens aux enseignements », elle provoque une indignation semblable, mais une réponse plus concise :
    – Donc actuellement notre enseignement n’a pas de sens ? Vous n’avez pas honte de mener cette formation ?
    – …
    (Ça, c’était la réponse plus concise).
    Les dames expliquent pourquoi on est réticents (on est toujours dans la paraphrase du powerpoint : même pour notre « inquiétude » il y a une diapo toute prête). C’est nouveau, on doit adopter « une autre posture », on n’a pas l’habitude, on a peur, parce qu’il faut s’écarter de notre formation disciplinaire. Je fais remarquer que je n’ai pas été « formé » à ma discipline, mais que je l’ai étudiée, dans une université.
    Diapos. Paraphrase. Diapo. Paraphrase. Diapo. Paraphrase.
    Chahut. Chahut. Chahut. Crescendo.
    Je leur signale que la diapo qu’elles présentent sur le brevet est déjà obsolète : ça a changé.
    J’entends cette phrase chez une des dames : « Mais si ! Allez, les EPI, faut y croire ! »
    J’interviens pour tenter de lui expliquer la différence entre une religion et des faits. Au lieu de « croire », elle pourrait prendre la peine de lire l’évaluation faite au Québec après dix ans d’une réforme jumelle. Le rapport – je le lui avais déjà signalé – constate le désastre et se termine en recommandant un retour aux enseignements disciplinaires et à une élévation du niveau culturel.
    Un peu naïf de ma part. La foi et la raison sont deux ordres de pensée différents.
    Des questions précises sont posées sur toutes les aberrations et les impossibilités pratiques. En renfort, deux nouveaux venus par rapport à la première journée : Yzipens et Saitavoire.
    Les temps de concertation que tout cela supposerait ? – C’est à voir.
    La place des mini-entreprises dans tout ça ? – Ils y pensent.
    La constitution des emplois du temps ? – C’est à voir.
    etc.
    Yzipens et Saitavoire interviendront beaucoup dans le dialogue.
    Sur cette question des emplois du temps, toujours une rétention d’information : elles ont des exemples mais n’ont pas le droit de les montrer.
    Ras-le-bol. Je sors photocopier ces emplois du temps, qui ont fuité depuis longtemps. Je reviens dans la salle et commence à les distribuer.
    – Ah non, ne faites pas ça ici.
    – Si. Ici. La question vient d’être posée, et c’est directement en lien avec le thème du jour.
    – Ah non, ne faites pas ça maintenant.
    – Si. Maintenant.
    Ici et maintenant, donc. Enfin : là-bas et tout à l’heure.
    Le chahut continue et ne s’arrêtera pas, malgré une collègue qui dit avoir la migraine et qui tente d’intervenir :
    – On n’est pas gentils, si c’est ça il ne fallait pas venir.
    On lui fait remarquer qu’on n’a pas été invités, mais convoqués.
    – Oui mais nos deux collègues, là, elles n’ont pas demandé à…
    On lui rappelle que si, elles ont « demandé à ». Et qu’elles pourraient faire comme d’autres formateurs qui ailleurs ont démissionné de leur honorable fonction.
    – Oui mais alors on perd notre temps…
    On confirme.
    Les dames concluent la matinée :
    L’après-midi sera consacrée à des ateliers d’EPI.
    C’est hors de question. Avez-vous prévu un plan B ?
    Non.
    On se prend donc une petite heure pour rédiger et signer une motion. Deux axes simples : le caractère aberrant et incohérent de cette réforme, d’une part, l’inanité du formatage, d’autre part.

    Didier Jodin – Académie de Strasbourg

    Formatage : compte-rendu à chaud de la journée 3

    Pour les épisodes précédents Cf. :
    https://goo.gl/iSpd7E
    https://goo.gl/m6Z4Fw

    Thème de la journée : l’évaluation.

    Les mêmes acteurs sont là. À gauche, la prof de français (toujours plus décomposée – elle m’inquiète un peu). À droite, la documentaliste (toujours plus revêche). Au premier rang, le gars de l’Unsa (toujours plus extatique, et qui attend avidement le troisième volet de la Vérité Révélée).
    Mais il y a aussi du neuf : une troisième dame. Elle ne se place pas à la table des oratrices, mais sur une chaise de la salle, une chaise comme les nôtres, en toute simplicité. Pourtant, elle se présente : « Inspectrice académique, inspectrice pédagogique régionale de maths ». Je me demande pourquoi les IPR ont ce souci de préciser qu’ils sont aussi IA, vu qu’ils sont tous affublés des deux sigles.
    Elle remercie les deux formateuses, qui elles aussi ont des cours, des copies à corriger, tout ça, mais qui ont accepté en plus d’animer ces journées, etc.
    Bon. Il me semble qu’elles ont des indemnités et des heures de décharge, mais ce serait mesquin de le faire remarquer. Quant à leur espoir naïf de se faire bien voir des IPR (qui sont aussi IA, on ne le dira jamais assez), ce serait un soupçon indigne.
    Madame l’inspectrice-académique-inspectrice-pédagogique-régionale-de-mathématiques précise :
    « On ne va pas vous donner toutes les réponses, hein, le but c’est plutôt d’ouvrir des questionnements ».

    Je note mentalement le caractère grotesque de la formulation, ouvrir des questionnements, mais je ne sais pas encore à quel point cela sera la marque de la journée. Beaucoup de questionnements, d’innombrables questions, des interrogations en pagaille, et strictement aucune réponse.

    Madame l’inspectrice-académique-inspectrice-pédagogique-régionale-de-mathématiques laisse la parole aux formateuses. Sauf que d’entrée ça réagit dans la salle. « Ah mais non. On a eu plein de questions laissées sans réponses lors des journées précédentes, alors puisque vous êtes là on espère en avoir enfin. » (mine dépitée des formateuses)
    Il est impossible de rapporter ici toutes les interventions. Chacune correspondait à une incohérence de la réforme, c’est dire s’il y en avait beaucoup. Il est bien plus aisé de synthétiser les réponses :
    « alors oui, là-dessus il y aura des réflexions à mener… »
    « alors là, il faut voir… »
    « sur ce point-là, eh ben, c’est un processus, hein… »
    Et toutes les autres façons de dire – en substance – : je n’en sais rien, laissez-moi tranquille. Après vingt minutes comme ça, la réponse sera vraiment, et pas qu’en substance : « Bon. On arrête avec les questions. »
    Il y en a quand même une que je dois rapporter, non seulement parce que c’est la mienne, mais aussi parce que c’est à peu près la seule qui ait obtenu une réponse.
    Est-ce que l’enseignement de complément de langues et cultures de l’Antiquité doit nécessairement compléter un enseignement pratique interdisciplinaire de langues et cultures de l’Antiquité dans les enseignements complémentaires… ou pas ?
    Non, soyons honnête. Je n’ai pas formulé la question comme ça. Il suffit d’employer les termes officiels, sans rien ajouter, pour sembler ironique. C’est le charme de cette réforme, qui fabrique elle-même sa propre dérision. Or je ne voulais pas braquer la dame, parce que la réponse m’intéressait. Il s’agit, en gros, de savoir si on peut faire du latin même si on ne mène pas le projet, ailleurs et avec un autre collègue, de construire une maquette du Colisée en allumettes. Une analyse grammaticale du décret (merci Loys) permet de répondre qu’on peut. Mais ce n’est pas ce que les stagiaires qui ont rédigé le décret ont voulu dire. Et Mme Robine (merci Florence) affirme bien qu’il faut construire une maquette en allumettes, ce que confirment certaines académies. Dans d’autres cependant, dont la mienne, les IPR de Lettres (pardon : les inspecteurs-académiques-inspecteurs-pédagogiques-régionaux de Lettres) disent que non, on n’a pas besoin d’échafauder une maquette en allumettes, ni du Colisée ni d’autre chose, mais que c’est quand même mieux d’en constuire une, tant qu’à faire.
    Alors ? Hum ?
    Oui, je crois bien qu’il faut un EPI-LCA pour faire un EDC-LCA (me répond l’IA-IPR). Enfin, à ma connaissance, hein.
    Même pas envie de lui apprendre que ses collègues locaux disent le contraire.
    Surtout que… surtout que… elle ajoute :
    De toutes façons, avec les 2h45 de dotation, il y a mieux à faire que du latin. Il y a plus pertinent.
    Stupeur. Je consacre 2,45 dixièmes de seconde à me demander : « Est-ce qu’elle a vraiment dit ça ? Est-ce que mes oreilles sont fidèles ? Est-ce que, pour reprendre l’intitulé d’un EPI devenu proverbial (merci @marie34), ce ne serait pas mon corps qui me raconterait des histoires ? » Et je me réponds, in petto, dans mon for intérieur et pour ainsi dire à moi-même : « Oui, elle a vraiment dit ça. »
    Je la félicite donc, (du tac au tac, moins 2,45 dixièmes de seconde) :
    Merci. Voilà qui a au moins le mérite d’être clair.

    La dame ne sera pas restée longtemps. Après la première heure, elle s’en va, sans dire au revoir à personne, et en regardant ses pieds.

    ———-

    Bon. Et alors, l’évaluation dans la réforme, avec tout ça ?
    Faut pas m’en vouloir, mais compte-tenu :
    des propos de Madame l’inspectrice-académique-inspectrice-pédagogique-régionale de mathématiques, sur le fait que ma matière n’était pas pertinente (au fait : ne dites pas à ma mère que je suis prof de lettres classiques, elle croit que je tiens un bordel à Caracas)
    des powerpoints illisibles (pourquoi diantre a-t-on donné aux formateuses des trucs écrits en lettres blanches sur fond jaune ? Comme si elles n’avaient pas assez de mal comme ça.)
    de la complexité ahurissante du machin
    du fait que tous les collègues étaient révoltés par l’usine à gaz et le faisaient bruyamment savoir
    … eh bien… je serais bien incapable de synthétiser.
    Allez, j’essaie quand même.

    T’as des bulletins trimestriels qui ne sont plus des bulletins et qui ne sont plus forcément trimestriels mais qui sont des bilans périodiques préparant des bilans de fin de cycle qui ont des rectos pour un truc et des versos pour un autre truc et qui distinguent les parcours, évalués à partir de l’évaluation de ton porte-folio, tes compétences dans les domaines, tes EPI, tes projets, tes actions, tes acquis de paliers de maîtrise, avec l’interdisciplinaire et tout, et cela permet de remplir ton livret avec plein de choses en lien avec le brevet pour lequel il y a 700 points dont certains dépendent d’un EPI que t’as pu faire une année précédente et qui a déjà été évalué, sauf que là ce sera plus tard et par un prof qui ne connaît pas forcément ce dont il retourne, mais on espère qu’il ne dira pas que ton EPI est nul si on t’avait dit dans le temps qu’il était bien, ou l’inverse, et puis il y a des points qui dépendent de ta maîtrise de ceci ou cela, par exemple pour ta maîtrise insuffisante de ceci ou de cela eh ben t’as 10 points, va savoir pourquoi t’as 10 points plutôt que rien quand tu ne maîtrises pas, je t’en pose, moi, des questions, et puis si t’as fait du latin t’as 20 points, et si t’es dans un bahut où le latin est déjà mort t’as que dalle, mais c’est une réforme pour réduire les inégalités alors va pas te plaindre, y’a quand même plus pertinent à faire que le latin, fallait aller dans le privé, et puis t’as aussi des évaluations pour l’accompagnement personnalisé, qui se fait en classe entière mais qui est personnalisé quand même, parce que ton prof passe de la « posture du face à face » à « la posture du côte à côte », dans une « culture du diagnostic » eh ben oui, c’est comme ça, en aide aussi t’es évalué, un peu comme un toubib qui ferait la radio d’une béquille pour vérifier que l’os de ta jambe se ressoude bien, et si tu comprends rien à tes évaluations on te fera peut-être un diagnostic « ne comprend rien à ses bilans périodiques » et qui sait on te fera un EPI « compréhension de mes bilans périodiques », et même si t’es sage on te fera de l’AP « compréhension de mes bilans de fin de cycle » et puisque tu es encore en train de lire cette phrase alors que tu la trouves interminable eh ben c’est que tu n’as pas validé ta compétence « je sais arrêter de lire quand ça n’a aucun sens » du domaine « des langages pour penser et communiquer », car oui ça existe comme intitulé de domaine, et si tu te demandes ce que ça serait un langage pour autre chose que penser ou communiquer, eh bien c’est que tu te poses trop de questions, et moi je te dis comme l’inspectrice-académique-inspectrice-pédagogique-régionale de maths : « Bon, on arrête avec les questions. »

    ———-

    Pause clope devant le lycée avec une collègue. Une camionette arrive, trois gendarmes en sortent et entrent dans la cour. La copine s’interroge :
    Tu crois que c’est les formateuses qui les ont appelés ? C’est nous qu’ils viennent serrer ?
    On n’est pas sérieux quand on a vingt-sept ans (merci Claudine).

    ———-

    Retour.
    On en est toujours aux myriades de cases dans les myriades de tableaux divers et variés. Point particulier des diapos : chacune est organisée de la même manière, avec le délire à gauche, mais aussi des questions à droite. Exemples :
    comment est construit ce bilan de fin de cycle ?
    qui va renseigner…?
    comment différencier les attentes de ces quatre paliers de maîtrise ?
    qui va renseigner le niveau de maîtrise de ces composantes du socle ?
    qui va remplir cette partie interdisciplinaire ?
    sous quelle forme indiquer les projets et actions ?
    comment faire apparaître l’implication des élèves ?
    qui va remplir cette fiche de synthèse ?
    comment la rendre pertinente et efficace ?

    Je me dis, naïvement, que les dames pratiquent une méthode socratique. Elles doivent connaître les réponses, mais elles veulent accoucher nos esprits. Ben non. Ce sont de vraies questions. Elles n’ont aucune réponse d’aucune sorte. C’est même l’objet de l’atelier qui est censé suivre : réfléchir à des pistes.
    Un collègue intervient, déclare qu’il est professeur principal de 3e cette année, qu’il est hors de question qu’il le soit l’an prochain, et qu’il ne connaît personne qui accepterait de l’être dans ces conditions. Il ajoute qu’il comprend bien maintenant comment la réforme va améliorer le niveau des élèves : tout prof sensé remplira la même chose partout et pour tout le monde.
    Applaudissements nourris.
    A propos d’une des diapos, où les mots supposés permettre l’évaluation des élèves sont disposés en constellations, je fais remarquer que chaque terme correspond à un comportement, jamais à la maîtrise d’un savoir. Que cela ressemble à l’évaluation d’un employé dans une entreprise. Je demande aux dames si cette dérive néo-libérale et entrepre-neu-neu-riale à l’école, cette mécanisation des élèves, considérés comme une accumulation de rouages, ne les gêne pas.
    Silence de leur côté. Ma phrase était probablement trop longue. Applaudissements dans la salle. Un peu moins nourris que ceux pour le collègue tout à l’heure. Je suis jaloux de l’évaluation normative qu’il a reçue.

    On a droit aussi à de vrais tableaux faits par de vrais profs (merci les vrais profs) sur de vraies activités. L’une d’elle a connu un bon succès dans la salle : « Et si le foot permettait une démarche écologique » ? Persiflages sur l’activité, puis effarement général devant le tableau d’évaluation : 5 colonnes, 7 rangées. Ma voisine de gauche constate : « Il y a vraiment des gens qui n’ont pas de vie ».

    Tout le monde a bleuté les « ateliers », bien entendu. Parce que c’était inepte, parce que la dame de droite disait sèchement « il faut que vous travailliez » (rappelons qu’elle est documentaliste et qu’elle n’a donc jamais rempli de bulletins de sa vie).

    ——– INTERMÈDE – Quel prof êtes-vous ? ——–

    Exercice : avec cet « outil pour élaborer des situations d’apprentissage et d’évaluation », formulez les consignes d’une « tâche complexe » et mettez au point l’évaluation idoine.

    Connaître

    Comprendre

    Appliquer

    Analyser

    Synthétiser

    Évaluer

    Créer

    mémoriser

    reconnaître

    relier

    examiner

    résumer

    estimer

    réaliser

    nommer

    classer

    combiner

    corréler

    modifier

    mesurer

    concevoir

    répéter

    distinguer

    classifier

    inventorier

    adapter

    tester

    imaginer

    identifier

    comparer

    transférer

    catégoriser

    planifier

    juger

    innover

    définir

    contraster

    illustrer

    interpréter

    exprimer

    déduire

    inventer

    rappeler

    différencier

    simuler

    ordonner

    proposer

    décider

    construire

    citer

    reformuler

    résoudre

    prioriser

    collaborer

    justifier

    élaborer

    lister

    expliquer

    démontrer

    critiquer

    énumérer

    discuter

    utiliser

    Résultat du test :

    Si vous avez fait l’exercice, vous n’avez pas de vie, mais vous êtes un pédagogue innovant.
    Si vous n’avez pas fait l’exercice, euh… c’est pas bien, d’abord, parce que je me suis cassé à le recopier lisiblement, ce foutu tableau, et en plus vous êtes un prof immobiliste qui ne veut pas le bien de ses élèves.

    ——– FIN DE L’INTERMÈDE ——–

    Faut laisser les derniers mots à Voltaire : « Au secours ! »

    Non, faut les laisser à Monsieur Samovar plutôt. À lire absolument, cette autre trilogie sur les formatages (le dernier volet – hilarant – est ici : https://t.co/50l315W8Hh).

    N.B. : Pour affiner sa connaissance des modalités d’évaluation, il ne faut pas hésiter à se nourrir des précisions du Décret n° 2015-1929 du 31 décembre 2015, qui apporte de nombreux éclaircissements, comme celui-ci :

    « Les bilans de fin de cycle compren[nent] une évaluation du niveau de maîtrise de chacune des composantes du premier domaine et de chacun des quatre autres domaines du socle commun de connaissances, de compétences et de culture ».
    (Merci aux stagiaires qui ont rédigé le décret – et qui ont peut-être trop arrosé le réveillon du 31.)

    Didier Jodin – Académie de Strasbourg

  20. Je n’avais jamais lu quoi que ce soit de Richard Millet, avant son article, et il faut reconnaître (avé l’assent) que sa critique est soit un très gros acte manqué, soit une volonté délibérée de se faire virer.
    Je ne suis pas sûr que Gallimard ait apprécié qu’il parle de sa « putasserie » !
    Et « Babyliss de Kerangal », quel régal !

  21. En 1909 la NRF a été fondée par de grands bourgeois protestants comme André Gide et Jean Schlumberger, un grand bourgeois parisien libertin et oisif Gaston Gallimard et ils ont confié la direction de la revue à un petit bourgeois bordelais catholique Jacques Rivière. Il y avait des invités permanents de la revue comme l’agnostique Paul Valéry, l’athée André Suarès et le catholique ultra-montain Paul Claudel.

    Or il se trouve que le catholique Paul Claudel lançait périodiquement des oukases sur la mauvaise littérature : celle des pédérastes, des disciples de Luther et de Calvin, des libres penseurs etc.

    Gide et Schlumberger ont supporté les humeurs du consul de France d’autant qu’il était loin de Paris … et n’avait pas voix à la direction de la NRF.
    Paulhan le sceptique a pris la succession à la mort de Rivière.

    Si on confiait la maison NRF Gallimard à Millet ? Ce serait vite une secte …

  22. Zemmour, Daoud, Millet…Bientôt Brighelli? Ah non, cela a déjà été fait…

    La censure collabobo, autrement dit la gauche médiatico-culturelle, idiote utile de l’extrême-droite salafiste, dénonce, lynche et excommunie selon les traditionnelles méthodes staliniennes, recyclées au profit d’une idéologie véhiculée par des milliardaires ultra-capitalistes du Golfe. Marx doit se retourner dans sa tombe en voyant ceux qui se réclament de lui devenus les supplétifs de l’opium du peuple… Quelle revanche de la superstition sur le matérialisme!

    Très prochainement, pour être publié et lu, il faudra faire allégeance au politiquement correct philoislamiste et que rien ne dépasse: seul l’ami lisse sera toléré.

    La pétition est devenue la fatwa médiatique de nos indignés professionnels et sélectifs. Les émules des Merah, Kouachi et autres Coulibaly n’ont désormais même plus à chercher des cibles: elles leur sont désignées avec complaisance par les journaux ou sites agréés de la bien-pensance. Moi, avec ce genre de presse, j’essuie partout.

  23. Dommage qu’on n’ait pas accès à une partie des articles auxquels vous renvoyez…

  24. Un grand merci à Jean pour ce témoignage à chaud de ce qu’il se passe dans les collèges concernant cette « réforme ».

    En résumé, personne n’en veut mais du moment que les heures-poste sont là, les nouveaux progs seront appliqués ( sournoisement ).
    Le long exposé de Jean fait très bien ressortir le degré pitoyable d’improvisation de nos cadres, peu au fait des modalités et qui nous demandent de construire nous-mêmes des contenus !
    Perso, j’attends la bonne parole, l’ukase biblique ( kasdédi Driout) incontournable des ZIP et R – I-AH! pour fabriquer ce que je ferai l’an prochain.
    Après tout, ces bonnes gens n’ont qu’à nous pondre des cours tout prêt, bien assaisonnés à la mode du moment! Ainsi, tous les profs seront au top-niveau.
    Ah ah ah.

    • Oui la rue de Grenelle c’est le Saint-Siège ! Le carrosse du Saint-Sacrement est tiré par quatre inspecteurs à poil blanc et à toupet rouge …

  25. A Eurodisney il y a près de 15000 employés ; aucun d’entre eux ne travaille gratuitement pour les beaux yeux de Minnie !

    Maintenant élisons Philippe de Villiers à la tête de France et il nourrira les Français en promenant l’anneau miraculeux de Jeanne la pucelle dans une chasse en or et diamants tirée par quatre chevaux carapaçonnés d’argent !

    Montjoie ! Saint-Denis ! crieront les gueux sous les fenêtres de leur nouveau prince quand il leur jettera quelques miettes du festin élyséen !

    Bon ! j’arrête là car je vais m’attirer les foudres de Sisyphe le bienheureux qui roule son caillou.

  26. Les vertus profondes de la pipolisation par Guillaume Erner. C’est dans télérama *, évidemment :

    http://www.telerama.fr/idees/guillaume-erner-la-societe-reclame-des-doses-de-people-de-plus-en-plus-fortes,139183.php

    « Vous affirmez que le culte de la célébrité ne relève pas d’une nouvelle barbarie, mais au contraire nous en protège… Pour quelles raisons ?
    Le people est une création démocratique. Nous vivons dans une société horizontale qui a des défauts : elle peut tirer vers le bas, niveler les sujets d’interrogation. Mais en même temps, cette société est rétive à la transcendance, or pour qu’il y ait dictature, il faut qu’il y ait transcendance. L’ironie consubstantielle à la société des people secrète l’anti-corps de la dictature. Dans une dictature, il n’y a pas d’autres stars que le dictateur. Les personnes starifiées sont tuées comme en Corée du Nord. »

    « Raisonnement » de sociologue ? On peut tordre ça dans tous les sens. Au point de justifier la nécessité d’une réelection de Nigo par son imperméabilité totale et définitive à toute forme de transcendance. A l’inverse, j’en connais, ici, qui aimeraient nous convertir vite fait, bien fait à la transcendance (qui n’est que ruine de l’âme).

    * vous pouvez cliquer sur le lien, on ne dira rien pour cette fois.

    • Marrants ces demi journalistes/présentateurs/animateurs qui y vont tous de leur petit bouquin qui sont construits sur fort peu de choses et surtout pas sur des raisonnements solides ou des études sérieuses. Disons qu’ils cultivent leur survie personnelle en défendant le système des people. Car ne courent-ils pas après ce statut eux-mêmes ? Ne trouve-t-on pas dans la rubrique people, ceux qui le sont sans rien faire ( fric, naissance…) et les lumpen -people qui rament pour en être ( journalistes, présentateurs radio/tv, une partie des hommes politiques eux-mêmes ).
      Et ce beau monde nous garantirait contre la dictature ? Mais il nous y prépare. La foule est ainsi dressée à admirer des gens sans valeur. Il n ‘y a plus qu’à attendre qu’elle soit mûre pour que l’un d’entre eux se déclare plus people que les autres.
      Le seul rempart contre la dictature c’est l’éducation de tous et ça devrait être l’objet des matinées de France-Culture.
      Diantre, me voilà faisant de la sociologie sans le savoir.
      Savez ce que c’est que sociologiser ? Socioligiser est la plus jolie chose du monde, c’est mêler le vrai au faux en batifolant à la radio; dès qu’on en sait tant, on sait sociologiser.
      Au passage, merci à Brighelli qui nous défend encore et toujours dans son bon article sur l’absentéisme.

    • Culture du people=jeux de cirque. En somme : vive le navet, dit ce monsieur, ça met du beurre dans mes épinards.
      Et si, précisément, dans une dictature, il y a des artistes, et même des bons. Son affirmation traduit juste une méconnaissance peut-être volontaire du sujet. Evidemment, il leur est chaudement recommandé d’être du côté du manche.

  27. Qui c’est ce connard ?

    Dans la Provence de ce matin, un autre distingué sociologue, Laurent Mucchielli, affirme qu’en termes de délinquance, « Marseille n’arrive pas toujours en tête : « Ceci n’existe pas », martèle-t-il. »
    Si ! Et de fustiger « les sottises de Montesquieu sur la théorie des climats ».
    Ecoutez qui cause !

  28. Notre République française possède-t-elle les quatre vertus thymotiques que Platon définissait dans sa République: prudence, force d’âme, tempérance, justice ?
    Réponse, non ! Car ce sont les ambitieux sociologues de think-tanks qui la dirigent, troupeau d’infidèles pourtant classés comme caricatures de la plus vile populace. Il faut cependant moduler notre jugement et savoir trouver des qualités à la dictature car pour qu’une politique fonctionne pour le bas-peuple, il faut nommer des dirigeants à vie, ériger des émetteurs en surnombre, des relais hertziens à chaque coin de rue, glorifier des journalistes lèche-cultes, distribuer des télévisions, des tablettes et des portables pour tous. Ne pas oublier de bourrer les urnes de temps en temps pour des élections arrangées et pour maintenir à flot un suspense intrinsèque à toute démocratie, la ligne de flottaison étant la frontière où le contribuable aime à se faire peur ou plaisir selon le côté où il se trouve.
    Est-ce que la République brighelienne possède les vertus cardinales de prudence, force d’âme, tempérance, justice ?
    Réponse, oui ! Car elle est aux mains de remarquables aristocrates littéraires, patrimoine de ce blog, classés monuments historiques, nous les connaissons tous. Bien que certaines statues indéboulonnables de ce blog ignorent encore que la session de septembre a été déplacée en juin depuis belle lurette.

  29. http://www.lepoint.fr/invites-du-point/jean-paul-brighelli/brighelli-les-enseignants-absents-ou-absenteistes-05-03-2016-2023156_1886.php

    JPB ou le Don Quixote moderne, qui, sang chaud, pensa pouvoir ébranler les moulins de la pensée populaire au sujet des profs absents! Niakavoir les commentaires du Point…les poncifs ont la vie dure!
    Bon courage…gardons, dans les coffres bien fermés de notre vécu, les rares témoignages de parents reconnaissants. Pour le reste et le vulgum, circulez!
    😉

  30. M. Brighelli, excellent post, comme souvent. Vous souvenez vous seulement que l’étroitesse d’esprit que vous reprochez à Bhl fut la votre lors l’affaire dieudonne ? N’avez vous pas vous aussi condamné un peu rapidement un humoriste en le taxant d’antisemite pour quelques malheureuses blagues mal comprises…On reproche souvent à son ennemi la paille qu’il a dans l’œil et on oublie souvent que la poutre que l’on dans le sien déforme notre vision des choses

    • A dieudonné, vous ne regardez pas les dents. C’est un tort.

      D’étranges ombres passent sur ce blog qui laissent une impression d’officines romarines dans nos narines

  31. Il faut instituer le système Puy-du-Fou à l’Education nationale : tout le monde tire la brouette et seul le plus fou est couronné roi.

  32. Je me dépêche de poster avant que beaucoup d’entre vous partent à la grand-messe.

    L’article de JPB dans le Point n’a malheureusement qu’une portée partielle et élude le problème de la présence « réelle » de l’enseignant dans son eple.

    Car, en vérité, je vous le dis, c’est une question religieuse (catholique) du même ordre que celle de la « présence réelle » du Christ dans l’eucharistie. L’enseignant exerçant (dans) son Ministère, même s’il n’est plus localement (spatialement) présent comme dans un vulgaire cours, doit être présent spirituellement partout et tout le temps. Corps et âme diraient les mécréants qui réduisent tout à l’intelligible.

    C’est le Sens de la Réforme (pas celle des protestants, celle de véritables adhérents au Grand Mystère de l’Innovation).

    Est-il nécessaire de conclure en insistant sur le mépris de l’argent qui doit nous animer ? Nous devons apprendre à trahir pour rien et vivre réellement du denier de l’inculte (le concile des Trente deniers ayant scellé la question pour longtemps).

    • Instituons le S.T.O.E pour préparer la relève !

      Lexique des sigles : service du travail obligatoire de l’enseignant pour relever les ardentes obligations morales de la jeune génération ; tous aux chantiers de l’éducation nationale comme disait la générale Belkacem de la Porte de la rue de Grenelle !

    • Très drôle, Dugong. Vraiment. D’ailleurs les cloches sonnent en ce moment chez moi et nos bigots défilent sous la fenêtre au grand dam de mon chien qui, je ne sais pourquoi, aboie systématiquement. Peut-être parce que je ne donnai point au denier de l’inculte ( ça j’ai beaucoup aimé ).

  33. Ce qui était remarquable dans la NRF première manière (revenons au thème de l’article) c’est qu’on n’y redoutait pas le débat d’idées ; on rejetait juste la littérature de boulevard (du crime) style Edmond Rostand … qui plait tant à l’illustre Brighelli capitaine des mousquetaires du roi de la compagnie de l’enseignement national.

    ….

    Henri Béraud joyeux drille auteur du « Martyr de l’obèse » appelait cela la « Croisade des longues figures » pour stigmatiser le côté protestant de la NRF. Mais elle accueillait aussi le baroque Claudel et le jeune et exotique Saint-John Perse avec son « Anabase » et le téméraire Péguy comme le dilettante Larbaud traducteur émérite des écrits anglais.

    Elle « supportait » donc diverses formes littéraires concurrentes et plus tard même s’ouvrit au genre policier avec des collections particulières … après tout le crime paye bien !

  34. Les écrivains – ces solitaires du vice impuni – sont souvent des monomaniaques dont la douceur cache des fureurs rentrées et qui se précipitent à tors et travers dans la politique la plus sommaire parfois … et quand les temps sont tangents on en voit qui payent chers leur indépendance s’ils n’ont pas trouvé d’habiles et puissants protecteurs !

    C’est l’histoire littéraire de toujours ! On connaît la célèbre épitaphe du cardinal de Richelieu par le grand Corneille : »Il m’a fait trop de bien pour en dire du mal, – Il m’a fait trop de mal pour en dire du bien » !
    C’est un assez bon résumé de la vie publique de l’écrivain sous les feux des projecteurs !

  35. J’aime beaucoup ce blog! Il m’évoque, en lisant la prose bilieuse des anticléricaux, mes très jeunes années, bercées par les derniers rayons d’un de ces hussards noirs de la République.
    Souhaitons que l’âge moyen de ces reliques d’une époque disparue frise les 120 ans, ce serait une belle preuve de vigueur physique et intellectuelle.
    Hâtez-vous, chasseurs de bigots: l’espèce est en voie d’extinction!
    IL serait presque regrettable que vous ne fussiez parti, étant jeunes encore, habiter au paradis de l’areligiosité, l’URSS. Vous eussiez trouvé dans cet empire défunt de quoi aiguiser vos canines et sustenter votre appétit revanchard.

    Sans haine et sans reproches, passez un bon Dimanche!
    🙂

    • Le Vatican ou * le Kremlin ? Vingt dieux !

      Quand un régime religieux fera péter une charge nucléaire **, Staline passera enfin pour un petit joueur.

      Ça viendra dans ce siècle pou le suivant, il faut juste être un peu patient.

      * ou exclusif, bien sûr
      ** A, H ou Sale : cochez la case souhaitée

      PS : Allez ! Un scoop rien que pour vous : les grues remontent par centaines vers le Nord. Fin de l’hiver.

  36. Harnoncourt vient de casser sa baguette.

    On craint une vague de suicides de masse chez les baroqueux.

    Genre Temple Solaire…

  37. Tiens, comme je corrige des copies, je suis d’humeur à confider.

    J’ai découvert la version « originale » des Carmina Burana par le Clemencic Consort à la fin des années 70 alors que la dictature des cris d’Orffraie faisaient mouiller les futurs bobos qui y voyaient une façon d’éprouver les frissons de la grandiloquence à pas cher.

    Mode vieux khon off.

  38. Dugong joue avec mon coeur dans son dernier commentaire, mais je le rassure tout de suite, j’y suis moins sensible qu’étonné. J’écoute encore à l’occasion les cinq vinyls de cette oeuvre ressuscitée par René Clemencic (*) que possèdent mes parents. Harmonia Mundi avait édité des pépites à cette époque, telles que les détournements musicaux de Gerard Hoffnung, qui sont les transcriptions sonores de ses délires croquis-gnolesques.
    Un petit coup de gnole pour la route, rien que pour vous en écoutant si vous le pouvez ses concerts Music Festivals:
    http://imaginaryinstruments.org/the-imaginary-instruments-of-gerard-hoffnung/
    (*) J’informe mon autre greluche persécutrice qu’on y rote et qu’on y pète pour de bon en latin médiéval ce qui risque de choquer ses chastes oreilles embouchées au bel canto.

  39. PS : Allez ! Un scoop rien que pour vous : les grues remontent par centaines vers le Nord. Fin de l’hiver.

    Il y a déjà plein de primevères…et les hortensias, pas plus en avance que les années précédentes, demandent à ce qu’on leur coupe la tête.
    Ciel ! Que de babillages.
    C’est ce qu’on appelle avoir de la conversation .

    • A l’annonce de cette conférence, tout le marigot politiquement-correct se déchaîne sur neoprofs. Trop drôle! Ce sont les mêmes âmes pures qui ne sont même pas capables f’avoir la peau de la réforme du collège !

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