Je n’ai pas encore lu la dernière livraison[4. Le Conflit – Flammarion Lettres- Février 2010] d’Elisabeth Badinter mais elle fait parler d’elle. J’avais apprécié « Fausse route »[1. Odile Jacob – Avril 2003]. Ce n’est guère étonnant : avec ce livre là, elle s’était mise à dos ses copines féministes et était remontée dans l’estime de bien des machos. Est-ce pour se rattraper qu’elle revient ainsi à ses premières amours ? Certainement pas ! Elisabeth Badinter ne fait pas dans le marketing.
Avec son conflit entre la Mère et la Femme, Badinter s’en prend aux écolos. Sous couvert de naturalisme, en préconisant allaitement et couches lavables, ces derniers culpabiliseraient les femmes. Le problème, c’est qu’il y a écolo et écolo. En montrant du doigt certains d’entre eux, la philosophe pourrait très bien, involontairement, mettre le feu à la maison verte.
Plantons le décor. A ma gauche, des écolos venus du gauchisme et de l’esprit de mai, des compagnes ou compagnons de route des féministes des années 70. Leur tête de proue s’appelle Dominique Voynet. A ma droite, la nouvelle génération, celle des trentenaires des centre-villes qui ont voté Europe Ecologie en juin dernier. Ils se retrouvent sans peine dans Cécile Duflot, mère de quatre enfants. Les premiers prêchent non seulement le féminisme mais mettent en garde contre le natalisme, et souhaitent même le combattre. Les seconds, qui n’ont pas vécu les combats de leurs prédécesseurs font passer Gaïa avant tout. Tout ce qui est naturel, non polluant et biodégradable leur semble préférable. Les couches jetables, donc, c’est mal. On préconise la couche lavable même si c’est revenir quelques décennies en arrière. Pourquoi pas le lavoir ?
Bien sûr, les dames écolos trentenaires ne préconisent pas le retour de la femme au foyer. Elles comptent sur leurs compagnons pour les aider devant le surcroît de servitudes qu’impose ce retour au naturel. Ces derniers, lorsqu’ils partagent le même engouement que leur compagnes, participent donc au lavage des couches en question pendant qu’elles se rendent à leurs rendez-vous chez le sophrologue[5. Droits réservés : Jérôme Leroy] ou leurs courses à Nature et Découverte. Mais on peut tout de même pousser leur raisonnement jusqu’au bout. S’ils étaient conséquents, ces nouveaux écologistes se méfieraient aussi de la pilule, de la capote en polyuréthane et donc non biodégradable et finiraient par rejoindre Christine Boutin dans la préconisation de la fidélité et de l’abstinence, autant de positions, si l’on ose dire, non polluantes, si l’on ose dire aussi. Benoît XVI, icône des nouveaux écologistes ! La nouvelle pourrait faire du bruit au Grand Journal, à Télérama et chez Les Inrocks et diviser durablement leurs rédactions.
Mais ceux qui ne sont ni écologistes ni féministes, que peuvent-ils faire à part s’amuser des futures passes d’armes dans un mouvement écolo qui ne pourra plus taire longtemps ces divisions structurelles ? Car, tout de même, le Grenelle, il est pour tout le monde. On a échappé de peu à la fameuse taxe sur les couches jetables, idée de l’écolo high-tech de droite, NKM. Mais pour combien de temps ? Elisabeth Badinter n’a pas tort de s’alarmer d’une telle mesure en déclarant qu’il s’agirait d’un recul pour la condition de la femme. Seulement, elle aurait pu ajouter que certains hommes pourraient aussi avoir à le regretter. Quand on s’occupe de ses enfants pendant les vacances scolaires alors que l’épouse travaille dans le privé, il peut arriver que l’on pense que certains progrès fustigés par Mesdames Duflot et Kosciusko-Morizet peuvent profiter à nous aussi, les hommes, et, accessoirement, nous laisser du temps pour rédiger ce billet.
Les trentenaires, victimes de leurs mères féministes, ne voudraient pas, qu’on se le dise, être aussi victimes de l’écologisme débridé des femmes de leur génération[2. Message personnel à E. : c’est bien beau de fustiger Madame Badinter. Mais il faudrait peut-être aussi penser aux hommes de 10 à 20 ans vos cadets qui n’y sont pour rien et perdent sur tous les tableaux. Sans rancune, néanmoins !] . N’avoir ni le beurre, ni l’argent du beurre et encore moins le sourire[3. On aura remarqué la sagesse de l’expression.] de la crémière, c’est pas une vie.
Très drôle, et particulièrement bien vu : on ne dira jamais assez que les formes modernes d’écologie visent à nous rejeter dans un Moyen Age assez glauque — sauf, bien sûr, pour les bobos écolos des bons arrondissements, qui trouveront toujours des esclaves pour porter les couches au lavoir. Il est significatif de voir que ce que l’on veut nous vendre comme idéologies nouvelles réveille en fait les structurations les plus archaïques, celles qu’on pensait justement dépassées — à l’école comme dans le couple. Rien d’étonnant dan e contexte à ce que Meirieu soit candidat Vert : les archéos parlent aux archéos — sans le savoir.
Les féministes façons Badinter et celles façons Duflot et NKM sont toutes les deux à côté de la plaque. Elles n’ont jamais rendu vraiment service aux femmes.
La maternité fait bien partie de la femme, n’en déplaise à Mme Badinter mais il n’empêche que la couche jetable libère la mère donc la femme. Nous ne sommes pas des servantes, non mais !
Et puis toute cette eau pour laver des couches lavables, ce n’est pas très écologique …
Et si on fabriquait des couches bio dégradables ! Tiens, au fait, pourquoi les Anglais disent « organic » quand les Français disent « bio » ?
Je fais mon compost. J’y mettrais les couches.
On ne parle que des couches en ce mois de février, et pourquoi pas des serviettes périodiques ? Je vois, on s’en tamponne ! Ah ! les serviettes qui trempaient dans le bidet ! c’est à partir de ce spectacle que pouvait débuter l’éducation sexuelle du temps de ma jeunesse.
…sans parler des pollutions nocturnes, interdites par Benoît XVI !
Sinon, au catalogue, vous oubliez que les hommes, les vrais, (c’est à dire ceux qui ne rechignent pas à verser une larme quand le club de leur coeur s’enfonce dans la défaite), se voient tranformer en kangouru avec cette mode de porter les bébés en écharpe…
les féministes BCBG,,,,,,,je vais vous donnez 1058 euros;le smic,
vous allez bosser,et apres vous pouvez parle,,,de la vie réel des françaises,
il y en a marre de ces féministes friqué ,
qui se prenne pour le nombril du monde,
j »aimerais bien voir ces femmes les deux mains dans la merde et oui
en lavant ces couches et le reste
@ Abraxas
« On ne dira jamais assez… »
Ben si, on le dit déjà beaucoup trop, parce que c’est faux. « Les formes modernes d’écologie » Lesquelles ?
@ michel
« les féministes BCBG… » Selon votre raisonnement, ce serait : les écologistes BCBG puisqu’en l’occurence les féministes disent le contraire.
Les couches jetables sont un mauvais exemple, non représentatif des produits jetables en général par leur impact cosidérable sur la vie quotidienne, les rapports hommes / femmes, la division des tâches. Mais ça n’empêche pas que globalement, les produits jetables signifient des montagnes de détritus qui s’accumulent ou une forte production de CO2 par les incinérateurs ou encore beaucoup de transport et d’énergie pour le recyclage. Et la plupart ne servent quasiment à rien. Donc c’est un peu malhonnête de choisir comme exemples justement ceux qui ont une utilité quasi-irremplaçable comme les capotes ou les couches et qui ne représente qu’un peorcentage assez infime du volume total de déchets.
Encore un billet rempli de bons mots pour mieux fustiger les « écolos bobos », le fameux « retour au Moyen-âge » aussi que l’on nous ressert bien souvent, manque encore les fameux « ayatollahs écolos » ou les « khmers vert » qui veulent nous faire « revenir à l’âge de pierre ». On ricane, on se gausse, on se défausse aussi. POur mieux ne rien faire. Ah les fameux bobos qu’est-ce qu’ils peuvent prendre, au prix de confusion assez aberrante (on mélange, l’écolo, les inrocks, les féministes, les trentenaires, le pape) assez habile dans le style mais dénué de sens.
Tout cela pour mieux éviter de se poser de vraies questions et de réfléchir aux vraies questions. Vous dites que ces écologistes font passer Gaïa avant tout : c’est justement l’inverse. La Terre, les écolos, les non écolos, elle s’en fout. Si demain il n’y a plus d’eau potable et qu’il fait 100°C sur Terre, la terre elle sera toujours là, et elle se foutra bien des couches jetables.
Et quand E. Badinter parle de l’eau utilisée pour laver les couches ‘lavables’, cela se voit qu’elle n’y connaît rien car l’ACV des différents types de couches a été calcuclé, et manque de bol l’impact des couches lavables est bien meilleur.
Quant au billet du blog sur les hommes, oui je pose moi-même la question : où sont les hommes? J’en suis un moi-même et je dois dire que je suis assez affolé de voir que lorsqu’on a des enfants, c’est vraiment socialement le beau rôle d’être un homme. Vous êtes une femme? On vous demande comment vous vous organisez pour la garde, comment vous gérer votre travail, si vous aller vous arrêter pour prendre un congé parental, vous mettre au 4/5e, si vous allaitez… VOus êtes un homme? Vous donnez un biberon une fois et on vous tresse des lauriers « quel homme admirable, comme il AIDE bien ». Cherchez l’erreur. Le problème est là, tant que ces inégalités flagrantes (d’ailleurs de la faute des hommes ET des femmes) perdureront et que des bloggeurs oseront des inepties très zemmouriennes sur le thème « comment les femmes osent-elles nous laisser nous dépatouiller dans les couches pendant qu’elles vont chez le sophrologue ».
Je suis désespéré et me sens bien isolé, mais tant pis.
pour repondre à Florence, non , la maternité ne fait pas obligatoirement partie de la femme….
On peut etre une femme ,et ne pas desirer etre mère …
La maternité peut faire partie de notre vie, mais on n’en est pas moins une femme, si cela n’est pas le cas…
liliAlaexandre
bien sûr !
Mais la maternité n’abaisse pas la femme. Elle fait partie de la femme, que celle-ci la choisisse ou ne la choisisse pas.
Merci Arthur d’énoncer des faits en réponse aux stupidités du type « les formes modernes d’écologie visent à nous rejeter dans un Moyen Age assez glauque ». Ce qu’Abraxa et les autres ne comprennent pas c’est qu’il y a toute une génération d’écologistes nés après 68, qui en a parfaitement intégré l’héritage, et qui tout en appréciant le surcroit formidable de liberté individuelle que la génération des baby-boomers a apporté, pense qu’au regard de la réalité sociale et environnementale qui en est née, cela ne suffit pas, et qu’il faut replacer la notion de liberté de l’individu dans un cadre plus large de responsabilité.
La réaction d’agacement à cette exigence, vient généralement d’esprits qui ne l’ont pas encore intégrée, et pensent qu’il s’agit d’une régression alors c’est en réalité une recherche d’harmonie de l’individu avec un contexte dont il se sent désormais à la fois responsable et tributaire. S’y opposer par crainte d’un retour « au Moyen-âge », c’est comme penser qu’un jeune qui s’est émancipé (en quittant son foyer, en fumant, buvant en apprenant à penser par lui-même, et en devenant autonome), risque de redevenir un enfant s’il apprend à être responsable, à fumer mais sans se foutre en l’air, à pouvoir boire sans tuer quelqu’un sur la route, à considérer l’existence des autres et les conséquences de ses actes. Comme tous les mouvements de civilisation précédents (culture animiste, culture de la guerre, culture religieuse, et aujourd’hui culture libérale), l’écologie deviendra un jour dominante, elle régentera le monde tout en intégrant les précédentes étapes de developpement civilisationnel (dont 68), et elle finira par se caricaturer elle-même et susciter un ras-le-bol légitime. Mais on en est encore très, très loin…
Diogène, marchant à midi entre les stands d’un marché bio une lanterne allumée à la main, dirait aujourd’hui : « Je cherche une femme ».
@Florence
17.02.10 à 10:13
« La maternité fait bien PARTIE de la femme, n’en déplaise à Mme Badinter mais il n’empêche que la couche jetable libère la mère donc la femme. Nous ne sommes pas des servantes, non mais ! »
@liliAlaexandre
bien sûr !
« Mais la maternité n’abaisse pas la femme. Elle fait PARTIE de la femme, que celle-ci la choisisse ou ne la choisisse pas. »
Le machisme, les principes culturels traditionnels, préconisent que la maternité, c’est la femme. Que la femme se résume à son utérus ; que la maternité DEFINIT la femme, et que la maternité est un horizon indépassable, pour les femmes ; et c’est là, la seule chose que nous, les féministes, hommes et femmes, nous contestons.
Pour nous, la maternité est UNE PARTIE de l’identité de la femme… c’est un CHOIX possible de la femme.
Il y a une différence entre « faire PARTIE de la femme », et professer traditionnellement que la « maternité = femme » (que la fonction maternelle EST la femme).
Merci ArthurM et Antoine d’avoir cassé ces idiots.
Comme vous le dites bien, ils se moquent pour pouvoir mieux ne rien faire: attitude ironique, sceptique, nihiliste, malade, pessimiste, égoïste. Ce qu’ils pensent en fait, c’est: « continuons comme ça, on verra bien ce qui se passera. De toute façon, qui ne justifie qu’on nous enlève notre confort. Les femmes étaient esclaves du lavoir. Nous avons dépassé ce stade et nous n’y reviendrons pas. » Alors continuons comme ça.
Mais « ça » se passe déjà: béton partout, laideur grise, étalement urbain créant des excuses de « dépendance » à la bagnole (on a pô ben l’choâ), air irrespirable…
La laideur du monde choque peu les jeunes, ils veulent « la » voiture, pas une voiture.
Qu’une voiture, en elle-même, ne choque pas, c’est une abdication devant toute possibilité de considérer l’existence d’un point de vue esthétique. L’ère du jetable est une conséquence « normale » d’un passé qui rendait esclave du lavoir. Soit, alors continuons de brûler des matières toxiques, c’est mieux. On verra bien ce qui se passera. Les scientifiques s’occupent de tout, n’est-ce pas? Ils vont trouver comment nettoyer l’air… C’est logique puisque ce sont « les » scientifiques.
avec correction des fautes:
Merci ArthurM et Antoine d’avoir cassé ces idiots.
Comme vous le dites bien, ils se moquent pour pouvoir mieux ne rien faire: attitude ironique, sceptique, nihiliste, malade, pessimiste, égoïste. Ce qu’ils pensent en fait, c’est: « continuons comme ça, on verra bien ce qui se passera. De toute façon, rien ne justifie qu’on nous enlève notre confort. Les femmes étaient esclaves du lavoir. Nous avons dépassé ce stade et nous n’y reviendrons pas. Alors continuons comme ça. »
Mais « ça » se passe déjà: béton partout, laideur grise, étalement urbain créant des excuses de « dépendance » à la bagnole (on a pô ben l’choâ), air irrespirable…
La laideur du monde choque peu les jeunes, ils veulent « la » voiture, pas une voiture.
Qu’une voiture, en elle-même, ne choque pas, c’est une abdication devant toute possibilité de considérer l’existence d’un point de vue esthétique. L’ère du jetable est une conséquence « normale » d’un passé qui rendait esclave du lavoir. Soit, alors continuons de brûler des matières toxiques, c’est mieux. On verra bien ce qui se passera. Les scientifiques s’occupent de tout, n’est-ce pas? Ils vont trouver comment nettoyer l’air… C’est logique puisque ce sont « les » scientifiques.