L’ancien premier ministre se pose en rempart contre la corbynisation du PS

Ceux qui voyaient dès décembre Benoît Hamon en Fillon de la gauche, déjouant les pronostics, avaient donc raison. L’ancien ministre de l’Education nationale a donc viré en tête du premier tour de la primaire de la belle alliance populaire. Il devance Manuel Valls de cinq points et, surtout, il réalise le double des voix d’Arnaud Montebourg, relégué peu ou prou à son score de 2011. Tout ça pour ça. L’ex-député de la Bresse n’a pas mené une bonne campagne. Il s’est sans doute trop persuadé que son plus grand adversaire était lui-même et a tenté à tort de gommer son côté Cyrano, adoptant une attitude policée dans les débats télévisés. On se souvient de la parabole de Marie-France Garaud servie à son poulain Chirac dans les années 70 : l’histoire de ce vendeur de dentifrice qui en atténuait le goût piquant, perdant ainsi sur les deux tableaux. Lors du dernier débat, il aurait pu suivre l’exemple de Fillon en mettant les pieds dans le plat à un moment où le sujet ne l’intéressait pas. Il aurait pu réaliser ce coup d’éclat et ramener vers lui les projecteurs lorsque les animateurs ont souhaité faire passer de longues minutes sur la question du congé paternité. L’avocat éloquent a raté le coche. Il aurait pu en profiter pour expliquer la manière dont il allait casser la vaisselle à Bruxelles. Dommage. A entendre son directeur de campagne Kalfon pendant la soirée électorale, il n’en était pas question. Montebourg bridé n’est pas Montebourg. Il retournera donc cultiver son jardin, comme il l’avait promis. Passons rapidement sur Vincent Peillon dont la campagne calamiteuse a fini comme prévu avec un score à un chiffre, pour en arriver à Manuel Valls.

 Contrairement à ce que l’on a pu entendre sur les plateaux, Manuel Valls n’est pas mort. Il bouge encore. Et il s’est montré particulièrement offensif lors de son intervention. L’ex-premier ministre a martelé l’alternative de dimanche prochain : « défaite assurée ou victoire possible » pour le candidat du PS. Son adversaire, c’est un Corbyn à la française. Il a appuyé sur la laïcité, l’égalité hommes-femmes et les lieux dont ces dernières sont exclues dans certains quartiers. L’allusion aux déclarations de Benoît Hamon sur les cafés ouvriers était claire. Il se chargera de les expliciter dans les prochains jours. Il attaquera aussi Hamon sur le coût du revenu universel, lequel fut l’idée-phare du député de Trappes, mais qui pourrait aussi s’avérer moins avantageuse dans une confrontation à deux. Il n’est pas certain que tous les électeurs d’Arnaud Montebourg, sensibles à la valeur travail, écoutent les consignes de l’éternel troisième homme. Manuel Valls a commencé à leur parler et il va poursuivre sur sa lancée. Manuel Valls sait aussi pouvoir disposer de marges chez ceux qui n’ont pas voté ce dimanche. A vrai dire, il n’est pas étonnant qu’il ait déclaré qu’il était très heureux d’être confronté son ancien compagnon de route rocardienne. Peut-être même préférait-il pour ce premier tour, cette deuxième place derrière Hamon qu’une première devant Montebourg, tant la question du revenu universel rend les reports de voix beaucoup plus hasardeux entre les deux candidats de l’aile gauche dans ce cas de figure. Dimanche, Emmanuel Macron sera supporter de Benoît Hamon et Jean-Luc Mélenchon préférera une victoire de Manuel Valls. On saura alors qui des deux sera le véritable vainqueur de cette primaire. Sachant que le PS en sera obligatoirement le perdant, après avoir décidé soit de sa « corbynisation » soit de sa « pasokisation ».