Le bruit, la fureur et le fracas, c’est fini
Jean-Luc Mélenchon lors du débat présidentiel à 11 candidats du 4 avril 2017. SIPA. AP22036293_000001
Un regret d’abord. Pourquoi mesdames Ferrari et Elkrief se comportaient parfois comme des candidates ? Je veux bien croire qu’un débat à onze n’est pas aisé à arbitrer. Mais justement pourquoi se permettaient-elles de donner leur avis par questions voire affirmations interposées ? Puisque des débats télévisés d’avant premier tour sont aujourd’hui un acquis, que les animateurs restent animateurs et se cantonnent au rôle de faire respecter les temps de parole et d’éviter les hors-sujets. Ce ne sont pas les journalistes qui ont passé des mois à trouver les cinq-cents parrainages et les téléspectateurs se fichent pas mal de leur avis.
Une satisfaction, ensuite. Je m’étais refusé à regarder le débat à cinq protagonistes, et donc à le commenter. Il faut remercier les deux chaînes d’information continue d’avoir organisé ce débat qui n’excluait aucun candidat, et qui permettait à chacun de pouvoir interpeller ses concurrents.
Deux candidats comptaient beaucoup sur ce débat où ils pouvaient laisser leurs derniers espoirs. François Fillon et Benoît Hamon avaient justement forgé leurs victoires respectives aux primaires lors des débats télévisés. A ce jeu-là, c’est sans doute Benoît Hamon qui s’en est le mieux tiré des deux, faisant preuve d’une combativité inhabituelle, notamment vis-à-vis de de Jean-Luc Mélenchon et Marine Le Pen. François Fillon a démarré le débat sur un ton larmoyant et il a ensuite fait preuve de nervosité et parfois de mépris par rapport à certains contradicteurs. Son attitude par rapport à Nicolas Dupont-Aignan, notamment, pourrait bien lui causer du tort dans l’éventualité où il se qualifierait pour le second tour.
Emmanuel Macron a joué en défense, un peu comme Alain Juppé lors des débats de la primaire de droite. La position de favori n’est pas la plus facile qui soit, mais cette tactique n’avait pas réussi au maire de Bordeaux. Macron compte davantage sur l’émission de jeudi soir sur France 2. Marine Le Pen a semblé sur la réserve elle aussi, se positionnant d’ores et déjà en candidate de deuxième tour. Sa conclusion était plutôt réussie, à cet égard. Jean Lassalle et Jacques Cheminade ont fait le spectacle, à l’instar de Jean-Luc Bennahmias lors de la primaire socialiste.
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Leur authenticité a apporté des couleurs à l’émission. François Asselineau fut fidèle à lui-même. Il a cité beaucoup d’articles de textes divers, se montrant un élève appliqué, et a parfois lancé des flèches acides à certains de ses adversaires, en particulier ceux qu’il considère comme de faux eurosceptiques.
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Il est difficile de séparer Nathalie Arthaud et Philippe Poutou tant leurs interventions étaient similaires, bien que provenant de partis historiquement séparés. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’ils n’ont guère surpris ni par leurs tons respectifs ni par leurs prises de positions. Nicolas Dupont-Aignan a marqué quelques points, notamment en début de débat où il a donné l’impression de prendre la place d’opposant numéro un à Emmanuel Macron, laissant Marine Le Pen et François Fillon spectateurs. C’est finalement Jean-Luc Mélenchon qui a sans doute le mieux tiré son épingle du jeu. Serein et pédagogue, il semblait sur la lancée de ses meetings du Havre et de Châteauroux. Qu’on se le dise, le bruit, le fracas, la fureur, c’est bien fini. Mélenchon veut incarner la sagesse. Il n’est pas interdit de penser que cette attitude lui réussisse et que le débat d’hier soir entretienne sa dynamique actuelle.