Choquer les médias, un bon plan pour gagner  le peuple de droite !

 

En juin dernier, nous nous interrogions sur les raisons qui conduisaient François Fillon à laisser le parti à son rival Copé après que ce dernier lui avait volé la victoire huit mois plus tôt devant la France entière. Nous nous montrions sévères à son égard, jugeant sa stratégie complètement illisible  car il remettait ainsi son rival en lice. Il nous manquait une pièce au puzzle. Cette pièce, l’ancien premier ministre l’a posée sur le jeu dimanche dernier en dévoilant sa feuille de route jusqu’à l’automne 2016, date de la primaire que l’UMP doit organiser pour désigner son candidat à la prochaine élection présidentielle.

En fait, François Fillon fait l’analyse suivante : l’organisation de la primaire étant actée, il ne lui sert plus à rien de perdre son temps à diriger un appareil. Il lui suffit d’entrer en campagne dès maintenant et d’entamer un dialogue avec tous ceux qui pourraient participer à cette élection d’un nouveau genre à droite. Il fait le pari d’une participation aussi forte que celle organisée par le PS et allant bien au-delà des élus, adhérents et même sympathisants de l’UMP. Parler à tout le “peuple de droite”, est donc devenu sa préoccupation première, afin d’en devenir le champion incontestable et – soyons fous ! – incontesté. Sa campagne pour la primaire 2016 a débuté sur les chapeaux de roue cet été avec des opérations de com tous azimuts. Elle a continué dimanche avec cette volte-face qui a surpris Jean-François Copé et certainement aussi Nicolas Sarkozy, sur l’attitude à avoir en cas de duel FN-PS. Alors qu’il préconisait lors des élections cantonales de 2011 de préférer le candidat du Parti Socialiste, il explique désormais qu’il faut appeler à voter pour le candidat le moins sectaire, ajoutant, relancé par le journaliste qui l’interrogeait, que ce ne serait pas forcément celui du PS.

Alors que certains de ses soutiens, comme Valérie Pécresse, disaient ne pas comprendre ce que pouvait signifier cette phrase, il a donc persisté et signé vendredi soir. En une semaine, en brisant un tabou qui fait hurler de rage Harlem Désir[1. Dont on se demande, au passage, pourquoi il a si peu de foi dans le non-sectarisme des futurs candidats présentés par le parti qu’il dirige…], il a ainsi semé le trouble parmi les caciques de l’UMP, tels Alain Juppé ou Jean-Pierre Raffarin, lequel a lancé samedi une “alerte rouge” sur Twitter. C’est dire si l’affaire est grave ! Quant à Copé, meurtri de voir ainsi son pain au chocolat jeté aux oubliettes médiatiques, il a rappelé la règle officielle au sein de l’UMP : en cas de duel FN-PS, c’est ni-ni. Fillon s’en fiche. En une semaine, il a piqué à Copé et à Sarkozy le marché de la fameuse droite décomplexée, sans même utiliser le mot. Les électeurs de droite sont en effet majoritairement favorables à une telle stratégie surtout parmi les plus politisés et mobilisés, c’est-à-dire ceux qui se pourraient se déplacer pour voter à la primaire de 2016.

 

Cette stratégie, pour lisible qu’elle soit devenue, convainc définitivement de la détermination de François Fillon d’aller jusqu’au bout de son ambition présidentielle. Le velléitaire qui était en lui est mort et enterré. On ne voit pas en effet pourquoi il aurait brisé le tabou suprême aux yeux des médias, et choqué ses proches, pour renoncer à être candidat dans trois ans. Mais la tactique n’est pas sans risque. Tout repose en effet sur le succès de la primaire de 2016. Et rien ne dit, pour l’instant, qu’elle en connaîtra un de même ampleur que celui de l’automne 2011 où Hollande avait battu la première secrétaire du Parti socialiste. Plus récemment, l’expérience de la primaire UMP parisienne – un vrai flop en terme de participation- montre que l’électeur de droite ne se déplace pas aussi bien que celui de gauche dans ce genre de grande messe démocratique. Si la primaire ne mobilise que le noyau dur des sympathisants UMP, Copé aurait un avantage certain, d’autant qu’il aurait placé des pions importants dans les batailles électorales locales de 2014 et 2015. Et si Copé  (ou un autre) était finalement battu par Fillon dans un contexte de participation faible, Nicolas Sarkozy pourrait profiter du flop de la primaire pour se présenter directement devant les Français, arguant de la très faible légitimité de la victoire de Fillon, poussant le vice d’en appeler à l’esprit originel des institutions créées par le général de Gaulle, ce qui ne manquerait pas de sel, avouons-le.

 

Le pari de Fillon est risqué mais au moins a-t-il -enfin !- commencé à jouer. Ses proches, au lieu de se lamenter, devraient s’en féliciter.

3 commentaires

  1. Le pari est d’autant plus risqué que le « peuple de droite » aura du mal à croire que Fillon s’est décomplexé si vite (il n’a pas tout suivi), et pourra préférer des originaux à la pâle copie.

  2. Ajoutons, même si c’est moins spectaculaire, que Fillon a pris position contre l’aventure américano-kataro-arabo-saoudite en Syrie dans laquelle Hollande voulait nous entrainer.

    Comme dit Zemmour : il s’est enfin rappelé qu’il fut séguiniste.
    Au moins, il a pris sur ce sujet ses distances avec la droite atlantiste (Copé, Sarkozy, …) à laquelle Juppé s’est rallié avec armes et bagages.

    Un constat de la part d’un quasi septuagénaire.
    Depuis 60 ans, chaque fois que les socialistes sont au pouvoir, ils cherchent à nous entrainer dans une aventure militaire qui n’a rien à voir avec les intérêts de la France (Guy Mollet et Suez, Mitterrand et le Golfe, Jospin et la Serbie, maintenant Hollande).

    Et comme d’habitude, ils font des amalgames avec le nazisme.
    Ainsi, en 1956, Mollet qualifiait Nasser de « nouvel Hitler ».
    Au moment où le même Mollet, secrétaire général de la SFIO, réintégrait dans son parti ceux qui en avaient été exclus pour leur attitude pendant l’Occupation.
    Mais, il est vrai que le double langage est dans la nature des socialistes (et des verts : « verts-kaki » sur la Syrie comme sur le Kosovo).

    Quant à Hollande, il passe son temps à « se coucher » face aux États-Unis.
    La pitoyable affaire de l’interdiction, sur injonction de Washington, du survol de la France par l’avion du président bolivien Morales (juillet) en est une preuve déplorable.

    Oh ! Sarkozy-l’Américain (adoubé comme futur candidat par Bush en 2006) aurait fait de même.
    Mais, j’imagine mal De Gaulle (et probablement Chirac) obéir aux injonctions de ceux dont Snowden a démontré qu’ils nous espionnent en permanence.

  3. Décidément, Fillon frappe fort.

    Lui qui était partisan d »un « front républicain » contre le FN dit maintenant (sous les hurlements des bien-pensants) qu’il peut arriver qu’un membre du FN soit moins sectaire qu’un membre du PS.

    Quoique chacun pense des politiques respectives du PS et du FN, l’objectivité oblige à constater que Harlem Désir, David Assouline, Laurence Rossignol ou l’inévitable Caroline de Haas (1), tous PS sont 100 fois, 1000 fois plus sectaires que Florian Philippot du FN.
    (Je sais, on pourrait aussi citer des cas inverses).

    Sur le fond, Fillon a fait encore « plus fort » : il a défendu la nécessité de bonnes relations avec la Russie et a critiqué la politique de Hollande en Syrie.
    Guaino, d’accord sur le fond, pense qu’on ne doit pas critiquer les dirigeants de son pays quand on est à l’étranger. Peut-être, mais sur le fond, Fillon a raison.

    On peut constater que l’Allemagne défend ses intérêts en Europe (avec son « pré carré » des pays de l’est membres de l’UE).

    De plus, l’Allemagne a des intérêts communs avec la Russie.
    Ce qui explique que lorsque nos dirigeants (Sarkozy, Hollande) se lancent (ou veulent se lancer) dans une aventure militaire qui n’a rien à voir avec les intérêts de la France, l’Allemagne nous dit : « bravo, vous êtes les meilleurs, vous êtes les plus beaux », mais elle se garde bien de participer.

    La France doit avoir de bonnes relations avec la Russie.
    Ce que De Gaulle avait compris alors qu’il n’était pas du tout communiste.
    Ce que Chirac (à qui on peut reprocher beaucoup par ailleurs) avait compris.

    Ce que Sarkozy et Hollande, intoxiqués par les idées à la BHL, n’ont pas compris, laissant le monopole à l’Allemagne.
    Ce qu’a dit Fillon semble montrer que lui, il a compris.

    J’avoue que j’apprécie « le nouveau Fillon ».
    Mais, je me souviens de « l’ancien Fillon », pusillanime face au politiquement correct et « collaborateur » de Sarkozy.
    Alors, j’attends pour voir.

    (1) Vous connaissez le dernier « exploit » de cette dame ?
    Elle veut mettre au Panthéon Violette Morris (1893-1944).
    Cette personne était une sportive de haut niveau.
    Comme elle portait des pantalons et avait des allures de garçon, elle fut persécutée par les dirigeants de l’Olympisme.
    De la bêtise machiste, certes, mais qui ne justifie pas la suite.

    Violette Morris fut pendant l’Occupation membre de la gestapo française (la bande de Bonny et Lafont), elle tortura des femmes et fut mitraillée par des résistants en avril 1944.

    Depuis 30 ans, le PS parle à tout propos et hors de propos du « devoir de mémoire ».
    Ici la socialiste C. de Haas est la digne héritière des socialistes vichystes et collaborateurs de la direction de la SFIO (Paul Faure), de la CGT (René Belin), des syndicats enseignants (André Delmas, Ludovic Zoretti, …), et d’autres organisations (Félicien Challaye, Léon Emery, …).

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