Face au FN, Cambadélis change enfin de braquet

 

Juin 2012, Carpentras. Madame Arkilovitch, candidate socialiste aux législatives, arrive en troisième position derrière Marion Maréchal Le Pen (FN) et Jean-Michel Ferrand (UMP). Contrairement à tous les candidats du PS placés dans cette situation, elle refuse de se retirer, et présente sa candidature pour le second tour. Qualifiée de « candidate de la honte » par SOS Racisme, désavouée par Martine Aubry encore aux commandes du PS, Catherine Arkilovitch se retirera de la vie politique écœurée, ce qui dispensera le PS de l’exclure. Mais la procédure était certainement dans les tuyaux.

Pourtant, le raisonnement de Catherine Arkilovitch était juste. Pour elle, permettre l’élection du candidat de l’UMP ultra-droitier Jean-Michel Ferrand plutôt que risquer de faire élire la candidate frontiste était une faute politique. Tout d’abord parce que Jean-Michel Ferrand ne lui aurait pas accordé la réciproque. Ensuite, parce qu’il n’était pas forcément moins à droite que Marion Maréchal-Le Pen. Enfin, parce que le taux d’abstention laissait une infime chance de l’emporter et qu’elle pouvait considérer à bon droit que ses électeurs du premier tour ne l’avaient pas mandatée pour qu’elle abandonne avant la fin du match, surtout contre son adversaire habituel. Au soir du second tour, avec la victoire de la petite-fille de Jean-Marie Le Pen, elle fut d’autant plus montrée du doigt et traînée dans la boue. Lors des dernières élections municipales, quelques candidats socialistes, à Béziers notamment, l’ont imité. Ils ne souhaitaient pas être aussi les cocus du front républicain. Montrés du doigt, accusés d’avoir permis l’élection de Robert Ménard alors que leur retrait ne l’aurait pas nécessairement empêchée, il ont  tenu bon, certains que leur disparition complète du conseil municipal constituait un suicide politique.

Et puis vint ce week-end. Ce moment où Jean-Christophe Cambadélis annonça que, tout compte fait, décider dès maintenant de s’effacer derrière Xavier Bertrand ou Christian Estrosi en cas de troisième place au soir du premier tour des régionales, et disparaître ainsi pour six ans des conseils régionaux, n’était finalement pas une si bonne idée. Selon Alexandre Kara, éditorialiste politique à Europe 1, la décision aurait été prise à l’Elysée. Le front républicain, qui ne bénéficiait jusqu’alors qu’au candidat de droite présent au deuxième tour contre le FN, est donc mort et enterré. Le PS a décidé de ne plus tomber dans le piège qu’il s’était lui-même tendu, croyant alors embêter la droite qui en était électoralement la seule bénéficiaire. Le PS ne veut plus être cocu. C’est officiel. Certes, il y a bien ce ministre « influent et anonyme » qui proposerait de sauver les apparences du front républicain en prônant une fusion des listes avec la droite dans ces deux régions décisives où Mesdames Le Pen peuvent l’emporter.

Le ministre en question, conscient que la disparition totale de la gauche dans des assemblées régionales ressemblerait à un suicide, propose de formaliser « l’UMPS ou le RPS » provoquant le rire à peine étouffé de Florian Philippot. Camba se met en colère. Il twitte ! Le ministre doit se nommer ou se taire ! Affaire classée. D’autant que seul un élu LR, le sénateur Lecerf, accueille favorablement la proposition.

Mais il n’y aura pas, soyons-en certains, de réhabilitation solennelle de celle qui avait montré la voie de la raison du coté de Carpentras. Alors que Jean-Christophe Cambadélis vient d’acter la mort officielle du « front républicain », sans que SOS Racisme ne moufte, Catherine Arkilovitch  doit méditer sur la fameuse citation d’Edgar Faure : « avoir raison trop tôt est un grand tort ».

8 commentaires

  1. Il est clair que cette élucubration de Front Républicain ne peut profiter qu’au parti qui n’est pas au pouvoir (car dès qu’il est au pouvoir,il recule en troisième place).
    Donc, bien vu: certains socialo ont perçu le danger de perdre encore plus de sièges que dans une triangulaire normale.
    Gageons que si la situation ètait inverse, à savoir l’UMP..(pardon, les Républicains, décidément, je n’arrive pas à m’y faire) gouvernait, on assisterait dans ce Parti exactement aux mêmes commentaires, dècisions et tentatives d’exclusion auxquels on assiste au sein du PS.

  2. Camba et le PS se range à l’évidence. On ne peut donner sans recevoir.
    La droite républicaine guidée par ses faucons sarkozystes à complètement changé de stratégie depuis que Chirac n’est plus aux affaires, plus de front républicain donc enfin le PS se réveille pour rendre la monnaie de sa pièce à LR.

    Quand LR sera au pouvoir et forcément perdra des élections locales, nous verrons alors LR revenir chercher un front républicain …. mais de cela nous reparlerons probablement dans les années futures.

    Jeff

  3. Cela ne va-t-il pas permettre au FN de gagner beaucoup de législatives? Et s’il lui suffit d’arriver en tête au second tour de l’élection face à un PS et un exUMP, j’ai l’impression que cela fera vraiment beaucoup.
    D’autre part, les deux partis de gouvernement sont tellement proches que la logique voudrait qu’ils s’unissent contre le FN. Ne voient-ils pas le danger pour eux?

  4. S’unir contre le PS comme vous dites, mon cher Mr Bous, mais ce serait reconnaître la réalité de l’UMPS que le FN et d’autres ont signalé depuis des années, ou en d’autres termes, reconnaître que ces deux partis sont d’accord à 90% sur tout.
    Leur fond de commerce est justement de mettre au premier plan leur rares divergences (en particulier sociétales).

  5. Contrairement au discours officiellement accepté par le PS, le front républicain n’a jamais été qu’une vaste opération d’enfumage, qui visait a marginaliser la droite républicaine
    Mais
    Il faut lucidement reconnaitre que le FN a toujours été l’allié objectif du PS ….. la situation a échappé aux stratège PS ( les trop fort HOLLANDE, AUBRY, DESIR, CAMBADELIS) et leur faire valoir est en train de les manger tout cru, avec grand appétit !

  6. l’anagramme de front républicain , c’est frein républicon
    mais ça ne freine pas sur la connerie
    en tout cas , le PS pète de trouille de perdre les élections et ça ( se ) sent

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