Je n’ai jamais regardé les Infiltrés. Et, probablement, je ne regarderai jamais cette émission de Pujadas. C’est bien simple, l’idée de regarder cette putasserie[1. Droits réservés BdK.] me révulse. J’aurais l’impression de cautionner, de légitimer. C’est ainsi : je n’aime pas la déloyauté. Et cette émission est déloyale. Les journalistes ne se présentent pas comme tels, gagnent la confiance des objets de ce que je me refuse à appeler reportage et poignardent ces derniers, les livrant à la police, parfois, et à la vindicte populaire, toujours.
Tu es pour la pédophilie alors ? Et tu es d’accord avec ceux qui maltraitent mamies et papis dans les maisons de retraite ! Et ces salauds qui discriminent au faciès dans les agences immobilières, tu les soutiens aussi… Enorme soupir… Avec des gens qu’on considère comme des ordures, on a le droit de se comporter comme une ordure, alors ? Dont acte. Un volontaire pour aller infiltrer les infiltrés, faire causer ces journalistes de pacotille devant la machine à café et… Rien, en fait. Devant la machine à café, ils ne diront pas que c’est le business qui les pousse à réaliser ce genre d’émission. D’ailleurs, on a supprimé la pub à cette heure sur la chaîne de télé qui diffuse. Non, il n’y a pas de volonté de faire du fric. En fait, c’est pire que ça.
Ces gens-là sont des militants, des Croisés du Bien. Et c’est bien plus dangereux. Avez-vous entendu Monsieur Chabalier, directeur de l’agence CAPA, défendre il y a quinze jours la dénonciation à la police des présumés pédophiles qu’ils avaient piégés ? C’est pour le Bien, pour défendre la veuve et l’orphelin qu’ils ont abandonné toute éthique, toute morale, oserais-je, reprenant le lexique chabaliériste. Ne pas les dénoncer eût été immoral, c’eût été de la non assistance à personnes en danger, des petits gosses de surcroît, assènent Pujadas et Chabalier. Admettons. Mais qui les oblige à se mettre dans cette situation ? En France, il y a une loi qui encadre ce genre de méthode. On a effectivement le droit de s’infiltrer dans le milieu visé et de coffrer tout ce joli monde, les preuves recueillies. Ces dispositions législatives sont circonscrites à des domaines très précis, la pédophilie en faisant effectivement partie. Seulement voilà : cette loi ne concerne pas les journalistes, mais les forces de l’ordre. D’ailleurs, les policiers et gendarmes en question font le boulot, et plutôt bien si l’on en croit les vrais reportages réalisés en la matière.
Mais Chabalier n’a cure de ces arguments. Et il a un joker. Un joker symbolique. Un joker sexy. Un joker qu’il pense décisif. Florence Aubenas. Sainte-Florence-Aubenas, otage éternelle ! Elle vient de sortir un bouquin qui s’intitule « Le quai de Ouïstreham ». Pour ceux qui seraient partis en voyage, ou qui ne regarderaient jamais le Grand Journal de Canal plus, il s’agit d’une enquête où la journaliste est devenue femme de ménage parmi les autres femmes de ménage, afin de démontrer les conditions détestables du travail de ces dernières dans les ferries au petit matin blême. Il paraît que cet ouvrage se vend bien. Je voudrais quand même bien connaître dans quels milieux il se vend. Il est possible que je me fourvoie mais j’ai la faiblesse de penser que le succès doit être plus franc dans les milieux privilégiés parisiens où on ne sait plus ce qu’est un prolo depuis longtemps. D’ailleurs, Florence Aubenas a un train de retard. Si elle avait voulu faire une enquête encore plus efficace, elle se serait immergée parmi les caissières d’un hypermarché. Ce sont elles les exploitées de notre époque. Peur qu’on la reconnaisse plus facilement à Carrefour que dans la discrète condition d’agent de propreté à cinq heures du mat ? Possible. Toujours est-il que, personnellement, je n’ai pas besoin de Mme Aubenas, ni de son immersion, pour savoir que la vie d’une femme de ménage, d’une caissière, d’un maçon ou d’un plongeur de restau ne constituent toujours pas des conditions enviables. Il suffit de sortir un peu et de discuter avec les gens. Même avec sa propre identité, cela fonctionne. Du coup, j’ai bien fait d’économiser cette vingtaine d’euros. Il y a une vingtaine d’années, Anne Tristan s’était immergée au sein du Front National en devenant une fausse militante. Dix ans plus tard, Claude Askolovitch réalisait une enquête dans ce même parti politique à visage découvert. Son « Voyage au bout de la France », c’est quand même autre chose que le triste « Anne au Front ». Faites la comparaison et vous constaterez.
Lorsqu’on est journaliste à l’étranger, dans un pays totalitaire, il n’est pas anormal de se faire passer pour un autre et ne pas exhiber sa carte de presse à tous les passants en général et aux policiers locaux en particulier. On le comprend, cela peut être un moyen efficace de faire son travail. Mais lorsqu’une émission comme celle du duo Pujadas-Chabalier fait de l’infiltration -et donc du mensonge- une fin en soi, nous ne sommes plus dans le journalisme. Le rythme de cette émission est tel que, bientôt, on ne pourra plus sortir de chez soi, ni rien dire sur son lieu de travail, sans se demander si une caméra cachée ne traîne pas par là.
Hervé C. : – Vous avez quelque chose à vous reprocher, Monsieur Desgouilles ?
Moi : – Sûrement quelques petites choses, comme tout le monde. Surtout au regard de la morale du Camp du Bien
– Quoi ? Vous faites des blagues sexistes ? Vous fréquentez des sites déconseillés par le MRAP ? Vous lisez Eric Zemmour en fraude ? Nous avons les moyens de vous faire parler, vous savez.
– Pour les sites, j’y écris aussi. Mais au fait, je n’ai pas été informé que ma garde à vue avait débuté !
Une garde à vue géante. La vidéo-surveillance chère M. Hortefeux, dont il souhaite qu’elle soit développée de manière exponentielle et donc, forcément déléguée à des sociétés privées. Des journalistes qui s’immergent et se prennent pour des flics. Ils n’ont pas d’uniforme mais ils agissent pour le Bien. Pour Votre bien. Vous voilà rassurés.
David, je ne suis pas vraiment sur que tu dernière phrase soit juste. Mais juste ta dernière phrase.
Tu as raison. De plus, elle n’apporte rien. Je la retire.
Les croisades du Camp du Bien servent à accréditer l’idée que l’Etat, la Société et les z’élites font quelque chose pour lutter contre la violence. Il est beaucoup plus difficile de rétablir l’ordre républicain dans les quartiers où règne l’ordre mafieux des trafiquants de drogue. Ne vous est-il pas apparu que le jeune qui a poignardé un innocent promeneur à Grenoble, comme celui qui avait balancé un pavé sur les policiers je ne sais plus où, se sont rendus d’eux-mêmes à la police. Je doute que ce soit par prise de conscience « citoyenne », mais je pense plutôt par injonction des caïds sur promesse de s’occuper de leurs intérêts en cabane, comme au bon vieux temps de la voyoucratie des années 1950. C’est beaucoup plus difficile de s’en prendre à ces gens-là qu’à ces guignols de pédophiles qui sont beaucoup moins nombreux, sans protection de caïds et qui font gerber tout le monde (moi le premier), tandis que les trafiquants fournissent les gentils petits bourges en cannabis, en coke, en héro et en drogues de synthèse. Bienvenue au pays de Candy !
Mr Desgouilles, être systématiquement pour ce qui est contre et systématiquement contre ce qui est pour est une idéologie souffrante et stérile .
Vous pouvez développer ?
Parce que là, j’ai du mal à me reconnaître dans votre interpellation.
@ tatich
Vous auriez raison si les propos n’était pas argumentés. Du reste le blog permet à chacun de discuter librement des arguments.
Il est quand même interressant que contrairement aux moutons, M.Desgouilles aie compris que la tête ne sert pas uniquement à élever des poux, mais à réflechir…
Le consensus ayant toujours tort, il est donc pertinent de se pencher sur l’information pour comprendre a quelle manipulation elle sert…
Juste une précision, aujourd’hui, grâce à la novlangue Sarkozienne, on ne dit plus vidéo-surveillance, mais video-protection.
Faudrait vraiment juste un jour qu’un grand homme politique, genre un ministre ou un président, se mette dans une grande cage rempli de véritables fauves affamés. Ainsi, il nous démontrerait oh combien la caméra qui surveille la scène le protège du danger. C’est vrai qu’un dresseur ou bien un gardien de fauve correctement équipé est aujourd’hui tellement couteux et inutile…
Ah si, je connais des caméra de surveillance que l’on pourrait qualifier de ‘protection’ : une unité de tir automatique. C’est vrai quoi, dans la rue, t’as un mec qui brandi une arme, pouf il se fait mitraillé, un sachet blanc contenant de la coke (ou pas, on s’en fout des dégats collatéraux, ça fait parti de quota autorisé), pouf une nouvelle salve. Voilà une bonne idée pour Dassault Industrie tiens ! Et en plus on règlerait du même coup les frais de justice et de police. Plus besoin d’enquête ni de jugement. Ah, et aussi des chomeurs et des retraités en moins en passant. Waou la solution pour sortir la france de toutes les crises est là ! Y a t’il un politique qui osera se lancer franchement dans cette voie ? enfin ? :-p
@GonoS
« Juste une précision, aujourd’hui, grâce à la novlangue Sarkozienne, on ne dit plus vidéo-surveillance, mais video-protection. »
Vous pensez bien que cela ne m’avait pas échappé. Mais comme d’une part, je déteste les novlangues et que, d’autre part, seul l’esclave parle la langue du maître, je ne tombe pas dans ce piège grossier. 😉
(Par curiosité, elle disait quoi, cette dernière phrase autocensurée – un comble ! Desgouilles aime tellement la censure qu’il se l’applique à lui-même, maintenant… – ?)
Ce qui est amusant avec ces putasseries d’émissions, c’est que tout milieu que Chabalier-Pujadas n’auront pas « infiltré » peut être considéré comme honorable, parce que sinon, hein?, vous pensez bien… (Zemmour : « Je me demande ce qu’on aurait entendu s’ils avaient infiltré par exemples les immigrés clandestins… ». Tiens ! au fait, là aussi ils auraient apporté les listes à la Police ?…)
Budelberger, si vous ne changez pas immédiatement de ton, vous allez voir ailleurs si j’y suis.
La phrase était : » Bienvenue dans la France des années 2000″. De la jolie (auto)censure, n’est ce pas ?
Idiot !
« jolie », l’autocensure locale ? j’en sais rien, c’est vous qui l’aimez et la pratiquez. La différence entre vous et moi, c’est que si je vous traite d’« idiot » dans un commentaire, celui-ci disparaît dans la minute, alors que vous…
Si je compare le sort de mes deux commentaires d’hier, j’en déduis que si Chabalier et Pujadas avaient porté des patronymes judaïques, b’en, les deux auraient sauté à l’identique.
Vous aurez bien mérité, Desgouilles, l’Étoile jaune de Grand Usurier dans l’Ordre du Plomb durci du petit Peuple qui a bécoup souffert.
Quant à moi, mon opinion de Moi-même force et s’accroît : Quelqu’un qui est censuré des « blogs » de l’extrême droite à l’extrême gauche ne peut pas raconter que des conneries.
(Ne vous inquiétez pas pour mes commentaires censurés, ils figurent pour l’éternité dans mon « blog », qui, lui, ne souffre d’aucune censure, pas même la mienne.)
Celui-là je le laisse.Il illustre à merveille le dernier mot du commentaire précédent.