Causeur. Vous avez récemment indiqué que vous pourriez être candidate à la présidence des Républicains – La date du scrutin a été fixée début décembre. Avez-vous pris votre décision ?
Florence Portelli. J’ai pris ma décision et je l’annoncerai prochainement. Si je décide d’être candidate, ce ne sera pas pour ajouter une ligne à mon CV mais parce que ma génération a une responsabilité dans la reconstruction de notre parti et je ne suis pas du genre à fuir mes responsabilités !
Quelle ligne défendez-vous ?
Je suis très attachée à ce que j’appelle la « vraie droite sociale », pas une droite sociale imaginaire pour utiliser un slogan ou un terme peut-être galvaudé. Une droite qui entend résorber les fractures sociales et territoriales. C’est ce que j’essaie de faire concrètement tous les jours dans ma ville de Taverny (95). Ensuite, une droite qui s’interroge, travaille et répond aux problèmes européens. Ce sont des enjeux auxquels on n’a pas répondu depuis les années 1990. Soixante ans après les premiers traités, face au départ des Britanniques et à la dissidence de l’Europe centrale, nous devons effectuer un inventaire critique de l’Union européenne. Les Républicains doivent faire ce travail et pour cela, il faut quelqu’un à leur tête qui en prenne l’initiative, sortant des querelles datant d’un demi-siècle, afin de faire le tri entre les acquis de l’Union, son bureaucratisme, son interventionnisme, qui ne sont pas acceptables et enfin les priorités d’aujourd’hui et de demain.
Vous ne prononcez pas le mot « souveraineté »…
J’ai commencé en politique au moment du référendum de Maastricht et du combat de Philippe Séguin, à l’âge de treize ans, ce qui me rend très à l’aise sur ces sujets. Nous avons bradé notre souveraineté. Et pas seulement en adoptant Maastricht. On a des jurisprudences du Conseil d’Etat, de la Cour de cassation et même du Conseil constitutionnel qui démontrent que même au niveau de nos plus hautes instances juridictionnelles, on a fait également acte de reddition. Et là-dessus, on ne pourra pas revenir. En revanche, on peut s’interroger sur l’absence de légitimité de certaines décisions européennes, sur la bureaucratisation, sur l’absence de démocratie, l’absence d’écoute des peuples, sur un mode de fonctionnement institutionnel complètement inacceptable, sur la prédominance d’un droit anglo-saxon sur un droit romano-germanique qui est le nôtre.
Je vous ai coupée. Quelle serait votre dernier chantier de travail ?
La défense des collectivités territoriales et donc des territoires. Emmanuel Macron a bien compris qu’elles constituaient le dernier contre-pouvoir face à lui. C’est sans doute pour cette raison qu’il poursuit la baisse des dotations et maintient son idée de suppression de la taxe d’habitation. Il faut donc s’y opposer fermement puisque les collectivités sont les moteurs principaux de l’investissement et les garants de la cohésion sociale grâce à certains services publics qu’elles gèrent à la place de l’Etat, complètement défaillant sur ce plan.
Au fond, l’élection d’Emmanuel Macron ne rend-elle pas caduque l’existence même des Républicains ? En sus des « constructifs » pro-Macron, 75% des députés LR se sont abstenus lors du vote de confiance au gouvernement…
On ne peut pas être chez Les Républicains et chez Macron en même temps. Je considère que certains sont déjà partis. En participant au gouvernement ou en votant la confiance, Philippe, Le Maire, Darmanin, Solère ou Lecornu ont tourné le dos à leurs engagements et sont de facto, « En marche ». Quant aux LR « tangents » ou indécis, il faut les faire revenir au bercail. Comment pourraient-ils soutenir une politique qui prévoit d’assassiner littéralement les collectivités locales, que nous avons gagnées de haute lutte dans le passé ? Il faut de la clarté. Les militants ont besoin d’une boussole. A cet égard, je voudrais rappeler que nous n’étions pas si nombreux à nous rendre sur le terrain ou dans les médias pendant les élections législatives pour porter la parole de nos candidats. C’est facile de montrer les muscles en disant : « Moi je suis vraiment de droite, je suis le plus fort et je serai un vrai leader » mais d’être aux abonnés absents quand nos candidats en avaient vraiment besoin.
Que Nathalie Kosciusko-Morizet et Laurent Wauquiez appartiennent encore au même parti alors que tout les oppose semble étrange. Echapperez-vous à la recomposition du paysage politique ?
Il y aura une recomposition. Elle sera claire et nette dès lors que nous aurons une ligne claire. On doit avoir une ligne de conduite, une ligne idéologique identifiable et ensuite ceux qui ne sont pas d’accord prennent leurs responsabilités. C’est un problème idéologique. Je ne souhaite pas entrer dans des histoires de personnes mais j’aimerais bien connaître la ligne idéologique de Laurent Wauquiez, parce qu’elle a beaucoup changé au fil du temps… Donc le problème est ailleurs, et ancien : on s’est assis sur une clarification idéologique claire. Cela remonte aux années 1990. Lorsque la droite s’est divisée sur la question européenne, lorsque Jacques Chirac a fait le choix d’Alain Juppé pour Matignon, n’assumant pas son programme alors qu’il aurait dû logiquement désigner celui qui l’incarnait, Philippe Séguin. Tout cela a été accentué lors de la fondation de l’UMP en 2002. Nous avons fusionné électoralement mais brouillé les différences idéologiques.
Faudrait-il donc revenir au RPR d’antan ?
Le RPR était géré de manière autocratique et fonctionnait sous le régime de la cooptation. Mais seule la clarification idéologique nous permettra de bâtir des alliances. Quand on est dans la fusion permanente, on est dans la confusion, sans réserves de voix ni d’alliances à sceller. Il est sain d’avoir des alliances avec des partenaires tout en affirmant son identité.