Hadama Traoré entendait manifester pour soutenir le terroriste de la Préfecture


Après avoir hésité, les autorités se sont finalement décidées à interdire la manifestation


Combattre l’hydre islamiste, monsieur le Président ? Nous voudrions bien vous croire, contrairement à quelques membres de votre majorité, gênés aux entournures après votre discours prononcé hier, en hommage aux victimes de l’attentat du 3 octobre à la Préfecture de police de Paris.

L’illusion n’a pas duré très longtemps. Hier en début de soirée, la sénatrice du Val d’Oise Jacqueline Eustache-Brinio publiait ce communiqué :

communique-eustache-brinio

 

La préfecture de Val d’Oise estime donc qu’elle n’a pas les moyens d’interdire cette manifestation de soutien à Mickaël Harpon, auteur de l’attentat qui a coûté la vie à quatre fonctionnaires.

Le malheureux Harpon

L’initiateur de ladite manif, qui menait une liste aux dernières élections européennes, explique dans un post Facebook que cet attentat n’en était pas un, que ce pauvre Harpon, qu’il compare à Bernardo le sourd-muet préféré de Zorro, n’était qu’un pauvre agent administratif dont la carrière était honteusement bloquée à la catégorie C depuis vingt ans… N’est-ce pas le cas de centaines de milliers de fonctionnaires dans notre pays, sans que l’un d’entre eux ne décide de passer par les armes quatre de leurs collègues ? Du reste, c’était tout de même la thèse avancée pendant vingt-quatre heures par les grands médias, lesquels ne discutaient guère les propos hâtifs du ministre de l’Intérieur, malgré les similitudes du mode opératoire avec des attentats précédents. Jeudi dernier, on a ainsi pu découvrir le titre du JT de France 2 : « Un fonctionnaire tue quatre agents ». On constate que la stigmatisation c’est très grave, sauf quand elle touche les membres de la fonction publique.

L’initiateur de la manifestation refusant de croire (ou faisant semblant) que Mickaël Harpon est un terroriste, mais plutôt un pauvre agent victime de discrimination en raison de son handicap, il ne serait donc pas de bonne foi d’accuser les futurs participants de se livrer à une apologie du terrorisme.

Mais ne peut-on pas en revanche l’interdire pour des raisons d’ordre public ? Une semaine après un tel attentat qui vise des fonctionnaires de police, une telle manifestation présente à l’évidence des risques de troubles, d’autant qu’on va demander aux collègues des victimes de l’encadrer.

En France, l’administration préfectorale ne s’embarrasse pas toujours de cette prudence. Quand il faut interdire le déplacement de supporteurs havrais à Metz, comme au printemps dernier – le contentieux entre les ultras de ce derby mosello-normand étant de notoriété publique – , on n’hésite pas à écraser une mouche avec un marteau-pilon. Quand il s’agit d’interdire la présence des supporteurs lyonnais à Saint-Etienne, comme dimanche dernier, c’est même Christophe Castaner qui s’y colle.

Rétropédalage

Dans notre pays, le supporteur de foot est donc moins bien traité que le sympathisant d’un auteur d’attentat. D’ailleurs, même pour de paisibles matches de Ligue 2, on le fouille à l’entrée comme on ne le fait pas avec certains délinquants, et depuis quelques semaines on réglemente aussi ses banderoles et ses chants. On n’évoquera pas non plus la légèreté avec laquelle certains citoyens sont aujourd’hui condamnés sans jugement par les préfets à pointer au commissariat les soirs de matches, sur des motifs parfois ubuesques.

Ce matin, peu après 9h00, après que plusieurs membres de l’opposition avaient protesté sur Twitter ou  sur des antennes, Christophe Castaner a finalement interdit la manifestation. On ne saura pas s’il a déjugé le Préfet du Val d’Oise ou s’il a rétropédalé après avoir lui avoir donné d’autres ordres hier.

Un motif de satisfaction : l’opposition sert toujours à quelque chose. Mais on peut s’interroger sur la spontanéité du « combat contre l’hydre islamiste ». Remettre du dentifrice dans un tube, ce n’est jamais facile. Surtout si on répugne à l’exercice.