Après avoir montré du poing, le leader du PG ouvre les yeux

 

«Jacques Généreux, qui est notre maître à penser sur ces sujets, considère lui que la question n’est plus de savoir si on doit sortir de l’euro mais quand et comment on le fera. C’est un pronostic très pessimiste mais il est possible en effet que l’euro s’effondre sous le poids des contradictions qu’il contient[…] La Banque centrale européenne doit changer son statut. Si elle change et si on accepte cette idée qu’il faut une harmonisation sociale et fiscale, alors nous aurons un ensemble économique cohérent qu’il sera possible d’impulser et l’euro peut servir de circulation sanguine. Mais sinon, on ne va tout de même pas mourir pour une monnaie ! »

Voilà en substance ce que Jean-Luc Mélenchon expliquait dimanche sur France 3. Mesurons-nous le chemin parcouru ? Il y a trois ans à peine, le co-président du parti de gauche déclarait que la sortie de l’euro était une solution « d’essence maréchaliste ».Nous l’avions alors vivement repris de volée, non seulement parce que son attitude se révélait insultante mais aussi parce qu’elle le privait du  principal levier pour appliquer sa politique s’il arrivait au pouvoir.

Mélenchon a donc changé son fusil d’épaule. Pour deux raisons. Primo, en trois ans, le débat sur l’euro a fait bouger les lignes, notamment chez les économistes proches de la gauche de la gauche. Jacques Généreux, comme le signale Mélenchon, mais aussi Bernard Maris, qui ne voit plus d’autre solution que de démonter la monnaie unique pour mettre en œuvre une politique  économique alternative, symbolisent cette mutation. À l’échelle internationale, on ne compte plus les économistes de renom, parfois Prix Nobel, qui appellent à la dissolution de cette zone monétaire.

Tout ce petit monde s’est donc ajouté à Jacques Nikonoff et Aurélien Bernier qui prônaient déjà cette option et étaient donc pointés comme maréchalistes par Mélenchon, sous prétexte qu’ils préconisaient une solution défendue par Marine Le Pen. Le second nommé a d’ailleurs écrit un livre fort intéressant où il interpellait la gauche radicale sur la question de l’Europe. Qui sait si cet excellent ouvrage n’a pas contribué à la prise de conscience de l’ex-candidat du Front de gauche à l’élection présidentielle ?

Secundo, Jean-Luc Mélenchon a sans doute compris que sa fixette sur Marine Le Pen, qui le conduisait à rejeter par principe tout ce qu’elle pouvait proposer, conduisait à l’échec. Il a pris conscience que lui laisser le monopole de certains thèmes, surtout dans le domaine économique, confinait à l’idiotie. Il était temps. Car son piètre score parmi les ouvriers et les employés en 2012 s’explique en partie par cette fixation sur la présidente du Front national, qui est appréciée dans ces catégories de la population. Ces trois dernières années, lorsqu’il était amené à débattre avec Jacques Sapir ou Emmanuel Todd sur ces questions, par exemple sur le plateau de Daniel Schneidermann, il se montrait beaucoup plus ouvert  que dans des tribunes moins confidentielles où il continuait de plastronner. Or, dimanche, c’est dans le 12-13 dominical de France 3, une émission politique très regardée, qu’il a décidé d’adopter ce discours sur l’euro.

Si Jean-Luc Mélenchon s’est réellement décidé à adopter une ligne plus cohérente en n’excluant plus un éventuel retour du franc, solution soutenue par les classes populaires, il s’agit assurément d’une bonne nouvelle… pour ses futurs résultats électoraux.

2 commentaires

  1. Sans vouloir être méchant, le simple fait qu’il dise: « La Banque centrale européenne doit changer son statut. Si elle change et si on accepte cette idée qu’il faut une harmonisation sociale et fiscale, alors nous aurons un ensemble économique cohérent qu’il sera possible d’impulser et l’euro peut servir de circulation sanguine. Mais sinon, on ne va tout de même pas mourir pour une monnaie ! », prouve qu’il n’a toujours pas compris le problème. On pourrait mettre Superman à la tête de la BCE, harmoniser la fiscalité, et même les salaires, qu’on se retrouverait autant dans la panade parce que les peuples européens ont des cultures et des réalités humaines différentes. Des réalités qui vont bien au-delà du domaine de l’économie. La simple divergence démographique inclut des besoins monétaires différents ainsi que des rythmes d’inflation différents. Il faut accepter cette réalité ou alors prôner la création d’un super état ultra violent qui n’aura d’autre choix que d’écraser les peuples pour éliminer les différences trop voyantes. On imagine la dérive totalitaire inhérente à ce processus.

  2. Complètement d’accord avec Yann. Le discours de Mélenchon prouve qu’il n’a toujours pas compris le problème. Enfin, tant mieux, si sa fixation sur Marine Le Pen diminue.

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