Je viens de lire « Après la démocratie » d’Emmanuel Todd. Après avoir lu « l’illusion économique » en 1998 et « Après l’Empire » en 2002, j’ai aimé ce livre. Je ne partage pas toutes ses analyses notamment sur le niveau scolaire. Mais, j’adhère à l’essentiel. Et je ne résiste pas à l’envie de reproduire ici un extrait qui m’a beaucoup touché puisque cela concerne une bonne partie de ma vie militante :

[…]Mais s’il fallait désigner à l’intérieur du gaullisme le traître de comédie digne d’affronter sur une scène de théâtre les énarques socialistes, je choisirais Philippé Séguin, dont la carrière est en vérité tout à fait extraordinaire. En 1992, il s’impose comme leader de l’opposition au Traité de Maastricht, héraut autoproclamé de la nation républicaine. Le oui l’emporte d’extrême justesse à son grand soulagement. Philippe Séguin ne continue pas la lutte, si bien engagée mais échange aussitôt la France contre un bureau de tabac, deux plutôt, successifs, la présidence de l’Assemblée nationale en 1993, puis la Cour des comptes en 2004. Muet durant le débat de 2005 sur le Traité constitutionnel européen, il trouve le moyen de garder sa réputation d’homme bourru, colérique et pourquoi pas, intègre. Il a en réalité appris la trahison à une génération politique. Il n’est guère étonnant de retrouver en 2007, autour de Sarkozy, autant d’anciens proches de Séguin : de Roger Karoutchi, qui fut son chef de cabinet à l’Assemblée nationale et son conseiller politique, à Henri Guaino, pourfendeur de la « pensée unique » et antimaastrichtien notoire, sans oublier les anonymes. A tous, Philippe Séguin a démontré par ses actes que la nation républicaine, c’était pour rire, un truc pour monter dans la hiérarchie de la bande RPR. Le séguinisme a été une étape nécessaire pour les hommes politiques d’origine gaulliste qui acceptent aujourd’hui sans broncher la transformation de la France en satellite des Etats-Unis […]

En 1998, donc, en refusant de continuer de participer à cette comédie, en refusant d’apprendre la traîtrise avec cette génération, j’ai gardé le droit de continuer à me regarder dans la glace. Merci à Emmanuel Todd de l’écrire aussi clairement. Et Merci à un certain vigneron du Var de m’avoir aidé à m’en rendre compte.

Cité par Vendredi (édition en ligne)

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