L’autre jour, sur Causeur, Luc Rosenzweig expliquait que la France semblait changer de stratégie dans la gestion de prise en otage de ses ressortissants dans le monde. Il se réjouissait d’observer que, peut-être, notre pays allait adopter la méthode employée par nos amis britanniques, celle de ne jamais céder au chantage.

Ce sur quoi j’étais vraiment d’accord avec Luc, c’est sur le fait que tous les portraits accrochés aux façades des hôtels de ville, les lâchers de ballons dans les stades[1. Si, si ! J’en ai même vécu un à Sochaux pour Aubenas… Ou Malbrunot et Chesnot ; je ne sais plus très bien.] et autres mobilisations « citoyennes », auxquelles on doit participer sous peine d’être accusé d’être sans-coeur, donnaient davantage de prix aux ressortissants français, lesquels figuraient désormais en tête du classement international de l’otage rêvé.

Suite à l’affaire Malbrunot-Chesnot, j’avais eu l’occasion d’écouter un diplomate de l’ambassade de France en Irak, déclarer que les otages auraient été libérés bien plus tôt si on avait pu travailler dans la discrétion et sans toute cette mobilisation politico-showbizo-médiatique. Cette personnalité, qui savait de quoi elle causait, balayait ainsi d’un revers de la main la vieille antienne « : si on ne parle plus des otages, on les oublie ; si on les oublie, ils sont perdus ».

On s’étonnait d’autant plus de cet éventuel changement de pied de la part du gouvernement français que le Président de la République s’était fait une spécialité, dès le début de son mandat, de souhaiter libérer tout ressortissant français enfermé ailleurs que dans notre pays. Pas seulement les Français, d’ailleurs : il se préoccupait même de libérer, peu après sa prise de fonctions et par l’entremise de celle qui était encore son épouse, des infirmières bulgares et un médecin palestinien. Plus tard, lors de l’affaire « Arche de Zoé », il réussit à faire revenir des militants associatifs qui, pour le coup, n’avaient rien d’otages. Dernièrement, deux de mes concitoyennes de Besançon, ont également été graciées par le Président dominicain alors qu’elles étaient condamnées pour trafic de drogue[2. Elles ont toujours nié. Dans le meilleur des cas, je ne saurais trop leur conseiller de consulter un bon ophtalmo, comme il y en a dans notre bonne ville de Besançon. Un paquet d’un volume correspondant à trois kilos de farine dans une valise, au milieu des petites culottes, normalement, n’échappe pas à des yeux en bonne santé.]. L’intervention de Carla Bruni, dit-on, y a été pour beaucoup. Jusqu’à cette affaire de journalistes de France 3, il ne serait pas dit que Super-Sarko laisserait croupir un Français dans une geôle[3. Alors que nos prisons sont exemplaires, comme chacun sait.] étrangère.

Cet appel à la discrétion, donc, ne laissait pas d’étonner. Mais elle n’a pas duré très longtemps. La communication fut vite de retour puisqu’après avoir demandé le silence à l’entourage des otages, on le violait en laissant filtrer des déclarations en Conseil des ministres du Président sur l’imprudence des journalistes en question, déclarations que le secrétaire général de l’Elysée confirmait dimanche sur Europe 1. Il est bien possible que la plus grande prudence n’ait pas été observée en l’espèce. On ne dispose pas des informations du gouvernement pour en juger. Tout juste peut-on observer que reporter en temps de guerre, cela n’a jamais été un métier prudent. Reconnaissons qu’on l’est davantage à éditorialiser à Paris ou bloguer à Besançon. Mais violer la discrétion qu’on n’a soi-même demandée et charger les otages, voilà qui est effectivement nouveau. Nul doute que cette prise de position aura pour conséquence de relancer ces fameuses « mobilisations citoyennes » ! La défiance envers le gouvernement que suppose l’antienne dont il est question plus haut (« si on les oublie, ils sont perdus ») aurait toutes les raisons de reprendre corps.

Comment, donc, interpréter cette nouvelle stratégie de communication présidentielle ? On peut être certain que Nicolas Sarkozy n’adoptera pas la méthode dure anglaise. Si cela avait été le cas, il serait resté discret et n’aurait pas provoqué la presse avec ses déclarations, confirmées par Guéant. Les otages resteront donc en vie, qu’on se rassure, et la France paiera le prix qu’il faut. Mais cette fois-ci, on les engueule pour ne pas désespérer l’électeur de droite qui est souvent aussi un contribuable sourcilleux. Il n’y avait qu’à lire les réactions sur Figaro.fr dans le fil consacré aux Bisontines graciées et les quelques mots d’oiseaux lancés en direction de Monsieur Joyandet[4. Personne n’avait eu droit à ce traitement de faveur depuis Frédo Mitterrand], pour se rendre compte que l’électorat conservateur se doit d’être choyé non seulement à l’approche des régionales mais en vue d’autres échéances, qui pour être davantage lointaines, sont bien plus importantes aux yeux du Président.

Ici et comme pour beaucoup d’autres thèmes, c’est malheureusement à cette aune là qu’il faut lire les déclarations de Nicolas Sarkozy et mesurer la distance de celles-ci avec les actes.

Photo en Une : Carla Bruni lors d’une mobilisation citoyenne en faveur de la libération d’Ingrid Bétancourt

6 commentaires

  1. de toute façons et depuis toujours,,on paye
    ce qui permet a certains d »en prélever,,,,,un peu
    les fonds secret servent en partie a cela
    quand a Bètancourt,,,,copine de qui vous savez,,,elle a coûter très cher aux contribuables français,,,,,
    M Joyandet se met en avant,,,et en fait surement trop,,,cela deviens ridicule
    mais le peuple n »est pas dupe,,,
    le cirque de Nicolas en outre-mer pour des voeux,,a mayotte ne me font pas sourire,,
    en 2011,,ces gens seront français,,,et la,,,on va pas rire
    la bigamie devra étre interdite,les lois islamiques,,,interdites,,et parler le français,,,il va bien falloir parler des droits,,,,,aux allocations,,RMI,j »en passe et des meilleures,,,
    mais d »ici la?? beaucoup de choses peuvent changer

  2. Comment pouvez vous prendre pour une strategie de com’ l’habituelle improvisation et l’avere amateurisme du pouvoir ?.

  3. Puisque vous évoquez, David Desgouilles, l’article de Luc Rosenzweig sur Causeur, il en produit un autre ce jour qui complète le précédent en traitant du même sujet que vous ci-dessus.
    Sa thèse est plutôt le contraire de la votre car il voit dans la « colère » présidentielle à l’encontre des journalistes trop téméraires, la confirmation d’un changement d’attitude des pouvoirs publics.
    Je suis enclin à partager son point de vue plutôt que la lecture que vous faites de ces mêmes « fuites ».

    Si je puis me permettre, et en vous disant tout le plaisir que j’ai à vous lire régulièrement sur votre blog, vous semblez d’article en article verser de plus en plus vers un antisarkozysme, légitime certes, mais sans nuance et parfois excessif. Or ce travail est largement fait par la gauche sans idées, sans projet, sans crédit.

    Une lecture critique de l’action du pouvoir politique actuel, sans concessions mais objective et juste, est-elle impossible ?

    Au plaisir de vous lire encore.

  4. On est toujours dans l’apparence ! Où est le temps où le Général envoyait M. Dominique Ponchardier, comme ambassadeur, pour libérer Régis Debray des geôles colombiennes. Et ce, en toute discrétion comme il se doit. Mais ce n’était pas « moderne » comme aurait pu dire le guignol de l’Express, Ch. Barbier.

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