Je l’ai écrit. Je l’ai réécrit. Et je le répète aujourd’hui : »Ségo, c’est Sarko en fille ». Enfants de la com’ et du marketing politique, amoureux de la pipolisation et de l’exhibition, Nicolas Sarkozy et Ségolène Royal demeurent imprimés sur les deux faces d’une même médaille.

Et c’est justement pour cette raison que  je ne partage pas le sentiment de Marc Cohen. Ségolène Royal a, tout comme Nicolas Sarkozy, vocation à gouverner. Pour le pire davantage que pour le meilleur, certes. Et cela ne changerait donc pas de l’ex-maire de Neuilly. Mais elle constitue le danger principal à gauche pour l’actuel Président. D’ailleurs, ce dernier ne s’y trompe pas. J’y reviendrai.

La Présidente du Conseil régional de Poitou-Charente applique une méthode éprouvée par Nicolas Sarkozy, celle de maîtriser l’agenda médiatique et d’occuper le terrain par tous les moyens quand elle le souhaite. Ses pardons en chaîne n’avaient pas d’autres buts, tout comme les sorties viriles du ministre d’intérieur Sarkozy lorsqu’il fustigeait racaille et promettait karcher. Ce genre de déclaration a pour but de déchaîner fureur ou émotion dans le camp d’en face et de solidariser ainsi son propre électorat. D’autre part, comme Nicolas Sarkozy, Ségolène Royal sait très bien que c’est l’électorat populaire et les classes moyennes qui font l’élection présidentielle. C’est ainsi que le premier avait mis la sécurité, priorité légitime de ces dernières, au centre idéologique de sa mise en orbite présidentielle, ce qui était d’autant plus facile qu’il occupa la Place Beauveau pendant trois des cinq ans qui précédèrent son élection. Celle qui fut sa rivale malheureuse, en critiquant frontalement la taxe carbone, se situe dans la même logique. Intelligemment, elle ne tient pas compte du score d’autant plus démesuré des écolos aux européennes, qu’il fut acquis grâce à une abstention massive, en particulier dans les classes populaires. D’ailleurs, en y regardant de plus près, même l’électorat écolo semble davantage en phase sur la future « contribution climat » avec Ségolène Royal qu’avec le couple de la semaine, Sarko-Duflot. En pointant l’injustice de la mesure et la condescendance des élites en direction de ces salauds de (pollueurs) pauvres, elle a certainement touché juste. Ces derniers s’en souviendront sans aucun doute.

Nicolas Sarkozy est parfaitement conscient du danger Royal. Les attaques de sa garde rapprochée en direction de Ségo (folle, hystérique etc…) avaient pour but de l’affaiblir au maximum. D’autre part,  le recrutement de Philippe de Villiers ne répond pas seulement à une tentative d’élargir sa majorité en vue d’un second tour. Il faut également y voir une manœuvre locale. Dans l’ouest, et notamment en Poitou-Charente, le président du MPF jouit d’une influence certaine. En faisant tomber cette région dans l’escarcelle UMP, les chances de Madame Royal s’en trouveraient largement réduites. Si, au contraire, celle-ci était réélue, même et surtout dans un contexte d’échec global du Parti Socialiste sur l’ensemble des régions, plus rien ne pourrait l’empêcher d’être à nouveau candidate, les nains Valls et Peillon se rangeant derrière elle de manière disciplinée.

Un match retour de second tour, dans la Ve République, il n’y en eut qu’un seul : Giscard-Mitterrand en 1981. Nicolas Sarkozy refuse de retrouver Ségolène Royal en 2012 parce qu’il sait ce qui est advenu à VGE. Et l’on sait qu’il y a beaucoup de similitudes entre Sarko et Giscard : bougisme, décrispation-désacralisation et volonté de donner peu de rôle au Premier ministre[1. Ou en tout cas, au premier chronologique des Premiers Ministres de leurs mandats respectifs, Jacques Chirac (74-76) et François Fillon (07-?)]. D’autre part, face à l’électorat populaire, toujours lui, la question de la sécurité et, plus généralement, de l’Ordre jouera encore un grand rôle dans deux ans et demi. Et Ségolène Royal n’est pas perçue comme une « angéliste ». Ses propositions de 2007 sur l’encadrement militaire et l’un de ses slogans de campagne [2. L’ordre juste] avaient pour but de démontrer qu’elle ne faisait pas preuve de la même naïveté avouée jadis par Lionel Jospin. Devant un échec de Nicolas Sarkozy sur cette question, il est fort possible qu’elle pourrait en profiter. C’est pourquoi le Président de la République tente de reprendre la main sur ce sujet dont il sait qu’il sera encore au rendez-vous de la présidentielle.

Malheureusement, pour ceux qui aiment vraiment la Politique, les deux mêmes communicants risquent fort de se retrouver face-à-face sur le terrain en mai 2012. Et le match, cette fois-ci pourrait bien être davantage serré et donc incertain.

13 commentaires

  1. Eh bé !
    Dire que j’ai voté Sarko (j’avais trop écouté les beaux discours écrits par d’autres) parce que je ne voulais pas de Ségo (dont je me méfiais beaucoup), devrais-je voter Ségo (dont je me méfie toujours) parce que je ne veux plus de Sarko (et dont je ne crois plus les discours) ?
    Argh ! pauvre France !

  2. Je ne partage pas ce propos : ”Ségo, c’est Sarko en fille”.

    Mme Royal est d’une démagogie sans borne, empeste l’arrogance et l’auto-suffisance, et ne semble pas avoir de projets ou d’envies précises pour ce Pays…… C’est Madame « Moi-Je » vide à l’intérieur.
    En 2007, j’ai voté Sarko au premier tour par élimination, au deuxième par conviction (le débat pré-deuxième tour….), et car je considère avec angoisse une Présidence « royale »……
    Royal est une calculatrice, Sarko est un Piitbull……..

    On peut reprocher beaucoup de choses à Notre Président, mais il a des idées, des envies , des projets, il est hyper-actif et veut modifier certaines de nos habitudes toxiques chroniques……….. Bref, ça bouge !!!!! Toute son action me semble un peu bordélique, pas très lisible, mais un certain nombre de choses ne vont pas dans le mauvais sens…..

    Sinon, pour moi, c’est NDA en 2012 !!!!

  3. Royal a fait ses meilleurs scores en Bretagne, je suis curieux de savoir si son discours et son style correspondent à la mentalité bretonne.

  4. On peut lui laisser sa chance…
    Elle me séduit de plus en plus. Elle a un courage que peu d’autres ont.
    Je ne pense pas qu’elle sera pire que Sarkozy… loin de là !

  5. Au fond, pourra t-elle se présenter aux élections présidentielles? Va t-il y avoir des primaires à gauche? si elle veut se présenter aux présidentielles il lui faudra d’abord gagner cette première étape…ce qui me paraît injouable au coeur d’un PS et affiliés dont le mot d’ordre est: T.S.S (Tout Sauf Ségolène) ; Elle ne peut quand même pas se présenter toute seule?

  6. En terme d e maitrise des outils et des techniques de communication, Ségolène royal est mon . ..idole… Avec 5% de ses aptitudes HERCULEENNES dans ce domaine, j’aurais beaucoup moins d e problèmes dans la vie courante où le « faire savoir » a une place (trop) prépondérante…..

    Mais, je vois pas ce qu’une DEMAGOGUE HORS NORME pourrait faire à la tete de la France, pas plus que je ne m’enthousiasme pour le reste du PS….

    « « ce qui me paraît injouable au coeur d’un PS et affiliés dont le mot d’ordre est: T.S.S (Tout Sauf Ségolène) ; Elle ne peut quand même pas se présenter toute seule? » » Et pourquoi pas ??? un politique avec des idées et un projet peut se présenter … Si elle fait ça, promis je l’écoute…. 😉

  7. On m’a dit qu’il fallait un énorme appareil politique (genre UMP) pour espérer figurer au deuxième tour.
    On n’a jamais vu un candidat seul s’imposer dans une élection présidentielle.
    …Moi, ce que je ferais à sa place (et sans scrupule aucun!) , je rejoindrais mon « jumeau » Nicolas (très bien vu David) dès maintenant, qui me laisserait la place en 2017!

  8. « « « On n’a jamais vu un candidat seul s’imposer dans une élection présidentielle. » » » FAUT UN DEBUT A TOUT et dans la mesure où l’énorme appareil politique, il ne sert qu’à marteler le même message pendant des semaines dans les medias…… , je me dis que celui qui arrivera à parler aux cœurs des gens n’aura pas besoin de cela……

    Seulement , aller au fond des choses, c’est pas le genre en politique…….

  9. Le raisonnement est carré. Je fais aussi partie de ceux qui pensent que Sarko aimerait bien l’éliminer rapidement.
    Mais je trouve sa stratégie actuelle peu lisible et puis, semble-t-il, tous ses soutiens ont l’air de l’abandonner les uns après les autres…
    A suivre…

  10. @Estelle
    Royal n’a rien à offrir (pas présidente de la république, pas 1ère secrétaire du PS), donc elle ne peut pas retenir des politiques qui veulent jouer leur carte de leur côté, c’est bien connu les politiques ne sont pas fidèles…
    Voyons comment ça se passe dans le futur, et si elle apparaît comme la meilleure, et là vous les verrez tous revenir.

  11. Bonjour
    Depuis longtemps j’ai compris :
    1. Ségo est la seule candidate non seulement d’envergure mais surtout possible à gauche (d’ailleurs elle a gagné le congrés de Reims malgré les analyses sarkophile des médias – à la botte- et les plans de basse politique des caciques du PS)
    2. Ségo est la seule à pouvoir « amalgamer » en interne des déçus du PS aux militants de base, et en externe des girouettes du Modem aux durs du PC.
    3. Elle est la seule à fraire front contre la taxe carbone et à se poser en protecteur du peuple (non ce n’est pas une insulte)
    4. Pour moi, sarko a gagné en 2007 du fait de son charisme et de la conivence des Médias. Ségolène a perdu du fait des magouilles internes au PS – Cf ses bons appuis BESSON rédacteur d’un programme inepte et KOUCHNER qui négociait en douce un poste de ministre) et de la mollesse des centristes au dernier moment

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