Depuis que je fréquente Causeur et davantage encore depuis que j’y ai été admis comme invité à y publier mon carnet politique, je suis forcément conduit à m’intéresser aux auteurs qui y sévissent et dont, parfois, j’ignorais jusqu’à l’existence. J’ai donc fait la connaissance de Jérôme Leroy. Jusqu’alors, Jérôme Leroy ne m’avait laissé que de bons souvenirs mais ce n’était pas le même Jérôme Leroy. Sa patte droite avait illuminé beaucoup de mes samedis soirs au Stade Bonal et, surtout, une soirée mémorable au Stade de France le 11 mai 2007, où mon club favori ramenait en Franche-Comté cette Vieille Dame de Coupe de France de football qui nous négligeait depuis 1937. Aujourd’hui encore, le même Jérôme Leroy officie en Bretagne et procure beaucoup de plaisir à mes congénères rouges et noirs, d’après ce que j’ai cru comprendre.

Découvrant donc ici les chroniques de l’autre Jérôme Leroy, celui dont j’ignorais tout jusque-là, je me suis décidé à me procurer son dernier roman, lequel avait fait l’objet d’une critique par la maîtresse de maison, cela dit sans vouloir fayoter outre mesure. N’y allons pas par quatre chemins. La minute prescrite pour l’assaut m’a transporté dans un drôle d’état. J’ai lu ce cauchemar – car il s’agit vraiment d’un cauchemar – avec le même sourire du début à la fin. J’ajoute qu’ayant lu le cauchemar en question le plus souvent aux heures les plus avancées de la soirée, je m’endormais ensuite dans une quiétude totale et sans faire de cauchemar de la nuit. Beaucoup mieux, en fait, qu’en ayant ingéré tel ou tel psychotrope dont Jérôme Leroy fait de la publicité clandestine dans le livre.

Ce talent pour les Lettres, cette faculté de faire partager au lecteur ses goûts, ses craintes, ses angoisses et ses amers constats nous convainquent déjà rapidement qu’on a entre les mains le roman d’un écrivain de haut vol. Et c’est rassurant. Ensuite, l’histoire. L’auteur nous plonge entre cinq et dix ans dans le futur. Les catastrophes écologiques et sanitaires s’enchaînent alors même que les lois hygiénistes se sont multipliées ; la communautarisation et l’éclatement de notre pays atteignent le paroxysme ; la violence est devenue la règle. Les personnages sont merveilleusement bien croqués et si certaines références me sont totalement étrangères (Amy !) d’autres m’ont agréablement rappelé mes lectures d’adolescent devenues lectures de plage (Prince Malko !). Enfin, le message politique. Limpide. La mondialisation néo-libérale nous mènera à l’Apocalypse. Il n’est pas indifférent qu’un gaulliste authentique rejoigne à ce point l’analyse d’un communiste-maintenu. De l’Ecole, je partage aussi la même conception, celle qui refuse les fadaises des fausses sciences de l’éducation. Apprendre à Apprendre, disent-ils ! Mais apprendre à apprendre rien[1. Je dois cette expression à Jean-Paul Brighelli]…

Merci donc, Jérôme Leroy, pour ce revigorant cauchemar. S’il peut contribuer un tant soit peu à l’éveil ou au réveil de quelques consciences de plus, Kléber, Sarah et la kolkhozienne aux seins nus se sentiront peut-être moins seuls…

2 commentaires

  1. Vrai qu’on oubliera jamais cette soirée du 11 mai 2007 qui a vu triompher notre glorieux FC Sochaux-Montbéliard (j’espère que de citer le nom de notre club sur ce carnet n’engendrera pas des propos outranciers réservés habituellement à des forums bien peu recommandables) emmené par notre talentueux J.LEROY.

    Les deux ont leur charme et leurs qualités même si je ne pense pas que l’écrivain goûte trop aux gouts musicaux (Rap à fond) du footballeur.

    La lecture de ce roman amène à guère d’optimisme et je me demande ce que ce communiste maintenu pense des co-manifestants de M-G BUFFET de ce samedi. La fin de l’histoire est elle proche ?

    Mais peut être que derrière cette histoire, J.LEROY ne veut que nous alerter et nous faire réagir.

    Pour conclure, je citerai B.MALON fondateur de la Revue Socialiste au 19ème.

    « La suprême sagesse de ce temps consiste peut-être à penser en pessimiste, car la nature des choses est cruelle et triste, et à agir en optimiste, car l’intervention humaine est efficace pour le mieux-être moral et social et nul effort de justice et de bonté, quoi qu’il puisse nous apparaître, n’est jamais complètement perdu. »

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