Nous sommes très proches de la crise de régime. Ces derniers jours, le Président de la République a récolté les fruits pourris de sa stratégie de désacralisation de la fonction présidentielle.
Michel Audiard disait qu’on reconnaissait les cons au fait qu’ils osaient tout. Si le célébre dialoguiste avait raison, nul doute qu’il verrait dans notre Président un exemple d’école. Depuis des années, Nicolas Sarkozy met en scène sa vie publique et sa vie privée. On a eu droit à tout. Le reportage de « Envoyé spécial » reprenant image pour image Kennedy et son fils John-John jouant sous le bureau, les confessions sur ses difficultés de couple en direct au JT de France 3, le retour de la Belle en pirogue guyanaise juste après avoir fait le serment qu’on ne l’y reprendrait plus à montrer des images de sa vie privée, le divorce, l’annonce du « sérieux » de sa relation avec une chanteuse en conférence de presse de rentrée, le soi-disant discret mariage : j’en oublie ?
Oui, j’oublie le plus ridicule : cette semaine à Gandrange. Il va voir les ouvriers de Mittal Arcelor et pour conclure son propos, il ose : « Une lune de miel à Gandrange, c’est quelque chose…. ». Cette phrase, est-ce celle d’un homme équilibré ? D’un homme particulièrement mature ? Les ouvriers ont dû être estomaqués. Dans le cas contraire, il est bien étonnant qu’aucun d’entre eux ne soit pas monté sur la scène pour le souffleter. Car cette gaminerie méritait bien une gifle. Rendez vous compte : lui qui leur avait promis de les protéger contre les ravages de la mondialisation, il venait en substance leur dire qu’il serait quand même mieux avec son mannequin de femme dans un palace de quelque paradis terrestre.
Et le bouquet final, cette plainte contre le Nouvel obs. Alors que les Présidents de la Ve République s’étaient donnés la règle de ne jamais attaquer la presse en justice car au dessus des partis et de la « mêlée », il rompt avec cette pratique. Normal et cohérent pour une fois avec tout le reste. Mais il ne respecte rien, ni sa fonction, ni la République, ni la Démocratie, ni le vote souverain du Peuple. Je ne sais si Nicolas Sarkozy a réellement écrit ce SMS à son ex-femme. Mais ce que je sais, c’est que tout le monde pensera, eût égard à son comportement, qu’il en est effectivement capable. Comme il est capable d’en rédiger un lorsque le Pape prend la parole, comme il est capable de se comporter en garçon de bain au milieu des pêcheurs. Décidément, nous n’avons pas de Président. Nous avons une sorte de président.
Cette semaine, et c’est tout un symbole, est aussi la semaine où des parlementaires ont piétiné le suffrage du Peuple. Et, comme une gifle, ils se sont ensuite levés pour s’applaudir. Ils venaient de rectifier l’erreur, la faute, de ce si mauvais peuple, de cette populace qui avait eu l’outrecuidance de refuser la constitution européenne. Ils doivent avoir bien honte de les représenter pour ainsi se féliciter de fouler aux pieds les décisions de leurs électeurs. Qu’ils doivent se boucher le nez à l’idée d’aller à leur rencontre à l’occasion des élections locales de mars prochain ! Le parlementaires qui ont accepté cette forfaiture sont coupables de haute trahison ; ceux qui ont dit oui et, plus encore, ceux qui se sont abstenus, ajoutant la tartufferie à leur couardise.
Pour conclure, avec un président comme ceci, une majorité de parlementaires comme cela, qui osera dire que nous ne courons pas à une exceptionnelle crise de régime ?