Manifestement, Jean-François Kahn partage l’opinion d’Éric Naulleau : « Dans Caron, il y a deux lettres de trop. »
Donc Natacha Polony quitte, de son plein gré, On n’est pas couché, remplacée à la rentrée par Léa Salamé (iTélé). Dans la foulée, Laurent Ruquier et sa productrice Catherine Barma annoncent una voce le nouveau rôle assigné à leurs chroniqueurs : « Fini les polémiques, place aux interviews ! » Moi je veux bien, même si ça risque d’affadir encore un peu l’ensemble. Mais dans ce nouveau dispositif il sert à quoi, Aymeric Caron ?
À force de vouloir exister comme un grand, ce gland s’est mis à dos tout le monde, y compris le tout-Paris qu’il croyait séduire. Saura-t-il renoncer à son statut de polémiste autoproclamé pour celui de simple journaliste ? Poser des questions sans imposer ses réponses ? Interviewer sans japper ? Si un tel miracle devait se produire il faudrait encore à Aymeric, pour être crédible, changer au moins de nom et de brushing. Mais à en croire sa récente charge héroï-comique contre Jean-François Kahn, il n’en prend pas le chemin.
L’autre samedi Jean-François, héraut vibrionnant de la « révolution centriste », est invité pour défendre son tout nouveau bouquin, Marine Le Pen vous dit merci (Plon). Comme le titre l’indique, l’auteur y dénonce l’ « antifascisme » incantatoire pratiqué en France depuis trente ans, de Jean-Marie à Marine, avec le succès que l’on sait.
Après tant d’imprécations, d’exorcismes et de diabolisation, non seulement le Front national n’a pas disparu, mais il est en passe de devenir le premier parti de France. Et pour cause, diagnostique le bon Dr Kahn ; les mêmes élites qui dénoncent le FN lui dégagent un boulevard, à force de mépriser les angoisses de la France d’en bas : immigration incontrôlable, capitalisme mondialisé, excès sociétaux en tous genres…
« Complice toi-même ! » rétorque en substance Aymeric. Depuis sa cour de récré, il accuse Kahn d’ « accréditer les thèses du Front national » sous prétexte que l’autre ne dénonce pas assez le « drame » des 25 %. « Mais on l’a dit vingt-cinq fois, que le FN c’est mal, et tout le monde sait ce que j’en pense ! Mais avec ça, où en sommes-nous ?
« Au fond, conclut l’invité à l’adresse de Caron, dans ce livre je parle de vous et ceux que vous représentez. Vous expliquez aux gens que leurs problèmes sont des fantasmes et qu’ils sont fous ! Résultat : quand vous dites « populiste », ils entendent « populaire ». Pas mieux !
En fin d’interview, c’est le jeu, Jean-François doit répondre à un tweet au hasard (ou pas). Celui-là lui rappelle une saillie coupable : au lendemain de l’arrestation de DSK, il résumait un peu vite l’affaire Nafissatou Diallo à un « troussage de domestique ». Mais dès le lendemain Kahn regrette publiquement ces propos, n’hésitant même pas à les qualifier de « connerie ».
« Reconnaissons-le, quand on dit une connerie ! » conclut-il en regardant Aymeric dans les yeux. Peine perdue ! Depuis ses débuts à Canal plus, jamais l’autre n’a reconnu la moindre « connerie ». Dans ce domaine décidément « le temps ne fait rien à l’affaire », comme disait Brassens.
[Article publié dans Valeurs Actuelles]