Le 12 mars dernier, le cargo italien Grande America prend feu et sombre au large de nos côtes. 27 personnes se trouvaient à bord.
Aucun décès n’est à déplorer: le passager et les 26 membres d’équipages ont pu fuir à bord d’un canot de sauvetage avant d’être recueillis par un bateau anglais.
Pourtant, en allumant la radio ou la télévision quelques jours plus tard, on pouvait avoir un doute.
« Le naufrage du Grande America a déjà fait deux victimes », a-t-on entendu sur France Info.
Et tout de suite, j’ai pensé que j’avais mal compris les informations précédentes, que des occupants du navire n’avaient pu être sauvés malgré les recherche. Cela a duré une seconde. Ensuite j’ai compris que les victimes en question avaient des plumes et un long bec. Honte à moi, j’ai ressenti comme une forme de soulagement.
Et BFMTV ne dit pas autre chose, mais avec les images, pas de risque de confusion :
C’est un fait incontestable : ces oiseaux sont bien morts à cause des nappes d’hydrocarbures qui se sont constituées à la suite du naufrage. Mais ils ne sont pas les « victimes du naufrage »; ou bien ils en sont seulement les « victimes collatérales ».
Entre outre, l’expression « faire des victimes » ne s’applique, en principe, qu’à des êtres humains. Traditionnellement, on dit qu’une marée noire « cause des dégâts » ou qu’elle « provoque une catastrophe écologique ». On parle de ses « conséquences sur l’environnement », au nombre desquelles on mentionne les oiseaux mazoutés.
Dire que ces derniers sont des « victimes du naufrage » revient, pour ainsi dire, à les élever au rang de personnes. Et voilà comment l’antispécisme s’insinue dans le langage médiatique… avant de contaminer le nôtre.
« Pour sauver les paysans, mangez un vegan ! »
Vous pensez que c’est mangeable ? En tout cas, pas cacher…
La mode était, il y a un certain temps, aux « steaks » de pétrole. Avec Grande America, on est servi, et on répète comme l’oncle Donald : « Make America graisse again ».
Désolée, mais pour moi, les victimes peuvent être des animaux puisque ce sont des êtres vivant, dotés de sensibilité. A l’heure où la planète court un grand danger écologique, il ne faudrait pas aller « pinailler » sur l’utilisation de tel ou tel mot !
Vous avez raison : A quoi bon « pinailler » sur tel ou tel mot ?
Parlons donc comme chacun le souhaite. Et libre à chacun de comprendre ce qu’il veut.
Comme l’a fort bien dit Enrique Santos Discépolo dans le tango Cambalache en 1934:
Todo es igual nada es mejor
lo mismo un burro que un gran profesor
(Tout se vaut, rien ne l’emporte,
c’est pareil un âne ou un grand professeur !)