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J’ai un ami qui travaille dans l’optimisation fiscale. C’est son boulot. Je le chambre parfois en lui rappelant qu’il a un job d’escroc. Or, comme il me répond toujours : « tu peux dire ce que tu veux, ma vieille, tout ce que je fais pour mes clients est légal ».

C’est gênant, oui.

Mais en pleine affaire des Paradise Papers, il n’est peut-être pas inutile de le souligner : le problème, précisément, le grave problème moral, le scandale donc, c’est que ces montages avantageux pratiqués par des gens extrêmement riches sont parfaitement légaux.

Au moment où j’écris ces lignes, j’entends à la radio que certaines dispositions dénoncées dans les dossiers des Paradise Papers relèvent bel et bien du tribunal. Si c’est le cas, pourquoi ne pas avoir attendu ?

Attendu de savoir quels contribuables s’étaient réellement rendus coupables de pratiques répréhensibles avant de nous livrer en pâture des noms, comme autant d’accusés sommés de « s’expliquer ». Et qui toujours, sans surprise, « ont refusé de répondre à nos questions », selon l’expression consacrée.

La Reine d’Angleterre, le réalisateur Jean-Jacques Annaud, l’homme d’affaires Bernard Arnault, le champion de Formule 1 Lewis Hamilton, le designer Philippe Stark, l’actrice Keira Knightley, le chanteur Bono, la chanteuse Shakira, sans oublier Madonna, un ami d’enfance de Trudeau, des proches de Trump, et tant qu’à faire le Prince Charles.

Tous coupables.

Or, ce qu’il faudrait pour être juste, c’est dénoncer un système, pas s’acharner sur des gens qui, pour la plupart, ont tout simplement délégué à des cabinets d’experts spécialisés dans l’optimisation fiscale, comme celui où travaille mon ami, le soin de gérer leur fortune. On ne me fera pas croire que Shakira entend quoi que ce soit à la purgation de plus-value par donation-cession.

Shakira-sexy

En outre, lors du dévoilement des Paradise Papers, comme lors des révélations intitulées Panama Papers, je n’ai pu m’empêcher de repenser à une interview qu’a donnée le grand journaliste Pierre Péan au sujet des affaires à scandales, il y a quelques années déjà. Il disait son malaise face à la notion de « journalisme d’investigation », rappelant que les médias ne sont ni la justice ni la police. Il lui préférait l’expression « journalisme d’enquête » et rappelait que, bien souvent, les enquêtes conduisant à des révélations ciblées sur des personnes relevaient en grande partie de la « gestion de fuites ». Or, derrière une fuite se cache souvent une volonté de détruire quelqu’un.

Il est toujours dommage que les journalistes acceptent d’entrer dans le jeu de la dénonciation en place publique pour le plaisir de nuire. Mais il est vrai que cela doit être particulièrement jouissif…

17 commentaires

    • Voyons, Gérard…

      Une bonne cure de Padamalgam 500 mg, et vous éviterez ce genre de réflexion 😉

      Bien plus sérieusement, concernant ce que vous considérez comme un enfer fiscal, regardez le nombre d’africains qui sont prêt à mourir pour y rentrer…

      Soit dit en passant le système est bien fait. Car nous serions à la place de ces « salauds de riches »… Nous ferions exactement la même chose.

      D’ailleurs votre réflexion sur l’enfer fiscal est la démonstration de ce raisonnement.

      Je vous souhaite une belle journée

      • Les Africains qui se bousculent pour entrer, vivre et proliférer dans l’enfer fiscal français –car c’en est un– n’ont aucunement l’intention d’y être touchés par les flammes. Ils rejoindront la cohorte, forcément majoritaire (c’est la tare de la démocratie), de ceux qui contribuent peu ou pas mais qui exigent beaucoup –des autres! Et cette majorité qui enfle d’autant plus vite que les contribuables solvables (ce qui ne veut pas dire riches) s’exilent plus nombreux, grossit chaque année de 220000 nouveaux arrivants légaux (chiffre officiel), 80000 immigrants illégaux (estimation, fourchette basse) et 120000 naissances (estimation, fourchette basse), soit près d’un million tous les deux ans, compte non tenu des nouveaux migrants appelés réfugiés. L’enfer fiscal français n’est pas près de laisser refroidir les chaudrons.

        • Cher Jean-Claude Rouquet,

          Bien sûr qu’il y a quelques ordures égoïstes. Mais la réalité des chiffres est légèrement différente. En particulier, les aides sociales ont ceci de particulier qu’une bonne partie de ceux qui y ont droit ne les utilisent pas. Exit donc ce pseudo argument sur ceux qui ne contribuent pas et exigent beaucoup.

          Le contribuable simplement « solvable » n’a pas les moyens de s’exiler. Une grande partie de sa solvabilité est liée au foncier qu’il détient. Par ailleurs, je crois l’avoir déjà expliqué tantôt sur un autre post, mais une partie de cette solvabilité est due au « cadre », cadre qui ne tient que par le pillage systématique de l’Afrique par les européens.

          Bref, le monde est très loin d’être blanc.

          Cher Ricoxy

          De mon île, je vous salue bien. J’ai évité le génocide, ceci dit. Mes ancêtres ont assez tué pour moi. Mais là encore il y a une réalité objective: dans les dix plus grandes fortunes mondiales, 8 ou 9 sur 10 se sont créées sous l’action de leur détenteur. Je préfère un tel système (avec toutes ses imperfections) à celui que M. Rouquet semble défendre (à savoir le privilège de naissance).

          Je vous souhaite à tous deux une belle journée, en dépit de nos divergences d’opinions.

      •  
        « Soit dit en passant le système est bien fait. Car nous serions à la place de ces « salauds de riches »… Nous ferions exactement la même chose. »
         
        Je m’inscris en faux. Quant à moi, je ferais pire : je tuerais tout le monde et j’irais dans une île déserte ouvrir un petit commerce. Le magasin s’appelerait : « Au Père Ubu. Décervelage en tous genres ».
         
         

  1. Optimisation fiscale, c’est trop vague. Les lis Cosse, Pinel, Duflot et toutes celles qui les ont précédées (depuis Malraux) sont des lois d’optimisation fiscale pour le construction locative. Et il y en a pour les panneaux solaires, l’isolation des habitations et que sais-je encore. Et toutes génèrent une activité de conseil direct ou indirecte qui proposent de la sorte de l’optimisation fiscale.
    Or si la loi le prévoit, c’est que l’Assemble Nationale représentant le peuple de France l’a voulu ainsi. Personne n’aurait dans l’idée de chercher des noises à qui que ce soit sur le sujet, ou personne ne devrait en avoir l’idée.
    Il est des textes de lois à destination du plus large public, donc présentés plus clairement et relayés plus simplement que bien d’autres. Ils sont généralement condensés dans un même article.
    Mais d’une façon plus générale, le droit n’est pas si simple qui oblige à référer à plusieurs articles, à plusieurs codes. C’est vrai aussi, mais en pire, dans la fiscalité. Le moins que l’on puisse dire est que ces gens-là n’ont pas le point de vue marxiste de l’économie qu’enseigne l’Université française. L’argent n’est pas figé dans un tonneau dans lesquels les plus forts prennent la part du lion. L’argent bouge, il est là où il bouge, et c’est un flux sur lequel chacun perçoit une dîme.
    Et bien ces Messieurs du fisc, lorsqu’ils voient que ça bouge, de préférence que ça augmente, ils vont prélever. Et la question n’est pas de savoir pour quel motif, car ils en trouvent toujours un là où ils vont.
    Ceci pour dire que, tout ce qui est fiscalité peut relever du Tribunal (obligatoire pour protester) et que, a minima une appréciation de soupçon de fraude fiscale peut-être à relativiser.’une appréciation fiscale n’est pas à la portée de tout le monde

  2. Aaaaah, l’écran de fumée de la « légalité » !!! Comme il est séant de s’y complaire !

    Mais remettons les choses en perspectives…

    En ne payant « légalement » pas d’impôts, ou fort peu, que vous soyez personne physique ou morale, vous crachez à la face de tout ceux qui n’ont pas les moyens de défiscaliser (les contribuables, mais aussi PME/TPE), et qui eux doivent payer RUBIS SUR L’ONGLE leurs impôts.
    En leur crachant à la face, vous les volez par le même temps : vous les volez en profitant d’un système de santé que vous ne financez pas, vous les volez en profitant d’un système social (les fameuse allocations familiales qui sont octroyées sur une simple résidence + inscription CAF) que vous ne financez pas, vous les volez en demandant à bénéficier de services de police que vous ne financez pas etc…

    Se cacher derrière le légal, c’est bien… Mais quid du moral ? Vous semble t’il logique et normal que l’on puisse légalement s’arranger pour garder encore plus de pognon, alors qu’on en a déjà beaucoup, en s’abritant derrière des dispositions légales (votées un peu entre amis hein…) ?

    La crise morale fait partie des étapes menant à l’insurrection. Et il n’est pas moral de demander à une classe moyenne déjà à bout de souffle de tenir un pays à bout de bras, dès lors que les classes supérieures peuvent échapper à l’impôt, même si c’est légal.

    • « Tout ce qui n’est pas défendu par la loi ne peut être empêché, et nul ne peut être contraint à faire ce qu’elle n’ordonne pas. »
      C’est ce qui est légal qui fonde la liberté.

      Si vous craignez l’insurrection d’un pays soumis à la seule loi, je crains bien plus d’avoir un pays soumis à la morale; c’est-à-dire à tous les ressentiments des uns et des autres (le vôtre, par exemple), à la dénonciation des suspects, au lynchage en ligne, aux médias éducateurs, à la propagande, au ministère pour la dénonciation du vice et la promotion de la vertu etc. On en a déjà suffisamment comme ça. La preuve.

      • Effectivement… D’ailleurs, jusque récemment, il était légal de se taper des mineurs très très jeunes en Thaïlande… Si l’on suit la même logique que vous, c’est proprement scandaleux d’avoir imposé un ordre moral par la loi !

        Vous savez très bien que votre position est indéfendable, car la Loi n’est pas immuable, elle est relative à une époque… Et s’il est maintenant illégal de tirer sur ces salauds de pauvres quand ils demandent à ne pas crever de faim, ou à simplement avoir une vie digne dès lors qu’ils ont un travail, c’est d’un cynisme achevé que de se cacher derrière la loi pour assumer la possibilité de ne pas remplir le contrat social qui vise à participer à la vie de la société, dont on profite également.

        Quelqu’un a fort justement rappelé comment les grecs antiques considéraient la corruption…

    • Merci à Florian pour sa mise au point qui me semble être du bon sens et
      de l ‘honnêteté En effet on peu à juste titre  » s étonner que des règles soient mises en place dans la sociéte pour que certains puissent s’ empiffrer d’ argent alors que dans le monde restent tant de miséreux Quand à faire croire que « ces dispositions légales soient approuvées par le bon peuple :c ‘est une blague Aristote pensait en son temps que c’était la classe moyenne qui faisaient tenir une société mais évidenment c ‘était un vieux farceur !!! Aujourd’hui nous avons fait des progrès voyons !Aujourd ‘hui c ‘est :vive le veau d’ or et …salauds de pauvres !!!

      • À leur époque, les anciens Grecs punissaient la corruption bien plus que la meurtre, peine de mort. Ils considéraient qu’elle tue l’équilibre social en engendre des risques de guerre civile.

    • L’insurrection ? Comme vous y allez, mon bon !
      Pour commencer je constate que si vous passiez moins d’heures au chevet des merdias, écrits ou télévisés, vous seriez beaucoup moins sensible au chant de leurs sirènes.
      Pour continuer, en paraphrasant un autre intervenant, tout ce que vous critiquez, sans doute parce que vous n’êtes pas membre du club, est effectivement légal.
      A partir de là, au lieu de vous époumoner sur les forums, aller faire une explication de gravures à votre député, ou déclenchez seul votre insurrection, ce n’est pas beau d’être jaloux !

      • Jaloux ?

        Parce que vous pensez que c’est être jaloux alors que je vis seul et que j’ai déjà du mal à boucler mes fins de mois, que de prendre des leçons de la part de personnes qui n’auront jamais de problèmes en fin de mois ?

        Vous allez me parler d’études… Mon bon monsieur, je parle 5 langues dont le francais (dont couramment anglais allemand et portugais… l’espagnol reste la langue que je maitrise le moins parmi celles que je parle). Je suis titulaire d’une licence, et je peux à l’heure actuelle m’enorgueillir de 15 ans (minima… je ne compte pas le temps que j’ai passé à travailler pour financer mes études…) d’expériences dans « mon métier ». Est ce être jaloux que de s’étonner de ne pouvoir vivre correctement avec ce bagage ? Mon métier, c’est la restauration, pas un métier de parasites comme ces consultants ou ces startup dont on se demande vraiment si leur création répond à un besoin ou à une possibilité de montages fiscaux.

        L’argent, c’est un tas global, qui ne doit ni trop augmenter, ni trop baisser (inflation, déflation… bref…). Le problème mon bon monsieur, est qu’a l’heure actuel, ce tas global est divisé de moins en moins entre « classes moyennes et pauvres » et de plus en plus directement entre déjà riches…

        Non monsieur, ca n’est pas de la jalousie, c’est de l’inquiétude… Parce qu’il n’est pas normal quand on a un métier en France en 2017 de devoir tirer le diable par la queue, même si l’on travaille largement au dela de la limite légale…

        Je vous souhaite tout de même la bonne journée, mais vous apprendrez mon bon monsieur qu’il ne peut être question de jalousie dès lors que la survie d’une des deux parties est en jeu.

  3. La notion de « légalité » mérite d’être regardée de près. Elle n’est pas absolue, mais très relative, elle n’a de sens que pour un pays donné, pour une legislation donnée. Ceux qui répètent « c’est légal » se gardent bien de préciser où. Il n’y a pas longtemps des pervers allaient en Asie pour disposer de petits garçons ou petites filles, et eux aussi disaient « c’est légal »… Et c’était vrai, sur place.
    On peut observer :
    – des pays valident des dispositifs idéaux pour les fraudes : trusts anonymes, prête-noms, ports francs.
    – des pays tolèrent et même recherchent le recel. Ils ne peuvent pas ignorer qu’ils hébergent de l’argent volé.
    Alors dire « c’est légal », sans plus, fait doucement sourire. C’est au mieux confondre l’esprit et la lettre des lois.

  4. N’étant pas millionnaire, et loin s’en faut, je n’ai jamais eu l’occasion de faire appel à un optimiseur de patrimoine.
    Ceci étant dit, si un jour Lakshmi se penche sérieusement sur mon cas, rien ne m’empêchera de contacter une de ces braves personnes et de lui donner toute latitude pour la protection de mon pécule.
    Toutes ces simagrées moralisatrices sur l’optimisation fiscale ne sont que du vent, les journalistes, souvent manipulés, n’étant pas des juges ou des procureurs de la bonne conduite. Et n’oublions pas, chers euro-béats de la bienpensance, que l’Europe est dirigé par un quidam, alias JJJ, qui fut en son temps le champion toutes catégories de cette fameuse optimisation.

    PS : je viens de découvrir votre blog et vos articles, et je suis presque fan.

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