Une bio raconte ce « soldat inconnu » qui a libéré Paris
Qui, en France, connaît Amado Granell ? Pas grand monde, en vérité. Et pourtant, cet Espagnol né en 1898 dans la province de Castellon, située entre Barcelone et Valence, a joué un rôle très important dans l’histoire de France. Le 24 août 1944, il fut le premier officier de la France libre à entrer dans Paris et il assura plus tard la sécurité du Général de Gaulle lorsque ce dernier y entra à son tour prononçant ces mots immortels : « Paris outragé, Paris brisé, mais Paris libéré ! »
C’est à cet homme que Cyril Garcia a décidé de consacrer une biographie, Amado Granell, libérateur de Paris, paru aux Editions de L’Harmattan et préfacé par Michel Goya. L’auteur nous fait voyager. Granell participe à la guerre d’Espagne, où Granell, républicain de gauche ni anarchiste ni communiste, est déjà considéré, malgré la défaite, comme un officier de valeur dans la lutte pour la République espagnole. Il atterrit ensuite à Oran comme beaucoup d’autres républicains espagnols et finit par être engagé par l’armée de la France libre. Il sera de la fameuse 2e DB commandé par le Général Leclerc et sera donc du Serment de Kouffra, où on l’on jura de ne s’arrêter que lorsque Strasbourg serait libérée. De fait, Granell se lavera les mains dans les eaux du Rhin comme il s’y était promis. Le Général Leclerc lui décernera lui-même la Légion d’honneur et la veuve du général de la 2e DB enverra un télégramme de condoléances lorsqu’il trouvera la mort en 1972 dans un accident encore inexpliqué.
C’est que l’aventure d’Amado Granell ne s’est pas arrêtée à la fin de la deuxième guerre mondiale, comme l’explique Cyril Garcia. L’ancien officier de la France libre disait joliment que « l’Espagne était sa mère, et la France sa fiancée ». Il ne prendra donc jamais la nationalité française qu’on lui proposa alors qu’il vécut en France très longtemps et qu’il en avait libéré la capitale. Il se sentait espagnol par-dessus tout et joua un rôle non négligeable dans la transition démocratique de son pays en organisant rapidement après la guerre la montée en puissance de Juan de Bourbon, futur roi d’Espagne. La monarchie constitutionnelle constituait pour lui la seule solution pour assurer un jour cette transition pacifiquement. Granell n’était pas seulement un militaire de haute valeur et d’un courage hors-norme ; il était aussi doté d’un sens politique aiguisé, ainsi que le démontre Cyril Garcia avec le cœur et le talent qu’il met dans son ouvrage.
Je conseille donc cette biographie aux lecteurs de Causeur mais aussi et plus précisément à Anne Hidalgo, maire de Paris et originaire de la patrie d’Amado Granell. Comment se fait-il qu’encore aujourd’hui, aucun hommage ne soit rendu à l’un de ses libérateurs ? Comment se fait-il qu’une rue ou une place ne porte pas son nom ? Comme le relatait l’autre jour Daoud Boughezala, la maire de Paris a eu la bonne idée — et le courage — de baptiser une place parisienne du nom de Mireille et Jacques Renouvin. Amado Granell mérite sans aucun doute un hommage du même rang. Parce que si son pays n’était pas la France, il a servi la France Libre, dont il fut le premier soldat à fouler les pieds dans Paris outragé, brisé, martyrisé…
Amado Granell, libérateur de Paris, Cyril Garcia, Ed. L’Harmattan.
Excellente mise au point qui permet de rendre hommage aux étrangers qui considèrent la France comme leur seconde patrie au lieu de cracher dessus
Fils d’un de ces soldats patriotes de la 2ème DB qui ont libéré Paris, je ne peux qu’être d’accord avec cet hommage à Amado Granell et à travers lui aux républicains espagnols de la Nueve qui entrèrent les premiers dans la capitale sous les ordres du capitaine Dronne. Cent quarante-six hommes de la Nueve sur cent soixante, étaient espagnols, souvent des anarchistes et des communistes.