Sophie Montel a perdu d’un fil. Craignait-elle de gagner ?

 

 

Le journaliste de France 3 Franche-Comté Jérémy Chevreuil l’a constaté sur le coup des 22h30 : « En obtenant plus de 370 000 voix, soit 40 000 de plus qu’au premier tour de la présidentielle de 2012, le Front national a crevé son plafond de verre en Bourgogne-Franche-Comté ». Comme nous l’annoncions il y a une semaine, c’est bien dans cette région  que le parti frontiste avait le plus de chances de l’emporter au soir du second tour. Alors qu’il était distancé de plus de dix points dans les trois autres régions espérées, du côté de Marine Le Pen, Florian Philippot et Marion Maréchal-Le Pen, Sophie Montel n’est battue que de deux points par Marie-Guite Dufay, qui défendait les couleurs d’une gauche remobilisée. Si les dix points supplémentaires de participation ont profité aux trois listes, c’est sans doute la candidate socialiste qui en a le plus bénéficié, ce facteur s’ajoutant à un excellent report des voix de toutes les listes de gauche éliminées au premier tour – voire d’une petite partie des électeurs du Modem.

Lors de la conférence de presse donnée à Rans, village dont sa tête de liste dans le Jura est le maire, Sophie Montel a dénoncé le « système UMPS » qui aurait ainsi construit cette « victoire à la Pyrrhus ». Elle a admis une déception d’autant plus grande que le scrutin s’est joué « dans un mouchoir de poche ». Mais, à notre humble avis, la candidate FN s’exonère un peu de sa responsabilité, jouant au Calimero de service. Alors qu’elle n’était pas sous les feux des médias, contrairement aux trois personnalités les plus connues de son parti, et qu’elle bénéficiait d’une triangulaire, Sophie Montel a raté le coche. Lors de cette conférence de presse, nous lui avons d’ailleurs demandé si elle ne regrettait pas son attitude plutôt cassante envers le candidat de Debout La France une semaine avant à la télévision régionale. Elle nous a répondu répondre à une attitude encore plus cassante dudit candidat. Certes. Mais une candidate de second tour doit-elle se comporter comme au premier ? N’aurait-il pas été plus adroit de comprendre l’autonomie de son contradicteur et de se montrer malgré tout rassembleuse ? Erreur fatale. Le FN a sans doute crevé son plafond de verre dans la tête de beaucoup d’électeurs, y compris dans cette région qui aurait pu basculer. Mais ses candidats n’intègrent pas suffisamment la possibilité d’être un « second choix »,  fait incontournable dans un système électoral à deux tours. Il faut se montrer modestes dans ces occasions stratégiques.

Mais Sophie Montel la voulait-elle vraiment, cette victoire ? Un journaliste local, qui l’a suivie durant toute cette semaine, nous expliquait que Sophie Montel ne désirait peut-être pas tant que ça s’installer dans un fauteuil de présidente de région et diriger du jour au lendemain des milliers de fonctionnaires, alors qu’elle apprécie tout particulièrement son nouveau mandat de député européen. Et si finalement, dès le 6 décembre au soir, Sophie Montel, qui apparaissait finalement comme la seule chance de son parti de colorier une région en bleu marine, n’avait pas été saisi du célèbre mal qui avait fait la réputation de Yannick Noah avant 1983 : la peur de gagner ?

*Photo: Albert Ziri.

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