Michel Sardou est un grand naïf. Je me souviens d’un Sept sur Sept de 1993. Il était l’invité d’Anne Sinclair et il avait espéré tout haut qu’Edouard Balladur, premier ministre de la seconde cohabitation, deviendrait ensuite celui d’un Jacques Chirac élu deux ans plus tard. Pourtant très jeune,  j’avais trouvé bien candide ce conscrit de mon père, qui côtoyait tout ce beau linge bien davantage que le jeune militant provincial que j’étais[1. Sardou, pas mon père !].

Près de vingt ans après, cette touchante naïveté n’a pas disparu.  Sardou narre avec étonnement sa « convocation » à l’Elysée après qu’il eût des mots sévères envers l’hôte des lieux. Cela doit faire plus de trente ans qu’il connaît Nicolas Sarkozy, et il découvre comment fonctionne le personnage. Bernard-Henry Lévy avait expliqué, sur France Info il y a deux ans environ, sa relation au Président en ces termes   : « On est avec lui ou contre lui. Il ne peut pas imaginer qu’on soit son ami et qu’on ne le soutienne pas politiquement ». Et BHL d’ajouter qu’il savait lui, dissocier amitié et proximité politique, ce qui l’avait amené à soutenir Royal en 2007 malgré son amitié pour Nicolas Sarkozy, ce dernier ne pouvant l’accepter. Sardou, l’ami, découvre aujourd’hui ce trait de caractère -guère flatteur- du Président. Sardou l’électeur, en revanche, semble déjà déçu depuis quelques mois. Dans un entretien accordé au Parisien en mai 2010, il n’était déjà guère tendre avec le Président  : « J’y ai cru, je n’y crois plus. Quand on vous promet quatorze réformes et que l’on en fait pas une…Je suis déçu. » Au point qu’aujourd’hui, lorsqu’on lui demande s’il pourrait voter à gauche, il répond : « Pourquoi pas ? »

Et là, les amis, c’est quand même une révolution. Fermez les yeux et imaginez l’auteur du « Temps des Colonies », de « Je suis pour », des « Deux écoles » et de « Vladimir Illitch » dans l’isoloir écarter le bulletin de Nicolas Sarkozy pour glisser celui de François Hollande dans l’enveloppe. Je le fais en même temps que vous. Vous y parvenez ? J’y suis parvenu sans peine. Non, je ne me drogue pas ! Et vous aussi, vous y êtes arrivés, ne mentez pas ! Parce que voter à gauche lorsqu’on est de droite en 2012, parce qu’on ne croit pas -ou qu’on ne croit plus- à son candidat, c’est aussi facile que voter à droite quand on était de gauche en 2007 parce qu’on n’imaginait pas sa candidate présidente. Parce que ce qui était inimaginable en 1974 ou en 1981 quand le clivage droite-gauche signifiait encore quelque chose, ne l’est plus à notre époque.

Ceci nous le savions déjà si on avait étudié les campagnes référendaires de 1992 et de 2005, lorsqu’on tentait d’expliquer les raisons qui poussent des ouvriers votant autrefois pour le PCF à choisir Marine Le Pen ou que, plus récemment, le projet démondialisateur d’Arnaud Montebourg intéressait, voire mobilisait, au delà des sympathisants socialistes. Mais le fait qu’un chanteur aussi populaire que Sardou envisage aussi crûment de voter à gauche constitue un signe dans les deux sens du terme. Le signe de l’obsolescence politique de ce clivage, mais aussi un signe las adressé à tous les fans de l’auteur du « France » : « Je suis comme vous, j’ai compris, ils défendent la même politique. Désormais, je fais comme vous, je zappe !».

14 commentaires

  1. au bals des hypocrites,,je pense que SARDOU ,et DD ne disent pas la vérité
    dans notre société,,,
    ON NE PEUT LA DIRE
    qui peut croire SARDOU,,,dans l »isoloir,,M LEPEN a toute sa chance,,,
    mais le DIRE?
    SE SERAIT UN SUICIDE pour un chanteur,,
    tout ceux qui sont sur le terrain,savent que notre NIKO n »a AUCUNE chance,
    des SARDOU,il y en a des MILLIONS
    donc ,pour le deuxième tours,,
    QUE VA FAIRE NDA

  2. @Michel

    Je ne vois aucune hypocrisie dans le propos de Sardou ni dans le mien.
    Que Marine Le Pen ait des chances d’être présente au second tour, nul n’en disconvient.
    Mais ce n’est pas le sujet de ce papier.
    Quant à demander ce que NDA fera au second tour de l’élection présidentielle, je suppose qu’il est comme moi : il attend de savoir quels en seront les deux protagonistes.

  3. Parkway, nettoyez-vous la bouche avec du savon ! Merci.

    La gauche ? Un temps pourfendeuse du grand capital (en général pendant les campagnes électorales) puis faisant les yeux doux au capitalisme statocratique tendance Bruxelles ?

    Pinochet était plus socialiste que ces gens-là !

  4. david hypocrite était un peu fort,,,pour vous,
    je m-excuse
    mais un chanteur ne peut dire ,,je vote pour M LEPEN
    il serait de suite,mis a l »écart,,
    de gauche-droite,,,NORMAL

  5. Que valent les analyses politiques de Sardou ? Valent-elles les analyses sur l’immigration de Josiane Balasko ?

    Sardou est un chanteur populaire dont ses paroliers lui faisaient déclamer des textes parlant d’un temps qui n’existe plus enseveli par le capitalisme dont Sarkozy a été un digne représentant.

    Comme dirait Lama, le chanteur, pas le gardien, cocu mais (pas) content le Sardou.

  6. La grande politique vit de principes et meurt de querelles partisanes ; elle récuse ainsi les pièges tendus à la démocratie par les arrangements d’appareil et toutes subtilités de cet ordre.

    Quant au second tour d’une présidentielle, un souverainiste partageant toutes les lignes essentielles – et même un peu plus que cela – du programme de MLP, présente les options politiques du candidat opposé à celle-ci – prenons Hollande par exemple – comme tout aussi valable que ces mêmes options qu’il défendait lui-même au premier tour – bec et ongles – il y a de quoi, tout de même, se poser des questions sur la sincérité et les intentions véritables du gugusse en question.

    On commence par ni pepsi, ni coca, et on finit par vive les boissons gazeuse à l’extrait de cola.

    Je me prononce pour que l’on arrête de nous prendre pour des buses. C’est possible ?

    Si NDA est sincère, il doit rejoindre le pôle patriote. Le leader du camp national-républicain est une femme, et il n’y a pas besoin de primaires pour le savoir.

  7. Désolé, mais je ne vois pas en quoi la gauche et la droite n’existent plus. Les visages et les noms ont changé, la pugnacité militante a disparu, la lutte somnole, mais les classes sont bel et bien la : 1% qui détient toutes les richesses et 99% qui subissent. Quant à Sardou, on s’en fout.

  8. Sardou une référence ? Il est pourtant difficile d’être plus atypique que lui politiquement. A une certaine époque, on l’a classé hâtivement d’extrême-droite à cause d’une chanson qu’il valait mieux prendre au second degré. En réaction, il s’est inscrit au PS mais ne s’y est pas trouvé à son aise. Ce n’est pas infamant, mais il doit y avoir mieux comme indicateur…

  9. Voila un article sur un homme que vous ne connaissez pas, en tout cas pas plus que beaucoup de personne n’ayant pas chercher à comprendre les textes de Sardou.

    Le temps béni des colonies est une chanson à prendre au second degre, qui au final est justement une critique des néo-colonialistes. Il dit être pour, cette chanson n’est pas un éloge à la peine de mort, il est contre, il a déjà expliqué n’avoir voulu parler que de la loi du talion et du désir de certain à vouloir tuer des criminels.

    Voila, vous citez et à juste raison car ça va dans le sens de votre opinion et de votre article des chansons dites de droite.

    Mais Sardou est-il véritablement de droite? On laisse de coté malheureusement des chansons montrant un tout autre visage de ce monsieur. Lorsqu’il chante « Le privilège », chanson magnifique sur l’homosexualité et la difficulté d’en parler, « Vladimir Illitch » qui pointe les dérives du communismes tout en affirmant que les idées socialistes au départ étaient beaux et ne sont pas forcement mort. « J’accuse » qui dénonce toutes les dérives de la société.
    Pour finir, je me permet de vous conseiller l’écoute d’une chanson d’un véritable homme de droite, écrite par Michel Sardou, « A la volonté du peuple ».

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