J’ai visionné le « Parlons.net » de cette semaine, et dont Alain Juppé est l’invité. Et le moins qu’on puisse écrire, c’est que j’ai à y apporter quelques commentaires. Il se trouve en effet que j’ai, dans mon déjà ancienne vie politique, eu à y connaître l’actuel maire de Bordeaux.

Quand je dis connaître, ce n’est pas personnellement. Entre 1990 et 1997, j’ai passé l’essentiel de mon temps à militer pour son concurrent officiel, Philippe Séguin. Comme l’objectif était de déboulonner Alain pour mettre Philippe à la place, nous n’avons pas ménagé nos efforts. Ces derniers consistaient, entre autres, à bien cerner -dans les deux sens du terme- l’adversaire, b.a.ba de l’activisme politique. Sans verser dans l’auto-flagornerie de mauvais aloi, j’ai la faiblesse de penser que cela me donne un avantage sur David Abiker, Samuel Potier et Sylvain Lapoix[1. Respectivement représentants à Parlons.net de leurs maisons France Info, Figaro.fr et Marianne2.fr] qui semblent être issus de ma génération et qui n’étaient pas encore à l’époque les excellents journalistes politiques qu’ils sont maintenant[2. Je mets de côté Pierre Haski, de Rue89, qui semble plus âgé et qui aurait peut-être pu, lui, rappeler ce qui va suivre].

Donc, le Juppé, je peux vous en parler. Déjà au tout début des années 90, chaque année au moment d’universités d’été du RPR auxquelles je participais assidûment, on avait droit à l’article sur le « nouveau Juppé », qui faisait semblant de fendre l’armure -bien avant Jospin. A tel point que ces allusions à la « pudeur » du secrétaire général du RPR, les confessions sur le fait que « non, il n’est pas si froid que ça », faisaient figure de marronniers de la presse politique de chaque début septembre, à l’instar des dossiers sur le marché de l’immobilier ou le pouvoir des Francs-Maçons à d’autres saisons. Pendant les grèves de 1995, il passe à l’offensive pipole en ouvrant grand les portes de son logement de fonction à Matignon : on le voit ainsi penché sur le berceau de la petite dernière, image chopée par Paris-Match dans le but, encore, de faire passer le message récurrent :« vous voyez qu’il a un coeur ». C’est aussi à cette époque qu’il s’épanche, en long, en large et en travers, sur sa rencontre avec Isabelle, mère du bébé cité plus haut. Isabelle par ci, Isabelle par là… En 1997, lors d’un reportage-portrait de Serge Moati consacré à Philippe Séguin, on voit Alain enlaçant Isabelle et, devant la caméra dans un élan adolescent, poser peu délicatement les mains sur les parties les plus charnues du corps de sa dulcinée[3. Lors de la projection privée en avant-première du reportage, Séguin se serait exclamé :« Vous voyez bien qu’il est humain ! »]. Tout cela pour dire que dans la catégorie « j’aime montrer mon émotion aux passants »[4. Hommage à Pierre Desproges], Juppé a précédé et, peut-être même, montré la voie à Sarkozy. Petite parenthèse au passage : il ne faudrait pas, à l’instar de Ségolène Royal, si un jour le couple Juppé donnait des signes de faiblesse et si l’un des deux se laissait aller à quelque infidélité, que Monsieur crie au loup en découvrant des photos volées dans Gala, Voici ou Paris-Match. Disons qu’il l’aurait bien cherché. Fin de la parenthèse.

Donc Juppé, depuis près de vingt ans, a un plan média pour nous expliquer qu’il est plus humain qu’on ne le dit. Il écrit encore un bouquin[5. « au nom débile » selon le Président lui-même  ; propos rapportés par le Canard de cette semaine] pour nous l’expliquer une énième fois. Deux questions s’imposent : dans quel but ? Et, surtout, est-ce bien la bonne stratégie ?

Le but, faisons une hypothèse, cela peut être de se rendre… disponible en envoyant le message suivant au Président :« Tu vois, j’ai bien compris ce que c’est d’être ministre sarko-compatible ; il faut savoir communiquer son émotion et faire passer un message ; le reste, je l’accepte, est géré directement à l’Elysée ». Mais cette stratégie, qu’on me pardonne, est furieusement « petit-bras ». Si, au contraire, Alain Juppé redevenait cet être austère, image qu’il a encore dans une large partie de l’opinion malgré tous ses efforts, ne serait-il pas une véritable alternative à Sarkozy ? Après une indigestion de pipole, d’exhibitionnisme bling-bling, et d’émotion à outrance, les Français n’auront-ils pas, instinctivement, la tentation de se tourner vers une personnalité connue pour son sérieux, sa discrétion, voire même son côté plutôt chiant ? C’est bien possible. Et si c’était le pari de François Fillon ?

5 commentaires

  1. “si un jour le couple Juppé donnait des signes de faiblesse et si l’un des deux se laissait aller à quelque infidélité, que Monsieur crie au loup en découvrant des photos volées dans Gala, Voici ou Paris-Match. Disons qu’il l’aurait bien cherché. Fin de la parenthèse.”
    ce genre d’arguments me fait penser à ceux servis aux femmes violées: “ah elle l’a bien cherché: elle n’avait qu’à pas aguicher les hommes avec sa mini jupe ou elle avait qu’à mettre un soutien gorge”…
    la vie privée des politiques comme celle des journalistes est sacrée: ce sont eux, politiques ou journalistes ou n’importe lequel d’entre nous, qui ouvre la porte quand il veut ou qui la referme quand il veut….
    le reste ne sont que de bien pauvres arguments dignes des paparazzis…

  2. Vous m’ôtez la conclusion. J’ai souvent en tête l’exemple de Merkel succédant au pétaradant Schröder.

  3. Pourquoi donner le truc à Juppé ? De toute façon il n’a aucune chance, ses commentaires sur l’autisme du Pape sont ceux d’un connaisseur…

    Laissez donc l’opportunité à Fillon.

    Merci.

  4. Moi qui pensais naïvement que dans la catégorie “j’aime montrer mon émotion aux passants »,c’est Fabius qui avait tout appris à Juppé…..

  5. que cela plaise ou non,juppè c »est autre chose que Séguin
    certes,il est froid et a du mal se laisser aller,mais il est sincère et fidèle,
    lui,il n »a jamais lâcher la vérité,donc,il a payer pour un autre,
    tout comme jean t,,,,,,lacher en pature,et oui
    sèguin,lui a échouer partout,même a la tète de notre partie,
    heureusement,il est a la cours des comptes,et la?
    franchement,il m »étonne,il fait du bon boulot,

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