Les divisions du FN ne font que (re)commencer

Libéral, européiste et multiculturaliste, Emmanuel Macron tenait de l’adversaire idéale pour Marine Le Pen. C’était sans compter sur les limites de la candidate frontiste, battue à plates coutures hier soir.

Marine Le Pen, Paris, 7 mai 2017. SIPA. AP22049727_000001

On aura beau dire que Marine Le Pen a doublé les voix de son père quinze ans plus tôt, son score est en-deçà de ce qu’elle pouvait espérer le 24 avril dernier. Après avoir commencé la campagne de second tour sur les chapeaux de roue, Marine Le Pen a perdu la main à mi-course. Alors que le soutien de Nicolas Dupont-Aignan pouvait lui être a priori profitable, elle a signé un accord laissant croire qu’elle tergiversait sur la question monétaire. Puis, incompréhensiblement, elle a abordé le face-à-face avec une agressivité et une hargne incompatibles avec la fonction présidentielle, décevant jusqu’à certains de ses militants et électeurs.

Déception en rase campagne

Après six ans d’efforts pour dédiaboliser son parti, elle a donné au pays l’image exacte forgée par ses adversaires. Nul doute que la posture de candidate ricaneuse a pesé dans le score obtenu par Emmanuel Macron hier soir avec près des deux-tiers des suffrages. Car l’échec de Marine Le Pen est là : alors que ce second tour se structurait sur le clivage qu’elle souhaitait, par rapport à la mondialisation et la construction européenne, alors que près de la moitié des électeurs du premier tour avaient voté pour des candidats rétifs à la mondialisation heureuse, le candidate frontiste n’en a finalement obtenu que le tiers.

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Le problème, c’est donc elle et son parti. On nous rétorquera sans doute que les barrages construits autour d’elle, le fameux cordon sanitaire politico-médiatique en constituent la raison principale. Mais Marine Le Pen avait appris à faire avec. Et le débat de mercredi devait justement permettre de créer des brèches dans les fameux remparts. Au lieu de cela, elle les a sciemment renforcés. Désormais, la voilà à nouveau chef de guerre pour les législatives. Sa défaite constituera-t-elle un frein à la mobilisation des électeurs ou profitera-t-elle au contraire du désordre chez Les Républicains, écartelés entre ceux qui veulent d’ores et déjà travailler avec le président élu et les autres, menés pas le pâle François Baroin ? Assistera-t-on à des remous au sein même du FN alors qu’elle a annoncé dès hier soir la création d’un nouveau parti, en partenariat avec la formation de son nouvel allié Dupont-Aignan ?

Marion en embuscade?

Marion Maréchal-Le Pen n’a pas hésité à montrer sa déception et a regretté certains atermoiements, notamment sur l’euro. On dit la députée de Vaucluse hésitante quant à son avenir politique. Des rumeurs annonçaient même qu’elle ne serait pas candidate à sa succession dans sa circonscription ; sa présence hier soir du côté de Carpentras semble le démentir. Alors que Florian Philippot semble à la fois affaibli par le score de Marine Le Pen et par l’arrivée dans le dispositif de Nicolas Dupont-Aignan qui le rend moins indispensable, Marion Maréchal Le Pen a sans doute une carte à jouer. Il n’est d’ailleurs pas impossible qu’elle s’entende mieux avec le leader de DLF que son rival Philippot. Le résultat des législatives pèsera énormément dans les équilibres ; élection ou non des principales personnalités, nombre de sièges obtenus. Si Marion Maréchal Le Pen parvenait par exemple à prendre la tête d’un groupe parlementaire dont sa tante serait absente, il pourrait y avoir de l’électricité dans l’air. Pas sûr d’ailleurs, que cette hypothèse contribuerait de manière plus efficace à la dédiabolisation. Une nouvelle guerre des Le Pen pourrait bien avoir lieu. La saga familiale n’est pas terminée. Le nouveau président élu ne s’en plaindra pas.