Quand Valls relance la guerre des gauches

Caramba, encore raté ! Comme en mai dernier, il a encore manqué deux signatures aux Frondeurs pour déposer une motion de censure « de gauche » consécutive à l’utilisation en deuxième lecture de la loi travail de l’article 49 alinéa 3 de la constitution.

Ils étaient donc encore cinquante-six à signer cette motion. Quatre entrants mais aussi quatre sortants. Parmi les sortants, on note la présence de Yann Galut qui demandait pourtant mardi avec d’autres la démission de Manuel Valls. Le vote d’une motion de censure étant la meilleure manière d’obtenir la tête du Premier ministre, on pourrait taxer le député du Cher d’incohérence. Mais Galut ne croyait pas dans les chances de cette motion : « Il faudrait pour cela que 100% des députés de droite la votent et le PS a voté le principe de sanction à l’égard des députés socialistes qui la proposeraient. » Pas faux. Mais c’était déjà le cas au mois de mai. Bizarre, vous avez dit bizarre… Les députés proches de Martine Aubry manquaient encore à l’appel ce mercredi. Ils avaient argué en mai que le vote d’une motion de censure de gauche précipiterait la scission du PS. Ils n’ont pas changé d’avis. Du côté de Lille, on fulmine, on grogne mais quand il faut censurer, on n’ose pas.

Pourtant, la posture de Manuel Valls n’était guère enviable hier lors de la réunion du Parti socialiste quand le député proche de Jean-Marc Ayrault, Olivier Faure, a présenté un amendement de compromis soutenu par 123 députés du groupe. Il s’agissait de fixer la prime des heures supplémentaires à 25% comme c’est le cas aujourd’hui au lieu des 10% prévus dans le texte. Les frondeurs promettaient alors de voter le projet de loi et de permettre au gouvernement de se passer du 49-3. Manuel Valls n’en a pas voulu. Comme si le Premier ministre s’ingéniait à faire des « deux gauches irréconciliables » une prophétie auto-réalisatrice. Selon lui, cet amendement n’était pas un compromis mais une « compromission ». Comme le notait un bon esprit, qui a cessé d’adhérer au PS : « La différence entre compromis et compromission ? Le compromis, c’est quand tu votes la déchéance de la nationalité avec LR et le FN, la compromission quand tu veux maintenir la rémunération des heures supplémentaires avec le Front de gauche ». Même si Valls est finalement le vainqueur juridique de la séquence, il n’est pas certain que son intransigeance soit payante du point de vue politique. Au point où en est le texte, l’amendement Faure aurait pu permettre de calmer les esprits, avant les vacances, permettant au Président de donner des premiers signes à l’électorat de gauche hostile à la loi dans l’optique de la primaire, annoncée récemment. Mais Manuel Valls souhaite-t-il vraiment le bien à François Hollande ? On est en droit de s’interroger.

Pourtant, ces derniers jours, Manuel Valls a tenté d’envoyer des signaux à l’électorat de gauche qui croit de moins en moins à la « mondialisation heureuse ». Il a attaqué la directive « travailleurs détachés » et prévenu qu’il n’était pas dans les intentions du gouvernement d’approuver le traité transatlantique. Cette tentative d’adopter un discours davantage souverainiste n’est pourtant qu’un rideau de fumée. Pierre Moscovici, commissaire européen qui a été d’ailleurs invité à une réunion interministérielle après le Brexit, a expliqué en des termes polis dans un entretien à L’Opinion que Manuel Valls ne racontait que des calembredaines.

Alors qu’Emmanuel Macron se sent pousser des ailes et que Montebourg fourbit ses armes pour la primaire, voire une candidature directe au premier tour, Manuel Valls devient un poids de plus en plus lourd au pied de François Hollande. Cela, même une victoire de la sélection française jeudi contre l’Allemagne puis dimanche en finale ne pourra le changer : plus que jamais, le PS est en miettes.

 

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