Ces temps-ci, dans les débats télé, il n’est question que du “choc de moralisation” solennellement annoncé par le président de la République, et de ses contrecoups. Mais comme ça change tous les jours, que diable vous raconter qui ne risque pas d’être démodé avant publication ? Mes idées, bien sûr !
A priori, l’intention de moraliser la vie publique semble bonne. Si bonne, même, qu’elle figurait déjà il y a seize mois dans “Les 60 engagements pour la France” du candidat Hollande. « Je veux une République exemplaire », proclamait-il fièrement en lettres capitales avant de détailler les moyens drastiques qu’il entendait mettre en oeuvre pour y parvenir (engagements nos 47, 48, 49 et 53 — à moins que je n’en aie raté un). Par la suite, comme on sait, le président élu estimera plus urgent de tenir d’abord son engagement n° 31 sur le mariage et l’adoption pour tous. Mais qui sommes-nous pour juger ?
Toujours est-il qu’aujourd’hui, il y a le feu au lac ! Déjà le coup du ministre “technicien” de la fraude fiscale n’avait pas amusé tout le monde… Et voilà que de proche en proche, d’accusations de naïveté en soupçons de complicité, l’ex-“affaire Cahuzac” est devenue celle du gouvernement, du premier ministre et du président lui-même. Bref, une affaire d’État.
L’autre mercredi, donc, le chef dudit État a pris son ton le plus grave et sorti les drapeaux pour réitérer ses promesses d’antan sur la “transparence”. Et d’annoncer un catalogue de mesures propres à éradiquer la corruption politique pour au moins cent ans.
« Je sais, a-t-il martelé, combien les Français veulent le changement par rapport à cette triste succession d’affaires ! » C’était beau comme un discours de candidat à la tribune du Bourget. Sauf que, depuis bientôt un an, l’orateur est lui-même “aux affaires”…
Du coup, loin d’apaiser la tempête, son intervention a déclenché une tornade de critiques tous azimuts. “Trop tard !”, ricanent certains, pour qui cette nouvelle poussée de moraline présidentielle vise surtout à faire oublier sa propre responsabilité (ou irresponsabilité) dans l’affaire gigogne où le voilà empêtré. “Trop vite !”, s’inquiètent les plus aimables qui, sans critiquer l’objectif, craignent qu’un bricolage aussi hâtif ne s’avère inapplicable, voire contre-productif. “Trop loin !”, jugent d’autres enfin, qui redoutent une “dictature de la transparence”. Pour eux, “jeter les élus en pâture à l’opinion” ne peut qu’“alimenter le populisme”. Le pire, c’est que ces mots-là n’ont pas été prononcés par on ne sait quel opposant borné, mais par Claude Bartolone, président (PS) de l’Assemblée. Tu quoque…
Bref « la situation est insaisissable », comme disait de Gaulle avant de s’envoler pour Baden-Baden. Quant à Hollande, Dieu sait où il va et s’il en reviendra. Je ne suis pas politologue, ni même pythonisse… À l’heure où vous lirez ces lignes, peut-être même aura-t-il repris la France en main, et moi gagné à l’Euro Millions.
Article publié dans Valeurs Actuelles, le jeudi 18 avril 2013
Photo © AFP