« I am fond of habits and rites », dit en anglais le héros d’un roman français célèbre…

Et en un sens, moi qui n’ai avec le sacré que des rapports (forcément) narcissiques, je ne déteste pas les rites…
Par exemple celui des vœux pour l’année nouvelle — dont on espère qu’elle sera nouvelle aussi pour l’école.

– Pour une nouvelle école — et même pour une refondation de l’école (joignez donc votre signature à l’Appel pour la refondation de l’école, http://www.refondation-ecole.net/)…
Pour que la liberté pédagogique ne soit plus un vain mot — et je signale que le détracteur en chef de cette liberté pédagogique est Pierre Frackowiack, qui dirige la commission Education du Parti Socialiste (http://www.unsa-education.org/sien/sections/lille/libpedPF.htm) ;
– pour que l’égalité des droits s’impose réellement, en lieu et place de cette « égalité des chances » qui en vingt ans a produit plus d’inégalités que jamais l’élitisme n’en engendra — et ces droits sont le droit à l’instruction, le droit au savoir, l’égal accès à toutes les formations en fonction du mérite, et le droit à une compétition enfin fondée sur la compétence ;
– pour que les établissements soient dotés d’une large autonomie, qui permette une indépendance aussi bien vis-à-vis du ministère, qui sait toujours mieux que quiconque ce qui se passe à huit cents kilomètres de la rue de Grenelle, et des Régions, où des élus, parce qu’ils sont élus, s’imaginent avoir des compétences ;
– pour que les enseignants aient la possibilité d’être formés à leur métier, qui consiste à transmettre un savoir — et non à le regarder éclore par l’opération du Saint-Esprit : l’enfant ne construit pas lui-même son propre savoir.
– Et pour cela, il est hors de question que les instituteurs ne soient pas formés à toutes les disciplines, et à tous les aspects de toutes les disciplines, parce qu’ils sont le socle, ou que les professeurs enseignent plusieurs matières, ce qui reviendrait à transmettre de façon également médiocre des connaissances forcément éparses ;
– pour apprendre le respect des autres, il ne suffit pas de fabriquer artificiellement de la mixité scolaire et sociale : il faut aussi restaurer les disciplines — toutes les disciplines et pas quatre ou cinq « savoirs fondamentaux » qui ne serviraient qu’à mesurer le vide immense de ce qui n’aurait pas été appris — autour d’une culture commune, celle bâtie depuis dix siècles par la langue et la culture française. Ce qui ne signifie pas qu’il faut rester sourd et aveugle à autrui — mais il est plus que temps d’apprendre à tous à distinguer la sphère privée de la sphère publique. Les parents s’occupent de l’éducation de leurs enfants, leur transmettent leurs valeurs, leurs croyances ou leur langue ; l’école transmet les valeurs, la langue et la culture de la République, fondées sur un socle intangible qui a nom Laïcité… Ce qu’en a dit Condorcet il y a plus de deux cents ans est toujours d’actualité (www.ibe.unesco.org/publications/ ThinkersPdf/condorcf.pdf).
Ce qui donne aux parents une charge particulière, et permet d’instaurer un dialogue où chacun sait exactement quels sont ses droits et ses devoirs.

Quant à savoir quelle est la meilleure méthode de lecture, à quel moment on apprendra les règles d’accord du participe avec le COD antéposé, et si on peut ou non commencer la multiplication et la division au CP, cela doit rester de l’initiative de l’enseignant, le seul qui, sur le terrain, face à des élèves individualisés, sait quelles sont les possibilités et les facilités — ou les difficultés — du groupe et de chacun. La liberté pédagogique, ce doit être la possibilité d’aller plus vite ou plus lentement que les programmes — ou différemment. C’est sur les résultats que nous demandons à être jugés — pas sur des consignes imposées unilatéralement par des gourous qui se gardent bien de mettre les mains dans le cambouis.

À tous donc une bonne année, en espérant que ce sera l’an 01 de la reconstruction de l’école (voir http://www.r-lecole.freesurf.fr/), et la fin des diktats imbéciles.
Mais comme nous le savons, seul le pire est sûr. Le reste, c’est-à-dire l’espérance, est une lutte continuelle. La liberté est au bout du fusil…
À cinq mois d’une échéance électorale déterminante non seulement pour l’école mais pour l’avenir du pays, il faut se décider, renoncer à la pêche à la ligne, et voter pour ceux qui laisseront la plus grande marge de manœuvre — pour les moins idéologues : la liberté est aussi au bout du bulletin de vote.

Jean-Paul Brighelli