La tribune de François Chérèque publiée dans Libération du 17 janvier a, semble t-il, échappé à la plupart des observateurs. C’est pourtant à une bien étrange profession de foi que s’est livré le secrétaire général de la CFDT. Je ne sais si beaucoup d’adhérents fonctionnaires de la centrale cédétiste achètent Libé mais il est fort possible que pas mal d’entre eux aient pu renverser leur café ou s’étrangler avec leurs tartines lundi matin.

Qu’écrit donc Chérèque ? Citons un long extrait non sans avoir prévenu le lecteur de s’accrocher à sa chaise :

Le débat doit aussi porter sur la nature de ces services : il y a des fonctions régaliennes à maintenir sous l’autorité directe de l’Etat (parmi elles, le triptyque police-armée-justice) qui doivent être assurées par des fonctionnaires avec des obligations d’impartialité, de continuité, d’égalité de traitement, qui justifient les garanties protectrices de leur statut. Ces obligations ne peuvent pas se permettre de varier selon les changements politiques

Pour l’ensemble des autres missions, qu’elles soient conduites par le public ou par des opérateurs privés, l’Etat doit assurer contrôle, évaluation et péréquation afin de garantir la cohésion, la solidarité et l’objectif de réduire les déséquilibres territoriaux et sociaux.

Une mission de service public ne se résume pas à la forme juridique de l’entreprise ou au statut du personnel. Un salarié du privé qui assure une mission de service public n’est pas moins républicain qu’un fonctionnaire qui effectue la même tâche.

Entendons nous bien : juridiquement, ce que dit Chérèque n’est pas faux. Un voyageur débarquant à Roissy lundi matin et n’ayant pas remis les pieds en France depuis le nouvel an pourrait même ne pas s’en formaliser outre mesure. Hors contexte, ce rappel de la législation en vigueur ne mangerait pas de pain. Les concessions de service public existent dans notre droit. Et, effectivement, on ne mesure pas le républicanisme au fait qu’on est fonctionnaire ou non. Seulement voilà, depuis deux semaines, il y a eu quelques petits évènements qui n’ont pas dû échapper à un secrétaire général de la CFDT :  la proposition Jacob de supprimer l’emploi à vie des fonctionnaires ; puis, la semaine dernière, le dépôt par Monsieur Mancel (UMP) d’une proposition de loi visant à limiter le statut de la fonction publique aux missions régaliennes.

C’est donc au moment où des voix dans la majorité remettent en cause le statut général de la fonction publique que François Chérèque signe cette tribune. Si François Fillon a affublé Christian Jacob du surnom peu glorieux de Rantanplan, je n’ose imaginer les sobriquets que l’on pourrait trouver pour un secrétaire général d’un syndicat ouvrier. Nicolas Sarkozy, qui réforme les concours d’accès à la fonction publique, trop académiques et porteurs de rigidité selon lui, est ringardisé. Chérèque va beaucoup plus loin : un gouvernement qui développerait les concessions de service public dans un domaine aussi vaste que les missions non régaliennes ne rencontrerait pas d’opposition de principe de sa part. Je me demande si Alain Madelin faisait même figurer ce genre de proposition dans son programme ultra-libéral en 2002.

Au moment où Marine Le Pen nettoie le site internet du FN des vieilles propositions reagano-thatcheriennes qui y subsistaient et qu’elle prononce un discours d’un étatisme économique et social à faire rougir Bernard Thibault, lire une telle prose sous la plume du dirigeant d’une des plus puissantes centrales syndicales du pays donne l’impression d’une France cul par dessus tête. Au fait, qu’en pensent les fonctionnaires « non régaliens » adhérents à la CFDT ?

12 commentaires

  1. Bonjour David

    Petite précision : La CFDT n’est pas l’une des plus anciennes centrales syndicales, mais biien l’une des plus récentes.

    Dans l’ordre d’apparition : La CGT, le CFTC, CGT-FO issue de la CGT puis CFDT issue de la CFTC début des années 60.

    Sinon, l’article est excellent, comme d’habitude

  2. Chérèque ou comment s’aliéner toute la fonction publique territoriale, hospitalière et l’éducation nationale en une seule tribune !
    Bravo !

  3. de toute façons,que représente les syndicats dans la fonctions publics
    peu,très peu de monde
    l »état ne doit plus se mêler de tout,de tout imposer,de tout dicter,
    alors que si on lie la cours des comptes,des cours régionales des comptes,
    c »est souvent le foutoir
    le tunnel de TOULON,maître d »oeuvres,l »état,
    un bordel monstre,le plus chére du monde et oui
    tout le monde en croque,sauf le contribuable,,,
    qui finance ces syndicats,l »état
    qui détache plus de 20 000 fonctionnaires pour les gérées,;l »état
    qui a un trésors de guerres qui se monte a des millions d »euros,les syndicats,,
    merci ,contribuable,il serait bon que ces responsables ose donner le montant ,certains camarades tomberais sur le culs,
    il faut un syndicat libre ,partout et dans tout,priver-publics
    le cirque des voeux,doit faire sourire beaucoup de gens,
    pendant ce temps la,la CGT des ports,du livre,impose leurs décisions tout comme le CE de EDF et son 1% sur nos factures,460 millions,une paille,
    les syndicats minoritaires,ont de la chance,,,grace au contribuable et a tout ces politiciens de tout bords qui pour avoir la paix social,n »ose pas les affrontées

  4. pourriez-vous aussi remplacer « syndicat ouvrier » par « syndicat de fonctionnaires » vous seriez plus proche de la réalité. Personnellement je suis fonctionnaire dans une administration plutot technique (ex-equipement) et les délégations de mission au privé ont commencé depuis longtemps. Résultat, l’administration se retrouve sur les bras un paquet d’agents compétents et démotivés, qui sont payés à rien foutre. Je cherche encore le progrès dans tout ça. Je pense, plutot que de s’attaquer à des gens sérieux et travailleurs, plutot donner à l’Etat de pouvoir virer les 5% à 10% de fonctionnaires qui foutent rien, protégés qu’ils sont par l’impunité de leurs statuts

  5. Voilà qui est intéressant et permet de nous annoncer une nouvelle transposition de directive européenne, car il ne vous a pas échappé que les minus habens susmentionnés ne font que répercuter les conséquences logiques de la définition du service public par la commission européenne.
    Ceci dit, je veux tout de suite céder mon statut de fonctionnaire contre celui de salarié à la condition exclusive que me soit appliquée la convention collective du 15 mars 1966. Instantanément, l’Education nationale coûterait deux fois plus cher à l’Etat et je bénéficierais d’une prime de départ en retraite d’environ 40.000 euros plutôt que de faire liquider mes droits à pension pour une majestueuse prime de ZERO euro !
    Alleluia ! Continuons à opposer les salariés et les fonctionnaires, la France en marchera mieux pour le plus grand profit des gangsters, mafieux et bordilles du même style !
    Plus sérieusement, analysez et comparez les différentes conventions collectives applicables en France et expliquez-moi où se trouve l’égalité des citoyens devant la loi ?

  6. Attention! La réalité de la tribune de Chérèque, c’est qu’il défend les services publics, commençant par :

    « A tendre l’oreille, on pourrait croire que les services publics sont une plaie pour la France : ils seraient à la fois beaucoup trop coûteux et vraiment inefficaces. Tenir un discours comme celui-là, c’est oublier qu’ils sont un facteur essentiel de démocratie et un pilier du pacte social. Ils produisent et garantissent des droits, permettent de lutter contre les exclusions et les inégalités sociales, culturelles ou territoriales. »

    C’est aussi qu’il en a une vision extensive et non limitative
    voir l’exemple de l’accès haut débit à l’internet qui pour lui, relève du service public.

    La réalité, c’est aussi qu’il s’exprime dans le cadre du Forum Libération, à Grenoble sur le thème « Réinventons les services publics » et non pas dans le cadre d’un débat parlementaire alimenté par quelques excités de l »UMP jouant la surenchère.

    Les fonctionnaires n’ont pas vocation à bénéficier d’emploi à vie comme si rien ne changeait dans un monde immuable mais tous les salariés (fonctionnaires ou non) devraient bénéficier d’une sécurité du parcours professionnel.

  7. et après on ira se plaindre que les fonctionnaires ne font pas leur boulot en déneigeant les routes, pour seul exemple… Mais si on supprime les trois quarts de leurs postes je ne vois guère comment ! Chérèque joue un jeu qui va lui retomber sur la gueule… J’en sais quelque chose, dans ma boite les adhérents viennent tous chez nous.. A moins qu’il ne prépare déjà son embauche dans une grande société, une entreprise industrielle comme consultant.. ainsi que ce fut le cas de la mère Notat.

    La gauche de bazar est passée par là…

  8. Bonjour à tous,

    L’analyse portée me semble privilégier la polémique et la conflictualité sans tenir compte du fond.

    Je vous incite à aller plus loin avant de vous faire un avis. En effet, si F.C. a causé dans Libé, il y a une raison :
    La CFDT organise une campagne au plus près du travail réel des fonctionnaires en leur donnant la parole. Cette campagne nommée 1, 2, 3, Public ! a pour volonté de recueillir la réalité du vécu de toutes ces femmes et hommes qui travaillent pour tous.
    Une analyse de courte vue uniquement polémique ne crédibilise pas celui qui la porte, dommage il y a des choses intéressantes 🙁

  9. La CFDT est un syndicat de 68tards mitterandistes ,fils de petainistes ,dont les derniers en activité soutiennent Sarkosy qui est le seul capable de sauver leurs retraites. Ils sont prêt à pratiquer la politique de la terre brûlée dans leur boite d’état pour sauver leur retraite.
    Sarko est un miterrandiste notoire de toute façon. Ce serait une nouveauté que de voir la CFDT sur un autre bord que celui du gouvernement.

  10. Le pétainisme est largement partagé de nos jours ! Il n’y a pas que la CFDT… mais tous ceux qui ont voté pour Lisbonne…

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