Vous souvenez-vous du film « Le Pont de la rivière Kwaï » ? Il était une fois un colonel, Nicholson. Le Colonel Nicholson était le plus gradé d’un camp de prisonniers et, pour occuper ses hommes et leur permettre de rester dignes, il se laissa convaincre de construire un pont sur la rivière Kwaï. Il en était très fier, de son pont. Mais ce dernier était dangereux, d’un point de vue stratégique pour ses compatriotes anglais et lorsque qu’ils vinrent le détruire, Nicholson tenta de s’interposer. Le pont était devenu le but en soi.

En acceptant que la Chine vienne aider financièrement au sauvetage de l’euro, les dirigeants européens semblent donc bien atteints du syndrome du Colonel Nicholson[1. Je dois cette image et cette formule à Philippe Séguin qui l’employa à propos de Pierre Bérégovoy et son obsession de l’accrochage du franc au mark, qui n’était d’ailleurs que la préfiguration de la monnaie unique.]. L’euro, notre pont de la rivière Kwaï moderne, était présenté comme l’instrument de puissance permettant de peser face aux autres géants, au premier rang desquels la Chine. Combien de fois nous a t-on asséné : « avec ses petits bras et ses petits francs, comment ferait la France ? ». Escroquerie désormais prouvée aux yeux de tous. La Chine est tellement heureuse de l’existence de l’euro, et notamment de la sous-évaluation du yuan par rapport à lui, qu’elle vient, sans hésiter, à son secours.

Nicolas Sarkozy, qui doit s’entretenir avec le président Hu-Jin-Tao aujourd’hui au téléphone, aura à répondre, avec tous ses « partenaires », de haute-trahison. Noëlle Lenoir, ancienne ministre des affaires européennes de Jacques Chirac, et qui ne passe pas pour une souverainiste échevelée, écrivait ce matin sur twitter :  » Fonds chinois pour l’Europe. Le début de la colonisation de l’Europe par la Chine a-t-il commencé ? Et la fin de son indépendance politique. » Comment  peser dans une négociation commerciale, désormais ? Comment protester du fait que la monnaie chinoise soit inconvertible et sous-évaluée ? Envolées, les possibilités de protection aux frontières européennes, la démondialisation de Montebourg, le juste-échange du PS, et la fameuse taxe carbone aux frontières européennes, que le Président souhaitait lui-même mettre en place. Imaginer que le PC chinois apporte son aide sans contrepartie tient davantage de l’esprit de Oui-Oui chauffeur de taxi que de la haute géopolitique. Cette trahison est double : non seulement les dirigeants européens actuels se lient eux-mêmes les mains, mais ils lient par avance celles de leurs successeurs.

Eux n’ont pas l’excuse du Colonel Nicholson. Eux ne travaillent pas dans un camp de prisonniers. C’est en toute liberté qu’ils ont choisi de sacrifier la liberté de leurs peuples au sauvetage de leur pont de la rivière Kwaï.

15 commentaires

  1. Bien vu ! sauf que ce n’est même pas « pour occuper ses hommes et leur permettre de rester dignes » puisque le chômage et la misère augmente un peu partout en zone euro !

  2. @ DD
    Moi je me souviens que vos amis, à commencer par Séguin lorsqu’ils se sont presentés aux elections ils n’ont pas eu le consensus populaire comme à Paris. Alors c’est facile de dire « nous on se pliera » car vous y avez été obligé. Sarko il a été élu ce qui lui donné le droit de faire ce qu’il veux sur le traité européen et je n’ai pas vu de manifestations de masse contre ça. Par contre continuez à travailler pour la défaite de Sarko. Dans tout les cas la béneficiaire sera Marine Le Pen pas vous après le Gannohuci anglophone qui va en Tunise parler de pollution de la langue française et au deuxième tour opposé à un hollande vous auriez un président qui fera tout pour l’Europe et en plus il recommencera avec la répetance et l’immigration à tout va.

  3. Justement, il n’a pas élu pour transférer la souveraineté nationale à des instances technocratiques. Et pour vendre les intérêts économiques européens au PC chinois.

  4. @Fiorino,

    Sinon on a ça aussi :

    ARTICLE 68 C.

    « Le Président de la République ne peut être destitué qu’en cas de manquement à ses devoirs manifestement incompatible avec l’exercice de son mandat. La destitution est prononcée par le Parlement constitué en Haute Cour.

    La proposition de réunion de la Haute Cour adoptée par une des assemblées du Parlement est aussitôt transmise à l’autre qui se prononce dans les quinze jours.

    La Haute Cour est présidée par le président de l’Assemblée nationale. Elle statue dans un délai d’un mois, à bulletins secrets, sur la destitution. Sa décision est d’effet immédiat.

    Les décisions prises en application du présent article le sont à la majorité des deux tiers des membres composant l’assemblée concernée ou la Haute Cour. Toute délégation de vote est interdite. Seuls sont recensés les votes favorables à la proposition de réunion de la Haute Cour ou à la destitution.

    Une loi organique fixe les conditions d’application du présent article ».

    C’est sûr ça n’émane pas du peuple européen donc il est clair que c’est sujet à caution et d’essence totalitaire, mais on peut voir quand même…

  5. en FRANCE destituer un président ?
    alors faillait destituer de nombreux président de gauche comme de droite
    le peuple se sont des veaux,,
    on pourrait en dire autant des responsables syndicalistes,des politiciens de tout bords ?SARKOZY n-a fait que mentir, a ses électeurs,,,
    des traites de gauche au gouvernement,,,le référendum,,majoritaire,,NON
    avec l-aide des socialiste et UMP,
    il nous a pris pour des C……
    hier soir,,une phrase,,que personne n »a relever,surtout pas les journalistes,,
    les hauts de seine,,,,,,qui visait t »il ?
    2912,un tsunami se prépare,,,ce qui inquiète déjà M BELCACEM
    elle a raison,,,la FRANCE profonde se réveil,,,les veaux en on marre

  6. Pour Jacques Sapir, l’accord européen, c’est « reculer pour mieux sauter » (c’est mon expression, pas la sienne).

    – La spéculation repartira probablement de plus belle dès que les marchés auront pris conscience de l’écart entre l’accord et les nécessités.
    – Nous sommes sous la coupe de l’Allemagne et bientôt de la Chine. Il nous sera bientôt interdit de combattre la désindustrialisation. (Cf aussi Éric Zemmour, ce matin sur RTL).
    – C’est la preuve que l’euro n’est ni une protection, ni un élément de l’indépendance de l’Europe. Prétendre cela a été une dangereuse illusion.
    – On ne voit pas en quoi cet accord donnerait plus de crédibilité à Sarkozy. Cela ouvre un boulevard à Marine Le Pen. Il ne faut pas « lui laisser l’exclusivité de ce combat » dit cet économiste de gauche.

    http://www.marianne2.fr/Sapir-l-accord-signe-ne-fait-que-prolonger-l-agonie-de-l-euro_a211943.html

  7. Le député Olivier Dussopt (Ardèche) était porte-parole de Martine Aubry. Il fait aussi partie de la « gauche » du PS (Benoit Hamon- Henri Emmanuelli).
    Je suis « tombé » sur son blog.

    Il critique (avec raison) Sarkozy et Merkel.
    Mais, pour cela, il s’appuie sur …. Jacques Delors !
    Donc, sur un des pires responsables de la situation actuelle, avant Sarkozy et Merkel.

    Certes, Delors est le père de la candidate que soutenait Dussopt.
    Mais les parents et les enfants ne pensent pas nécessairement pareil sur tout (idem pour la famille Le Pen) et on pouvait croire jusqu’à maintenant qu’il n’y avait pas le moindre « atome crochu » entre Delors et un héritier soit du CERES (tendance de gauche du PS dirigée dans les années 70 par Chevènement) soit de Zyromski (gauche de la SFIO dans les années 30).
    La « gauche » du PS était, en 2005, pour le « non » à la constitution européenne, alors que Delors en était un chaud partisan.

    À quoi sert la « gauche » du PS ?
    Historiquement, en France et ailleurs, ce type de courant a presque toujours existé.
    Certes, certains membres de ces tendances furent cohérents (comme les 2 cités plus haut), mais ils étaient rares.
    En général les gauches socialistes n’ont eu d’autre utilité que de permettre aux partis socialistes et sociaux-démocrates de « ratisser large ».

    http://www.olivierdussopt.fr/blog/2011/10/jacques-delors-d%C3%A9nonce-le-coup-de-poker-de-nicolas-sarkozy-et-angela-merkel-dans-le-monde-du-19-octo.html

  8. Ah bon ? Moi je croyais, si l’on écoute les find analystes de la presse parisienne, qu’il n’y avait qu’en Grèce qu’on était dirigeant politique de père en fils (ou de père en fille…).
    Ceci dit, DD, très bonne remarque sur le syndrome du colonel Nicholson… renforcé par l’interview du président de ce-qu’l-reste-de-république.
    A lire : La Nouvelle Histoire de Vichy de Michèle Cointet : on s’y croirait ! Que ce soit en temps de guerre ou en temps de paix, nos dirigeants ne pensent pas une seconde à une France indépendante, mais seulement à un pays modeste arrimé à nos cousins germains…

  9. @ La Rouméliote.

    Il est vrai qu’en Grèce, la politique en famille, c’est presque une institution.

    Nouvelle Démocratie (droite depuis 1974, avant c’était l’Union Nationale Radicale) :
    – Constantin Caramanlis (1907-1998). Premier ministre (presque sans interruption) de 1955 à 1963, puis de 1974 à 1980. Président de la République de 1980 à 1985 puis de 1990 à 1995.
    – Constantin Caramanlis (né en 1956), son neveu. Premier ministre de 2004 à 2009.

    Pasok (socialistes depuis 1974, avant Union du Centre) :
    – Georges Papandreou (1888-1968). Premier ministre de 1944 à 1945, puis de 1963 à 1965.
    – Andreas Papandreou (1919-1996), son fils. Premier ministre de 1981 à 1989, puis de 1993 à 1996.
    – Georges Papandreou (né en 1952), son fils. Premier ministre depuis 2009.

  10. @pepe
    Et tu peux même rajouter Evangelos Venizelos, arrière-petit-fils du grand ‘Lefteraki’ et Constantin Mitsotakis, petit-neveu du même… et ainsi de suite… Pangalos, Dora Bakoyanni… C’est tout simplement méconnaître totalement les structures de la société grecque. Cela n’a strictement rien à voir avec la honte que l’Europe de Maastricht fait subir aux Grecs… avant de s’attaquer à nous ! Par contre, le pouvoir et les places dorées donnés héréditairement en France, pays de la République laïque est un symptôme beaucoup plus grave qu’en Grèce, puisque là, pour le coup, ça nous éloigne de la République et ça nous rapproche de la monarchie d’Ancien Régime. C’est vrai que Gollnish est moins sexy que la fifille à son papa…

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