Après le club, Peugeot menace-t-il de lâcher la région?

 

Il se dit que la première décision de Ledus, le repreneur hong-kongais du FC Sochaux-Montbéliard, sera de refaire tout l’éclairage du Stade Bonal. Du haut de ma tribune, je peux témoigner aux lecteurs de Causeur qu’il y a eu ces dernières années quelques petits problèmes avec la qualité de la pelouse, davantage encore avec l’équipe alignée, mais pas du tout avec l’éclairage. On y voyait très bien le match, et pas toujours pour le meilleur spectacle qui soit. Cette anecdote révèle très bien l’inquiétude des supporteurs du plus vieux club professionnel français. Comme nous le déplorions il y a près d’un an, PSA a mis en vente le club de football que Jean-Pierre Peugeot avait créé il y a plus de quatre-vingts ans. L’immense majorité du peuple de Bonal est inquiète et il y a vraiment de quoi. Parce que l’entreprise Ledus, qui commercialise des ampoules LED, lesquelles éclaireront les soirées prochaines à Bonal, n’a rien d’un empire. Les JT de 20h de ce mardi soir qui annonçaient « Sochaux sous pavillon chinois », comme si le FC Sochaux était aujourd’hui le fer de lance d’un de ces dragons de la nouvelle économie mondiale et gagnante, passent à côté de l’essentiel. Cette entreprise de Hong-Kong, domiciliée aux îles Caïmans, n’a rien d’un géant. Son chiffre d’affaires est dérisoire. Ledus compte sur le FCSM pour gagner des parts de marché dans le secteur des ampoules LED en Europe. Ledus sera certainement sponsor maillot et un lion à  tête d’ampoule viendra peut-être prendre place sur le blason du club.

Ce qui ne laisse pas d’inquiéter, ce sont les conditions de cette reprise, et le fait que d’autres solutions ont été dédaignées par PSA, certainement à son plus haut niveau. Un projet mené par un partenaire local, le cabinet Kipo, associé à un investisseur anglais, donnait des garanties plus en phase avec l’attente des supporteurs, d’une part parce que les initiateurs étaient de véritables amoureux du club et qu’ils connaissaient le football, ce qui est loin d’être le cas de l’honorable Monsieur Li, qu’on a vu interviewé à Stade 2 l’autre soir. Qui a mis en relation PSA avec Ledus ? Tout s’est joué à Mulhouse où sont localisés Thomas Lichtenauer, le représentant de l’entreprise hong-kongaise en Europe, Mounir Jawhar, un ancien agent de joueurs, ainsi qu’un ancien dirigeant du Racing Club de Strasbourg qui a joué un rôle non négligeable dans la descente aux enfers du club strasbourgeois. D’après nos sources, Jawhar se verrait bien responsable du recrutement sochalien, au point que l’actuel titulaire du poste, qui intéresse l’AS Saint-Etienne, verrait de très mauvais œil l’arrivée d’un tel personnage. On parle aussi d’un avocat suisse dont la réputation n’est guère plus engageante que les deux premiers. Bref, si l’entreprise Ledus doit être jugée sur le choix de ses interlocuteurs, tout ne commence pas sous les meilleurs auspices.

Mais si une petite boîte hong-kongaise, néophyte du monde du football européen, peut éventuellement être la proie d’intermédiaires douteux, qu’en est-il d’une entreprise à dimension internationale comme PSA ? PSA qui connaît le terrain, et dont les dirigeants actuels du club ont certainement pensé que le profil des intermédiaires laissait augurer un gros risque sur la survie du FC Sochaux ? Quand on connaît le destin du FC Grenoble, ou celui que vivent le RC Lens ou le Havre AC actuellement, on ne choisit pas ses interlocuteurs grâce à des amitiés de discothèque haut-rhinoise. Surtout quand un autre repreneur doté d’une surface financière au moins équivalente propose une alternative plus en phase avec la culture et les couleurs locales. Pourquoi se débarrasser du FCSM dans de telles conditions ? On murmure que Peugeot et Citroën pourraient bénéficier d’un prix intéressant sur les ampoules LED, ce qu’a nié Denis Worbe, l’homme que Carlos Tavarès, président du directoire de PSA, a chargé de vendre le club aux 66 saisons de Ligue 1. Pour ma part, j’y vois une autre intention. Et si Tavarès, en privilégiant une entreprise inconnue au bataillon grâce à des intermédiaires douteux, avait décidé de montrer tout son mépris aux habitants du Pays de Montbéliard, siège de sa  plus grande usine ? Et si, ce patron mondialisé aux méthodes expéditives avait souhaité, en procédant de la sorte, envoyer un message en guise d’avertissement : « Regardez-bien comme j’ai balancé votre club au premier venu. Votre situation est tout aussi précaire » ? Le cynisme de Carlos Tavarès qui était à deux doigts de signer l’arrêt de mort du FCSM il y a onze mois, et n’avait eu aucune pitié pour le site ouvrier d’Aulnay, a été forgé aux côtés de son alter-ego de Renault Carlos Ghosn, grand délocalisateur de son état. Nous ne serions pas étonnés que cette vente à un nain de l’ampoule LED d’un fleuron historique du football français n’ait d’autre motivation que d’intimider une région ayant déjà beaucoup souffert.

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