Pendant les fêtes, l’Effet papillon, le magazine d’information internationale de Canal plus présenté par Daphné Roulier, proposait deux “compils” de ses meilleurs reportages de l’année sur les États-Unis. Ça m’a donné l’occasion de voir, entre autres, un amusant portrait de Jonathan Krohn, très-jeune-espoir (15 ans) du Parti républicain.

Le documentaire s’appelle le Justin Bieber de la politique et, pour ceux d’entre vous qui l’ignoreraient encore, c’est une référence : crooner âgé de 16 ans, Justin est déjà une star mondiale – notamment auprès des fillettes.

Mais Rome ne fut pas construite en un jour : nos deux enfants prodiges ont déjà trois ans de métier. Dans la déprime du camp républicain qui suivit l’élection d’Obama, Jonathan Krohn fut même la première lueur d’espoir : à 13 ans, ce gamin en costard-cravate publiait un bouquin de réflexion politique au titre aronien : Définir le conservatisme.

Vu d’ici, bien sûr, ça a l’air d’un gag. Mais les États-Unis ne sont-ils pas censés être en avance sur nous ? Et qui donc avons-nous eu en France, comme génies précoces, depuis Minou Drouet ?

Toujours est-il que, là-bas, ça marche. Porté par la vague du Tea Party, Jonathan est devenu la coqueluche des conservateurs. Devant un parterre de fans qui pourraient être ses grands-parents, on le voit raconter son livre dans une sorte de “one-boy show” : « J’ai simplement voulu expliquer à ceux qui croient savoir, mais qui ne savent pas vraiment ! » Parce que lui, « le Mozart de la politique » comme dit aimablement Canal plus, il sait.

Quoi, exactement ? Eh bien, qu’Obama a déçu l’Amérique, et que celle-ci doit se ressourcer dans les valeurs traditionnelles de ses pères fondateurs. Mais attention, y a des limites ! Krohn Junior est un conservateur moderne, qui milite entre autres « pour l’union civile des homos et contre le créationnisme », comme s’en félicite le doc.

De mon temps encore, les politiques recouraient aux services de publicitaires, de communicants et de sondologues ; désormais, semblet-il, ces options sont intégrées au modèle de base. Lapreuve : malgré son positionnement républicain, notre mini- Copé transatlantique a littéralement mangousté Canal, qui lui manifeste une sympathie attendrie. Singe savant ? Nullement, nous explique-ton : juste un ado au QI supérieur à la moyenne. S’il ne va plus guère à l’école, c’est qu’il n’y apprendrait plus rien : « Je préfère lire Nietzsche, Rousseau, Platon ou même Schopenhauer », confirme sobrement l’intéressé.

Et qu’est-ce qu’il fera quand il sera grand, le petit génie ? Jonathan reste flou sur la question : pour l’instant, il s’agit de sauver l’Amérique, n’est-ce pas ? Après, on verra…

Pour ne rien vous cacher, je suis plus sceptique que Daphné Roulier. Et si c’était justement ça, le problème du “néoconservatisme” américain ? À force de rajeunir, on retombe en enfance…

Publié dans Valeurs Actuelles, le 6.01.2010

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