Tous les dimanches à 12 h 35 sur France 5, Médias, le magazine de Thomas Hugues, revient, comme son nom l’indique, sur le traitement médiatique de l’actualité de la semaine. Le numéro de l’autre dimanche était bien sûr consacré à la tuerie de Toulouse et à sa “couverture” télévisuelle.
L’impression qui s’en dégage, si l’on ne s’en doutait pas déjà, c’est que la surenchère dans la chasse au scoop mène tout droit au n’importe quoi. Toutes les rédactions sont sur les dents ; elles ont dépêché sur place des dizaines de journalistes, à l’affût du moindre témoignage, indice, détail… Quant aux chaînes d’information en continu, elles sont déchaînées, prêtes à tout pour décrocher une “exclu”.
Alors, ce qui devait arriver arrive. Mercredi après-midi, BFMTV balance sa breaking news : « Mohamed Merah interpellé par le Raid ! » Le faux scoop est aussitôt repris sur iTélé, puis enjolivé par France3, qui croit pouvoir préciser que « le tueur s’est rendu sans opposer de résistance ».
Hum ! Cité à comparaître sur le plateau de Médias, Olivier Mazerolle (BFMTV) n’en mène pas large : « Ça n’a duré que quatre minutes sur trente heures de direct… », plaide-t-il faiblement.
Même système de défense chez sa coïnculpée Carole Gaessler (France 3), qui invoque « la vitesse et la fatigue », comme s’il s’agissait d’un accident de voiture. Autre figure imposée de ces journées entières de direct où, faute d’avoir la moindre nouvelle, il faut bien meubler : le ballet des psychologues et autres expertologues, qui se suivent et se contredisent : « Une série d’attentats très bien préparés, de façon quasi militaire », affirme l’un ; « Le tueur a accumulé les erreurs grossières », assène l’autre.
Mais le retentissement du drame est planétaire, et les bourdes médiatiques aussi, comme le montrent les hooligans du Petit Journal. Telle chaîne “d’info” américaine n’a rien trouvé de mieux, pour couvrir le drame de Toulouse, qu’un duplex avec son envoyé spécial à Londres ! Telle autre nous raconte, sur des images qui disent exactement le contraire, l’impossibilité pour la police de traquer le tueur « dans les vieilles ruelles médiévales de Toulouse ».
Dans le genre “C’est pas parce qu’on n’a rien à dire qu’il faut fermer sa gueule”, la palme revient quand même au 20 heures de TF1 le vendredi soir.
Huit heures après la mort de Merah, l’“envoyé spécial” de la chaîne fait toujours le pied de grue devant l’immeuble, où il ne se passe évidemment plus rien.
Que va donc nous apprendre ce pied de grue-là ? « J’ai deux informations ! », claironne-t-il – et je le cite in extenso, parce que c’est un poème : « La première information [sic], c’est que je me trouve à 10 mètres de l’endroit où Mohamed Merah est mort, c’est juste derrière moi, ici [il montre la nuit noire]. Et l’autre information c’est [vous êtes prêts ? ] le ruban que vous voyez là : c’est le ruban de la police scientifique ! »
Aucun doute : un ruban comme ça, ça mérite le pompon.