Ambiance très politique, l’autre samedi à On n’est pas couché. En début d’émission, CSA oblige, Laurent Ruquier recevait une brochette d’hommes politiques – toutes des femmes, en l’occurrence. Tour à tour Rachida Dati, Marielle de Sarnez et Clémentine Autain ont ainsi pu nous livrer en toute franchise leurs “éléments de langage”, aussi contradictoires qu’uniformément convenus.
Après cette purge, j’attendais comme une récré l’interview de Franz-Olivier Giesbert – dont j’avais acheté et dévoré la veille les Derniers Carnets, sous-titrésScènes de la vie politique en 2012 (et avant).
Depuis trente ans, Giesbert s’est fait une spécialité de ces bouquins de journalisme politique, toujours un peu plus cyniques, où il nous entraîne jovialement dans les coulisses et les bas-fonds du milieu. Pour pimenter ses révélations et colorer ses portraits non autorisés, ce hooligan n’hésite même pas à trahir les secrets du vrai-faux “off” en vigueur de nos jours.
Mais là, juré, craché, c’est son dernier pour la route ! Giesbert ne dira plus jamais de mal des hommes politiques. Alors, pour fêter ça, il nous a organisé un finale avec toute la troupe.
Faute de pouvoir tout citer, j’ai retenu son DSK rhabillé pour l’hiver : « Chef de rayon noctambule et dilettante, qui pour un pourboire aurait vendu la France. »Quant à Ruquier, il s’amuse d’une des innombrables piques de FOG contre Sarkozy : « En 2007, c’était Tom Cruise. En 2012, c’est Christian Clavier ! » À ce moment, je me dis : c’est bon, on va rigoler ! Il va sortir ses vannes, et on va lui en redemander ! Mais non : Natacha Polony et Audrey Pulvar, dans un élan d’indignation morale et chorale, vont gâcher ma récré.
Là où j’espérais un concours de bons mots, je n’aurai que mauvaises querelles. Ces dames s’indignent de la « violence hallucinante » déployée par Giesbert, comme si elles n’avaient jamais lu un polémiste. Lui qui revendique l’outrance comme parti pris littéraire, pourquoi veulent-elles à toute force en faire un modéré ? Il y a des Alain Duhamel pour ça.
Et pourquoi exiger de Franz le sceptique des extrapolations idéologiques bouleversifiantes ? Il y a un Jean-François Kahn pour ça ! Le reproche de fond de Natacha et d’Audrey, c’est l’absence de fond : « Pas d’analyse politique, rien que du journalisme de spectacle ! », pointe Mlle Polony. Sauf qu’en fait de spectacle, c’est la politique qui a commencé, et depuis Giscard…
Malgré Natacha et Audrey, et vos propres blocages éventuels, je me dois de vous recommander ce petit livre drôlement éclairant. Juste deux heures d’évasion dans le monde politique réel, entre deux mobilisations citoyennes, avec la satisfaction du devoir électoral déjà à moitié accompli.
Publié pour Valeurs Actuelles, le 24 mai 2012