C dans l’air, ou l’actu commentée par une aimable caste d’expertologues endogames.…
L’actu était chaude, mercredi en huit. À la une, le « coup de colère » de François Hollande en plein Conseil des ministres, rappelant ceux-ci au règlement « pour la dernière fois ».
Le soir même, l’affaire faisait d’objet d’un numéro de C dans l’air, la quotidienne d’ Yves Calvi sur France 5. Pour autopsier l’affaire à chaud, notre hôte avait convié quatre hommes de l’art, dont une femme : trois journalistes politiques et un sondologue. Tous d’accord bien sûr – et moi donc ! – pour ironiser sur ce « dernier avertissement » dont on n’était sûr que d’une chose : ce n’était pas le premier !
A vrai dire, on a même l’impression que le président n’a fait que ça, depuis les recadrages à répétition du vibrion Montebourg jusqu’au licenciement sec de l’impudente Mme Batho. Pas de chance : moins de trois mois plus tard, ça recommence en pire ! Cette fois, une ministre en exclut un autre du « Pacte républicain », rien que ça …
C’est vrai que c’est amusant, ces foudres élyséennes à répétition ; mais force est de reconnaître que les analyses convergentes des Experts Calvi n’y apportent guère de lumières nouvelles…
Cela dit, il a raison le camarade Weill ! Là, on ne joue plus dans la même cour : en attaquant Valls de front, Duflot a porté le fer au cœur même des contradictions de la gauche – alors que ce n’est pas vraiment le moment.
Pour justifier sa présence au pouvoir, la gauche se doit d’incarner toujours un certain idéal, n’est-ce pas ? Mais pour s’y maintenir (au pouvoir), il lui faut aussi composer avec les rudes réalités. Tout le drame de l’affaire Duflot-Valls-Ayrault-Hollande est là !
Passionnant dilemme, sur lequel Calvi et son plateau de connoisseurs vont gloser agréablement une heure durant. Las ! Au lieu d’ouvrir des pistes de réflexion inaccessibles au commun des téléspectateurs, nos « spécialistes » se contentent de mimer des désaccords aussitôt résolus !
Le problème de ce gouvernement, décrypte savamment Vanessa Schneider (Le Monde), c’est qu’ « il y a deux lignes ». Que nenni, réplique le maître-sondeur Jérôme Sainte-Marie : « Il n’y en a pas ! » Tout le monde a raison, conclut Christophe Barbier (L’Express) : « Le hollandisme, c’est tout et son contraire… » Eh bien, voulez-vous que je vous dise ? Même ça, je m’en doutais !
La voilà, la limite de l’émission de Calvi – par ailleurs journaliste honnête et pro. Dès l’origine, son C dans l’air a été conçu comme ça, dans un douillet entre-soi ; et depuis huit ans qu’il « fait le job », le successeur d’Alain Duhamel et d’Arlette Chabot a fini par devenir un hybride des deux.
A croire que la fonction crée l’organe… Et pourtant, il y a le contre-exemple de Taddeï, cet organisme alien qui a créé tout seul sa fonction d’intervieweur libre et qui s’y tient, apparemment insoucieux des attaques dont il fait l’objet en cette qualité.
N’empêche, c’est son émission quotidienne à lui que le service public a jugé utile de changer en hebdomadaire. Etonnant, non ?
Publié dans Valeurs Actuelles, le 10 octobre 2013