Rions avec l’UMP, avant la fermeture de la boutique

 

Au sein du bureau politique de l’UMP, il reste deux personnalités de bon sens. Françoise Grossetête et Michèle Alliot-Marie ont préféré l’abstention mardi soir alors que tous les autres membres de cette honorable assemblée se sont prononcées pour l’exclusion de Jérôme Lavrilleux. Qu’on s’entende bien, je n’ai pas de sympathie particulière pour l’ex-bras droit de Jean-François Copé. Ses deux prestations télévisées les plus célèbres m’en décourageraient si j’en avais la tentation. La première fois, il avait personnifié l’archétype du porte-flingues, en justifiant le putsch de Jean-François Copé ; la seconde, il avait accordé un larmoyant entretien à Ruth Elkrief digne d’un pensionnaire de la Comédie française. Mais revenons à Michèle Alliot-Marie. C’est elle qui a le mieux résumé la situation ubuesque : « Je ne vais pas me donner le ridicule de voter l’exclusion de quelqu’un qui n’est plus dans le parti. » Parce que l’UMP, dirigée par la Sainte Troïka d’anciens Premiers ministres, en est vraiment là.

Il y a seize ans, votre serviteur avait vécu une situation analogue. Alors que j’avais remis ma démission du RPR[1. Je n’acceptais pas que Philippe Séguin, président du RPR, se soumette à la ligne européenne de Jacques Chirac.], mon départ était devenu le sujet de l’ordre du jour d’un comité départemental auquel certains de ses amis assistaient. Le secrétaire départemental à qui je ne jette d’autant moins la pierre qu’il n’est aujourd’hui plus de ce monde, avait exprimé sa colère et évoqué mon exclusion. Il faut dire que ma lettre comportait des passages peu flatteurs à l’égard du Président Chirac. Un élu régional, qui avait aussi la qualité d’être avocat, lui avait répondu –avec la plus grande courtoisie- qu’il pouvait apparaître kafkaïen d’exclure quelqu’un qui avait déjà souverainement exprimé la décision de ne plus être membre du parti. Tout le monde en est rapidement convenu. Une fédération d’un grand parti politique ne pouvait pas se permettre un cuisant ridicule.

Il faut croire qu’en 2014 – cette fois-ci à l’échelle nationale – le ridicule ne fait plus peur au plus grand parti de la droite. Le 15 octobre dernier, Jérôme Lavrilleux envoyait à Luc Châtel, secrétaire général de l’UMP un courrier on ne peut plus clair. Et il prévenait que si la procédure d’exclusion devait se prolonger après son départ, « elle apparaîtrait pour ce qu’elle est, une mascarade […] ». Si Juppé, Fillon et les autres souhaitent aujourd’hui exclure des personnes qui ne sont pas membres de leur parti, ils auraient pu penser à Gérard Filoche, après les propos inqualifiables qu’il avait tenus à la suite du décès de Christophe de Margerie. Ainsi, ils auraient pu prendre le PS de vitesse. Trêve de plaisanterie. Était-il si difficile de prendre officiellement acte du départ de Jérôme Lavrilleux et d’interrompre alors une procédure devenue sans objet ? Faut-il que les membres du bureau politique soient si peu à l’aise dans leurs baskets qu’ils souhaitent laver plus blanc que blanc et montrer ainsi aux électeurs à quel point ils sont vertueux puisqu’ils chassent les brebis galeuses[2. Pourquoi cette procédure, d’ailleurs ? Les aveux de Lavrilleux sur BFMTV avaient porté préjudice à l’UMP, expliquait-on, rue de Vaugirard. Parce qu’il avait brisé une omerta ? Transformer Lavrilleux en Guy Béart… Ils sont très forts !] avec inflexibilité ?

L’électeur est plié en deux de rire lorsqu’on lui raconte à la télé que l’UMP exclut des gens qui ont déjà démissionné. Et il se dit que des gens capables d’une telle décision doivent avoir bien des choses à se reprocher. Par cette décision farfelue, le bureau politique n’a fait qu’accentuer la méfiance qui pèse sur les élus et les partis politiques, alors même qu’il comptait les réhabiliter. François Fillon a raillé les participants à une émission de télé-réalité politique, expliquant que « s’ils ont besoin de se déguiser pour voir la vie, c’est qu’ils ont un problème… ». On lui donne volontiers raison mais on se permet, à la lumière de son acharnement personnel[3. Fillon était le plus acharné à obtenir l’exclusion de Lavrilleux. D’aprèsL’Opinion, il aurait même mis sa démission dans la balance. Souvenirs de l’hiver 2012 ?] à obtenir la tête de Lavrilleux, de lui conseiller d’aller constater lui-même dans un bistrot ce qu’on pense d’une telle mascarade dans la France d’en bas.

 

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