En cette veille de Noël, je ne résiste pas d’écrire sur un phénomène biologique étonnant. Recevant encore régulièrement des nouvelles de Jean-Pierre Chevènement via les alertes de son site internet, je suis frappé par le ton du personnage. Celui qu’on surnommait le Lion de Belfort s’est mué en petit chat inoffensif qui ronronne sous les flatteries de sa maîtresse.

Jean-Pierre Chevènement, soyons juste, avait bien mérité son surnom de Lion de Belfort. Il avait fait preuve de son caractère indomptable à multiples reprises. Ses démissions du gouvernement, au nombre de trois, le furent toujours sur des désaccords fondateurs : 1983 et le tournant libéral, 1991 et l’alignement atlantiste, 2000 et la capitulation devant les séparatistes corses. Cela inspire le respect. En septembre 2001, il avait basé sa candidature à la présidence de la République sur la fondation d’un pôle républicain qui battait en brêche les clivages surranés. Le Lion de Belfort, oui, méritait de se muer en Homme de la Nation.

Et puis, patratras.

Le candidat, malgré de bons débuts, n’alla pas jusqu’au bout de sa logique. Sa campagne s’affadit. Il s’écroula et finit à 5%. Le Lion blessé abandonna ses compagnons venus de l’autre rive pour conserver sa tanière de député qu’il perdit tout de même, la défaite s’ajoutant au déshonneur. Pendant 4 ans, on n’entendit plus parler beaucoup de lui. Il lèchait ses plaies, se disant que son heure viendrait peut-être encore. Churchill, Clemenceau et de Gaulle, qu’il aime citer de temps à autres, hantaient son esprit. Un vieux lion, après tout, peut très bien faire l’Histoire. Relancé par la victoire du Non au réferendum sur l’Europe, il annonça finalement sa candidature au début de cet automne. Le lion n’avait rien perdu de son verbe haut, de ses phrases qui font mouche. Ses rugissements affolaient la gauche libérale et européenne. Mais, il y a quelques jours, le pot aux roses a été découvert. Cette nouvelle candidature n’était en fait qu’un subterfuge pour redevenir député avec deux ou trois de ses amis. La candidate socialiste lui a donné quelques circonscriptions gagnables et les a enveloppées, pour faire joli, de phrases accusatrices contre la Banque centrale européenne.

Depuis, sur le site internet de Jean-Pierre Chevènement, il n’y a plus de lion. Rarement on aura lu sous sa plume tant de flagornerie envers une candidate du parti socialiste. Et c’est d’autant plus déroutant qu’il s’agit de Ségolène Royal qu’il faisait encore siffler, à la réunion publique de la Gauche du Non, il y a dix-huit mois à Besançon.

Le Lion s’est mué en petit chat à sa mémère. C’est à la fois, étonnant, triste et distrayant

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