C’est fou le retard qu’on peut prendre en vacances ! Je m’étais promis d’évoquer ici la soirée Pompidou que nous a offerte le mois dernier France 3, et plus particulièrement le passionnant débat qui suivit, chez Taddeï, la diffusion du téléfilm Mort d’un président.
L’affaire date du 12 avril, certes, mais il n’est jamais trop tard pour parler du regretté Georges Pompidou – qui, de toute façon, nous a quittés il y a trente-sept ans déjà. Et puis, il avait pour porte-parole ce soir-là son ex-conseiller (elle tient au masculin !) Marie-France Garaud, dont la présence sur un plateau me met toujours en joie. Interrogée par l’animateur, Mme Garaud informe d’emblée le réalisateur Éric Aknine que sa fiction n’a pas eu l’heur de lui plaire. Pas question de critiquer la composition de Jean-François Balmer, criant de vérité dans le rôle de Pompidou. MFG ne s’indigne même pas que l’actrice censée l’incarner, elle, campe en fait une sorte de DRH sinistre de France Télécom… Simplement, elle ne se reconnaît guère dans « cette dame chanélisée en faux Chanel ».
Ce que remet en question Marie-France, c’est la trame même de l’œuvre : « Un film impudique sur un homme décent. » Accessoirement, ça relève d’une incompréhension totale de la fonction présidentielle : « Vous avez fait un téléfilm pour Nous Deux ! »
Le vrai Georges Pompidou, dit-elle, a assumé sa charge jusqu’au bout avec dignité et lucidité. Personne, d’ailleurs, ne l’a jamais vu tomber par terre en public, comme son alias Balmer le fait à deux ou trois reprises dans la telenovela.
Et voici que le chœur unanime des autres invités proteste, sur le thème : vous n’avez pas le droit de monopoliser la parole sous prétexte que vous connaissez le sujet ! C’est Patrice Duhamel qui résume le mieux le sentiment général : « Dans ce film, Pompidou est touchant ! » « Le problème quand on gouverne, coupe MFG, ce n’est pas d’être touchant, mais de toucher ! » Sous la Ve, enchaîne-t-elle, et contrairement à ce que disait VGE, « le président de la République n’est pas un homme comme les autres, tout simplement parce qu’il a la responsabilité des autres ! »
Quant à la succession de Pompidou, le candidat naturel, selon Marie-France, c’était Messmer.« Mais il n’avait pas envie de se présenter ! », tente Aknine, tout fier de sa science neuve. « Eh bien moi, ça me rassure, les gens qui n’ont pas envie de se présenter ! réplique Garaud.Ça prouve qu’ils mesurent le poids de la charge. »
J’aime cette roideur de grand commis de l’État, surtout quand ça semble être une seconde nature. Lorsque Marie-France Garaud parle des institutions de la France, ne dirait-on pas Benoît XVI sur Jésus ?
J’aime cette intransigeance de statue du commandeur. Un statut qui, au demeurant, ne lui est disputé par personne… C’est pourtant cette mystique laïque qui fit la République et qui, seule demain, pourrait la refaire.