Faute d’avoir la télé en vacances, j’ai demandé à Paris Première le DVD de son émission fleuvela Grande Anthologie de l’humour, multidiffusée cet été.
En raison du titre sans doute, j’avais espéré que ce programme aurait une dimension sinon intellectuelle, du moins critique ; que les sketches, autrement dit, seraient entrelardés d’interventions de spécialistes du rire et autres parlologues patentés. J’imaginais déjà quelques échanges bien sentis sur le thème “Peut-on rire de tout ?” ou “Y a-t-il un humour centriste ?”
Rien du tout ! Juste une compil estivale qui, à défaut de sens, avait au moins un ordre : alphabétique. J’ai donc testé pour vous, au hasard, l’épisode D-E-F. Deux heures quinze quand même, durant lesquelles on enfile des perles plus ou moins culturelles, avec pour seul collier l’humoriste Élisabeth Buffet, réduite à l’état de Miss Météo du rire enregistré ; espérons au moins qu’elle a été bien payée pour ce “ménage”.
Mlle Buffet nous trimballe donc sans plus de façons de Jamel Debbouze à Gad Elmaleh en passant par Dany Boon et feu Desproges. Des années 1950 à nos jours, tout y passe : télé, théâtre, récitals d’antan et stand-up comedy d’aujourd’hui. Mais la triste surprise, c’est de revoir Fernandel à son pire au fameux Palmarès des chansons de Guy Lux, en 1968. À 65 ans – l’âge où on peut commencer à faire le point –, Fernand Contandin continue de cabotiner sur le plus navrant de ses refrains : Félicie aussi…
Heureusement, dans ce fourre-tout il y a aussi des bonnes surprises, comme cette Julie Ferrier qui campe une prof d’arts plastiques post-moderne, déjantée et bien sûr slave. Une future émule de Sylvie Joly ? C’est tout le bonheur que je nous souhaite.
Bref, on aurait tort de se plaindre : ç’aurait pu être pire… D’ailleurs, ça l’a été ! Pas plus tard que début juillet, la même chaîne nous proposait le one-man show d’un certain Laurent Lafitte. Un “jeune talent comique” chaudement recommandé par Télérama en personne (chez qui deux “T” valent au moins une étoile au Michelin !) : « Une pochade pleine de démesure », s’emballe l’hebdo. En fait, on voit surtout la pochade ; la démesure, elle, serait plutôt dans ces enthousiasmes…
Un peu comme sous le soleil, il n’y a rien de nouveau dans ce nouveau comique même pas drôle. Entre son agent artistique véreux et sa belle-mère liftée, pas de quoi révolutionner la vis comica, ni même me dérider.
Mais bon, je suis un garçon raisonnable : pourquoi le progrès existerait-il en matière d’humour, si l’on n’en trouve pas trace dans l’ordre de la morale et de la politique ? « Tout a toujours très mal marché », disait Bainville. Pourquoi pas le rire ?
Publié pour Valeurs Actuelles, le 1er septembre 2011